Saule Pleureur

Chapitre 11

Bogota en Colombie, 07h31.

Du temps. Ce n'était à présent plus qu'une question de temps. Toutefois, d'encore combien ?

Affalé sur l'étendu dossier de son large et immense sofa immaculé, les premières lueurs de l'aube pénétraient la vaste pièce qu'était son bureau, innondant sous leur reflet chotoyant et écarlate chaque coin et recoin de la salle. L'obscurité de la nuit ayant laissé place aux vives couleurs du jour, la lune et ses étoiles chassées par l'arrivée du soleil.
Ainsi, devant lui, au-delà de l'immense balcon tout juste à quelques pas en face, y avait-il le spectacle de l'aurore, celui de l'éther métamorphosé sous les rayons du matin. D'une sombre toile où dansèrent millions d'étincelles, devint-il un azur baigné de nuances écarlates, décoré d'immenses et informes tâches blanches.

Une fresque qui à ses yeux, n'était décidément en rien comparable à celle de minuit. Quand l'azur de la lune, lui, était d'une beauté sincère et poignante, celui du soleil n'était que d'un fade charme superficiel, dénué d'élégance et dont toute la joliesse ne résidait qu'en ces bientôt aveuglants rayons.

Toujours affalé sur son dossier, le crâne balancé vers l'arrière, c'était à peine si son esprit s'embêtait à prêter attention à cette bas-de-gamme œuvre diurne, ses yeux clots n'ayant même que faire de son apparition.
Il avait de toute façon beaucoup mieux à penser.

Ce n'était plus qu'une question de temps avant que cette fameuse vieille connaissance ne vienne en ces lieux. Chaque seconde, chaque minute, chaque de heure de passée, signifiait la venue de plus en plus imminente de ce moment. Et de par conséquent, celui où il aurait en face de lui, Boss en personne.
Non pas qu'il en s'affolait ou s'alarmait plus que cela et nécessaire, mais plutôt qu'il apprehendait avec plus ou moins d'importance la suite des événements ainsi que les tournures qu'elle pourrait prendre.

Attendu que ce qu'il avait à lui dire était loin, très loin d'être léger ou négligeable, ce dernier concernant une certaine mafia se montrant de plus en plus ouvertement gênante vis-à-vis de L'Organisation. Bien-sûr, de cette situation, Boss était déjà au courant. Ce serait le sous-estimer en plus de le prendre pour un imbécile doublé d'un incompétent que de penser et croire qu'il ne l'était pas déjà. Cet homme de tout temps et constamment, ne manquait jamais de savoir quelle était la situation. Une capacité ou aptitude, à la fois autant signe d'un homme d'une profonde minutie que d'une personne à la capacité de déduction particulièrement affûtée, le rendant en conséquence, singulièrement difficile à surprendre.

De ce fait, il ne s'attendait ni ne prévoyait en conséquence, pas du tout à le surprendre, d'autant que L'Organisation et cette mafia s'avaient mutuellement dans le collimateur depuis maintenant pas mal d'années. Le fait donc que cette dernière depuis un moment aujourd'hui, entame des hostilités et actions plus manifestes, n'était pas en soi une stupéfaction. Seulement, ce qu'avait-il à informer à Boss rendait les choses beaucoup plus originales, et concrétisait davantage une suite plus tendue ou tout du moins, plus frontale des évènements quant à cette mafia.

En attendant, tout ce qu'il avait à faire pour l'instant était d'attendre. Lors de leur dernier appel, Boss l'eut informé qu'un groupe dont une vieille connaissance à lui, serait dépêché afin de le rejoindre au Mexique au plus tôt, d'évidence, dans la mesure où cette soi-disante information avait de quoi valoir un tel changement de dernière minute. Au cas contraire, si cette fameuse information s'avérait à ses yeux impertinente et sans grande importance, les choses risquerait alors de très fortement devenir pénibles pour lui à ce moment là. Éventualité qu'il le savait, ne serait pas le cas. Ce qu'il avait à lui dire était un évènement beaucoup trop curieux, incohérent et quelque peu surprenant pour qu'il soit anodin. Toutefois, nul ne pouvait réellement prédir Boss, qui savait comment il y réagirait.