Chapitre 4

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Tôt le matin, lord Hartworth et son valet avaient pris le train pour Londres, et depuis ils arpentaient en long et en large l'est de la ville.

- Je ne pensais pas que cela serait aussi difficile, concéda Simon.

- Moi non plus, ajouta le jeune homme. Et pourtant nous avons déjà croisé beaucoup de Chinois, d'Indiens, et même quelques Afghans...

- Oui, et c'est à croire qu'aucun Bondagistanais n'habite ici. C'est un pays assez fermé, mais Londres est tout de même la plus grande ville du monde...

- Il doit forcément y en avoir. Cherchons encore.


Ils débouchèrent quelques minutes plus tard dans une petite rue, sombre et étroite, à quelques centaines de mètres du quartier de Whitechapel.

- Dire que c'est à cet endroit que sévissait Jack l'éventreur, il y a de cela quatre ans...

- Oui, et cela fait froid dans le dos...

- Allons plutôt par ici, déclara Simon en désignant un petite échoppe au nom étranger.

Ils pénétrèrent dans la boutique.

- Bonjour messieurs, que puis-je faire pour vous ? annonça une voix féminine.

Les deux hommes regardèrent la jeune vendeuse en robe noire. C'était une jolie brune dont le teint ressemblait fortement à celui du magicien et de son assistante. Aucun doute, elle était originaire d'Asie centrale. Il ne restait plus qu'à savoir de quel pays...

- Bonjour mademoiselle. Nous aimerions tout d'abord voir les différents produits que vous avez, demanda lord Hartworth.

Le jeune gentleman avait rapidement appris au cours de la journée qu'il valait toujours mieux commencer par parler affaires avec les commerçants... Avant de glisser doucement vers le véritable objectif de sa visite.

- Principalement du chanvre et de la soie en provenance directe d'Asie. répondit la jeune femme.

- Je peux ? demanda-t-il en s'approchant d'une pièce de tissu.

- Bien sûr.

Le jeunehomme caressa délicatement la belle étoffe, tandis que Simon commençait à faire lentement le tour du magasin.

- De quel pays disiez-vous ? demanda-t-il après quelques instants.

- La soie vient essentiellement de Chine...

- Et le chanvre ?

- Plutôt d'Afghanistan, mais aussi du Kreplashistan et du Bondagistan...

- C'est amusant... Figurez-vous que pas plus tard qu'hier j'ai eu l'occasion d'assister à un spectacle bondagistanais. C'était très impressionnant, vous connaissez ?

La vendeuse le dévisagea un bref instant.

- Je... Enfin, non... Mais, pourquoi cette question ?

- Oh, pour rien. Disons juste que c'était là une curieuse coïncidence. Car ce n'est pas un pays très connu.

- En effet.

- Mais, dites-moi... A la couleur de votre peau vous semblez aussi venir de cette région...

La jeune femme paraissait nerveuse.

- Vous comptez acheter quelque chose oui ou non ?

- Effectivement, déclara lord Hartworth en posant un billet sur le comptoir que la jolie brune considéra d'un œil attentif.

- Que voulez-vous savoir ?

- Où puis-je trouver un Bondagistanais ? demanda-t-il, certain d'avoir toute son attention.

- Un Bondagistanais ? Pourquoi cela ?

- Disons que ce fameux magicien, dont je vous ai parlé, a, en quelque sorte, dérobé quelque chose qui m'est très cher, mademoiselle.

Il glissa un deuxième billet sous les yeux de la vendeuse.

- Et vous voudriez le retrouver, ici, à Londres ?

- Oh, il doit déjà être loin à l'heure actuelle...

- Je ne comprends pas...

- Vous êtes Bondagistanaise, n'est ce pas ?

La jeune femme ne répondit rien, mais le jeune lord était prêt à employer tous les moyens nécessaires pour la faire parler...

- Simon ?

- Oui monsieur.

- Sommes-nous seuls dans la boutique ?

- Absolument monsieur.

- Alors fermez la porte, voulez-vous. Et assurez-vous que personne ne nous dérange...

- Bien monsieur.

Le valet poussa le verrou et se plaça en travers de l'entrée.

- Je repose ma question. Venez-vous du Bondagistan ?

La vendeuse semblait tétanisée.

- Oui... Mais, pourquoi ?

- Comme je vous l'ai dit, ce que ce magicien m'a volé est si précieux que je suis prêt à aller au bout du monde pour le retrouver...

- Mais, qu'attendez-vous de moi ?

- Je cherche un Bondagistanais, expliqua-t-il. Un Bondagistanais qui me serve de guide pour aller dans son pays.

La jeune femme recula d'un pas.

- C'est une folie...

- J'en suis parfaitement conscient, répondit lord William.

Elle le regarda droit dans les yeux. Il n'y avait qu'une seule chose qui pouvait pousser un homme à entreprendre pareille aventure.

- Vous l'aimez, n'est ce pas ?

- Aveuglément...

- Je vous conseille de l'oublier.

- Impossible. Tant qu'il me restera ne serait ce qu'un souffle, je n'aurai de cesse de penser à elle.

- Elle a beaucoup de chance de vous avoir. Votre cœur est celui d'un preux et valeureux chevalier, dit-elle en posant la main sur la poitrine du jeune homme. Pourtant je ne pense pas que vous soyez prêt à affronter le Bondagistan...

- Je le suis, affirma-t-il d'un ton déterminé.

- Oh non, vous ne l'êtes pas, croyez-moi... Et vous allez devoir oublier tout ce que vous savez sur les hommes... et les femmes.

- Que voulez-vous dire ?

La jeune vendeuse retira sa main brusquement avant de retourner derrière son comptoir pour noter quelque chose sur un morceau de papier.

- Soyez à cette adresse à la tombée de la nuit, dit-elle en lui confiant le petit mot.

- J'y rencontrerai mon guide ?

- Cela se pourrait bien mon cher...

Les Aventuriers du BondagistanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant