Le Chant du Cygne

Chapitre 2

 Son petit déjeuner fut frugal, une simple pomme verte et il chargea à contre-cœur le corps de la jeune adolescente dans sa berline noire. Chad prit la direction de la forêt la plus proche et se chargea de porter le lourd sac sur son épaule. Ses pas étaient sûrs, montrant que ce n'était pas la première fois qu'il se livrait à ce genre d'exercice. Il s'arrêta dans un coin reculé où très peu de promeneurs s'aventuraient en raison de la période de chasse qui venait d'être ouverte. L'homme s'agenouilla en posant son fardeau et en sortit une pelle usée. S'affairant à creuser une tombe de fortune pour la fillette et prêtait une attention extrême aux bruits alentours. Chose faite, Chad banda ses bras musclés et poussa de toutes ses forces le corps puis recouvrit après un dernier adieu. Les mottes de terre possédant de l'herbe étant intactes étant donné qu'il avait pris soin de ne pas ravager le haut de la terre pour recouvrir le lieu retourné. On y voyait que du feu. Avec un demi-sourire satisfait, il tourna les talons avec nonchalance en emportant son matériel.

Sa journée se passa sans encombres et sans nouvelles de la fillette à son plus grand bonheur. Il n'existait rien de plus poussif que de voir les parents battre ciel et terre pour la retrouver. Ils n'étaient pas les parents modèles que la jeune adolescente méritait et il prenait un plaisir malsain à s'amuser de leur désespoir. Un ricanement sortit de sa bouche tandis qu'il croisa les jambes, assit sur son canapé. Ses yeux s'illuminèrent à cette pensée qui le ravit. Il devait maintenant trouver une autre personne sur qui déchaîner sa frustration et oublier cet événement passé qui occupait son esprit. Cette jeune femme, il l'avait regardée dans les yeux avant de placer son couteau sous sa gorge. Ça aurait dû être facile, comme pour toutes les autres. Seulement, elle ne suppliait suppliait pas. Elle le regardait sans ciller de ses yeux verts émeraude. Il avait alors fermé les paupières et son poignet avait effectué ce geste qui était devenu mécanique. Pas d'étranglement comme pour les précédentes. Non. Celle-ci méritait un traitement spécial et il ignorait pour quelle raison. Pour la première fois de sa vie, il avait sentit l'organe qui se trouvait dans sa poitrine frémir.

Chad secoua la tête, un rictus sur ses lèvres. Il devait oublier cette histoire. Pourtant elle ne quittait plus son esprit. Toutes ses victimes avaient été retrouvées livides et sans vie, sauf une. Elle. Il fait quitté le pays immédiatement après qu'il l'ait relâché en simulant une erreur de sa part. Elle était partie et lorsqu'il était revenu après sa tentative de meurtre ratée. Son souffle s'accéléra, il devait finir ce qu'il avait commencé à l'époque pour enfin trouver la paix. Sa détermination s'affermit au fur et à mesure de ses réflexions. Il s'empare de son portable et composa le numéro de son innocent complice. Il tomba sur le répondeur comme la plupart du temps et se contenta de prévenir qu'il ne pourra pas venir ce soir en raison d'un départ précipité pour affaires. Directeur d'entreprises, Chad était en effet un homme qui ne manquait pas de responsabilités et les rares fois où il pouvait prendre des vacances il les occupait d'une manière plutôt ludique. Il fit rapidement ses bagages et se retrouva en un clin d'oeil à l'aéroport. Il embarqua dans son avion d'un pas militaire en saluant d'un hochement de tête le pilote. Il s'assit calmement et sortit un dossier de sa pochette tandis que les réacteurs grondaient propulsants l'avion dans les airs.

Le voyage se passa sans encombres mis à part quelques turbulences qui secouèrent l'appareil à l'approche de l'aéroport de Moscou. Revêtant son masque d'homme d'affaires, il descendit de l'appareil sa mallette de travail à la main droite. Son regard balaya tout ce qui se trouvait autour de lui avec une mine sérieuse. Un pas après l'autre, il retrouva le pays où tout s'était produit. Il sentit ses mains commencer à trembler avant qu'il ne reprenne le contrôle quelques millisecondes plus tard. Il pénétra dans son véhicule blindé avec grâce et d'un geste de la main indiqua le moment du départ. Aussitôt, son ordre fut suivi et le convoi se mit en route vers la propriété avec un arrangement parfait. Chad tourna légèrement la tête rendant les veines de son cou perceptibles à l'oeil nu. Le long du trajet, son index de sa main droite ne cessait de tapoter sa cuisse dans un mouvement régulier. Son coeur battait lentement et normalement et il sentit un petit tiraillement au niveau de son ventre, comme s'il se sentait tendu. Il balaya d'un revers de la main cette sensation puis se concentra sur l'itinéraire des voitures. Plus il approchait de sa demeure restée vide un long moment, plus cette sensation persistait et le plongeait dans l'inconnu. La voiture dans laquelle il se trouvait passa entre deux grilles noires élégantes laissant place à un superbe jardin à l'anglaise coloré par de multiples roses se trouvant éparpillées au milieu des myosotis et des autres plantes. Son regard s'attarda sur une pivoine jaune étalant ses branches sur la longueur avec finesse lui rappelant ce moment d'égarement. Secouant la tête légèrement, Chad ouvrit la portière tandis que le véhicule était toujours en marche et en descendit pendant que le chauffeur appuya sur la pédale du frein. Il foula pour la première fois depuis longtemps ce sol recouvert de graviers blancs comme neige. Les arbres bordant le chemin étaient d'un vert éclatant et éblouissaient sous le soleil de Moscou.