Chapitre 19 - Partie 01

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Acapulco de Juárez dans l'Etat de Gerrerro, 07h36.

Après l'aurore, vint enfin l'aube. Etincelante et radieuse aube qui graciait la voûte céleste de sa princière robe azurée aux milles et un nuages immaculées bénis des majestueuses nuances de doré que les lueurs du jour peignaient sur leur dos. Cette toile de l'éther que venaient compléter ces quelques légères teintes violâtres et orangées, derniers vestiges d'une aurore que chassait petit à petit les premiers rayons du matin. Ces teintes, alors, qui s'estompaient progressivement, pâlissaient au fil des minutes à mesure que s'imposait l'inéluctable ascension du soleil inondant le monde de ses lumières encore orangeâtres, débarrassant l'horizon de son obscurité, et que disparaissaient les dernières trâces de la nuit. Nuit dont ne restait-il plus de réminiscence que ces froides brises côtières soufflant sur ses vêtements, faisant danser au gré de ses caprices les longues mèches noirs de son épaisse chevelure ; sa peau qui, depuis la terrasse du toit d'une des nombreuses constructions du repère, baignait sous les faveurs de ces chaleureuses et délicates lumières matinières.

Ancienne hacienda prise d'assaut par le cartel, allait-il de soi que les lieux, en dépit de sa nature actuelle de niz à criminels, en arborent toujours les patentes caractéristiques. La première, entre autres, ni plus ni moins que l'importante et vaste étendue de son domaine qui, selon Lynx, couvrait pas moins d'un bon millier d'hectare ; une superficie, forcément, qui n'eut pas manqué d'interpeler les convoitises et intérêts d'un des nombreux cartels de la région. Ensuite, y avait-il aussi les quelques surfaces de terres autrefois dédiées à l'agriculture ou à la plantation, ainsi que les dizaines et dizaines de bâtisses et édifices anciennement dédiées, sans doute, au stockage des récoltes, aux étables, et au logement des anciens travailleurs des terres. Et enfin, le plus évident, l'indubitable intérêt architectural des lieux.

Après tout, au-delà de principalement être une entité économique autonome à usage agricole dotée de son propre système de production, une hacienda demeurait aussi une résidence, propriété de riches commerçants et, parfois, d'administrateurs ou propriétaires terriens qui en usait aussi comme foyer. Un foyer dont l'édifice, à la grande différence de ceux servant de logement aux travailleurs - souvent des autochtones ou des esclaves - présentait un luxe et un faste qu'arboraient fièrement les titulaires. Attendu que ceux-ci étant les indicateurs de richesse et de prospérité du domaine. En somme, plus était productive et lucrative l'hacienda, plus se faisait somptueuse et princière sa casa grande(1) qui, elle, se distinguait alors de toute autre construction de par sa taille et ses apparats. Et pour ce qui était de cette hacienda-ci, l'édifice qui dut servir de résidence aux anciens propriétaires se repéraient aisément de par ces mêmes particularités.

Assis sur la rambarbe de béton de la terrasse, une jambe repliée sur cette dernière tandis que l'autre pendait nonchalemment au-dessus du vide, et lui-même adossé contre le mur des escaliers menant au toit dépeuplé, depuis la prenante vue que lui offrait les deux étages de la bâtisse, Lynx pouvait apercevoir le sommet de l'imposante casa grande toute proche qui, malgré les années sous la mainmise du cartel dont la rudesse et l'indélicatesse eurent endommagé les murs extérieurs et dégradé de son faste, conservait toujours de cette allure et élégance reconnaissables aux beautés architecturales ; la sienne qui s'imprégnait d'inspirations purement latines.
Du reste, Lynx avait aussi une vue d'ensemble sur cette partie du repère, y apercevant ses membres - le plus souvent accompagnés et agités, ceux-ci devant sans doute encore converser ou disserter sur la mort de leur comparse - vadrouiller à droite et à gauche, y observant aussi la plus d'une douzaine de construction qui s'étendaient jusqu'aux grands et larges murs du domaine un peu plus loin, ainsi que les quelques arbres et végétations ayant çà et là poussés entre les bâtisses malgré le gravier. Un paysage, alors, que venait compléter et resplendir la solennelle étendue de bleu au-dessus d'eux, mer céleste et inviolable dont la toile, par centaine, tâchetée d'un majestueux blanc immaculé enjolivait le ciel de son magnifique voile céruléen. Splendide voile qui, aux absolus antipodes de celui noirâtre de la nuit, inondait le jour des chaleureux rayons du soleil levant, ses lueurs qui dévoilaient la beauté d'un tableau que celles de la lune, jamais, quand bien même avec l'appui de milles autres astres, ne seraient capable de rendre hommage: L'horizon.

Saule PleureurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant