L'alarme de mon téléphone me tire du sommeil. Après la semaine chaotique que je viens de passer, je suis étonnée de sentir mon corps reposer de tout son poids sur le matelas de mon lit. Pas de somnolence parasite durant la nuit, pas de rêve étrange où je plonge dans l'immensité de l'océan, pas de réveil traumatique debout au milieu de la salle de bain.
La mélodie stridente s'amplifie. Péniblement, j'impose à mon bras de se mouvoir à l'aveugle pour tenter de déterminer la position de mon appareil. Quelle idée de l'avoir programmé pour me réveiller aux aurores ! Il me paraît impératif de le réduire au silence pour ma tranquillité d'esprit. Après avoir tâtonné aux endroits habituels, mes recherches demeurent infructueuses. La joue collée à mon oreiller, un gémissement plaintif se faufile par mes lèvres entrouvertes. Obligée d'ouvrir les yeux pour découvrir où est-ce que mon portable s'est faufilé, je me laisse guider par la sonnerie qui ne va pas manquer d'alerter tout l'étage.
Les deux mains posées à plat sur le sol, la tête à l'envers, j'examine le dessous de mon lit. Un halo lumineux me confirme la présence de l'engin de malheur. Je m'étire pour tenter de l'attraper mais je ne réussis qu'à l'effleurer du bout des doigts et le repousser encore plus loin. J'étends mon bras, je perds l'équilibre et je me retrouve étalée de tout mon long sur le vieux parquet en chêne de ma chambre.
La douleur irradie dans toute mon épaule, qui a amorti ma chute. Je vais encore écoper d'un bleu.
L'avantage de cette position est que mon téléphone est à ma portée. Lorsque j'éteins l'alarme, le prénom d'Amandine apparaît dans mes notifications et me rappelle pourquoi je dois me lever si tôt. On a planifié une séance de footing ce samedi matin pour se préparer à la Pink Run15. À l'occasion d'octobre rose et de la lutte contre le cancer du sein, notre école organise une course le mois prochain. Tous les bénéfices seront reversés à une association. Et en raison de nos impératifs, on a eu la merveilleuse idée de courir à 6h00.
Dans l'espoir que ma binôme de TD m'annonce un retard de quatre ou cinq heures, j'ouvre mes messages pour découvrir ce qu'elle m'écrit. C'est beau de rêver !
[ J'espère que tu es d'attaque ! Suis chez toi dans 10 minutes.
Toujours allongée à même le sol, je regarde l'heure d'envoi. 5h53. Il me reste donc huit minutes pour me lever, passer aux toilettes, enfiler une tenue et grignoter une barre de céréales protéinée. Seins nus, en short, je cherche ma brassière de sport au fond de mon armoire. Je me souviens alors que je l'ai mise hier pour me rendre à la soirée avec Jason. Je la trouve sur le dossier de mon fauteuil victorien. Quand je l'enfile, des bribes de la soirée me reviennent.
Le bras puissant d'Adrian me faisant virevolter au rythme de la musique.
La main délicate d'Adrian entortillant une mèche de mes cheveux autour de son index.
Les iris tempétueux d'Adrian m'adressant une supplique silencieuse.
Le souffle d'Adrian au creux de mon oreille me coupant la respiration.
Les lèvres d'Adrian effleurant les miennes dans l'espoir d'y voler un baiser.
...
Il me suffit de fermer les yeux pour ressentir les frissons provoqués par ses doigts sur ma peau. Comment ce type peut-il envahir toutes mes pensées ce matin alors que j'ignorais jusqu'à son existence pas plus tard que la semaine dernière ?
Les vibrations étouffées de mon téléphone abandonné sur ma couette me sortent de ma rêverie. La photo d'Amandine occupe l'écran quelques secondes avant de disparaître. Elle est sûrement arrivée. Je dévale les escaliers le plus silencieusement possible et l'invite à entrer.
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Blood is my lemonade
RomantikMyrtille débute sa dernière année d'école de journalisme. Pour se faire embaucher dans un grand journal national, elle est à la recherche du scoop qui la révèlera. Avec son appareil photo accroché en bandoulière et son carnet à portée de main, elle...