Chapitre 16

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Carl

Je me sèche rapidement à l'aide de ma serviette et enfile un caleçon, un jogging et un tee-shirt. Je l'ai assez faite attendre comme ça.

-Tu veux manger quelque chose en particulier ce soir ? lui demandé-je depuis ma chambre.

Je n'entends pas de réponse. Je me dirige alors vers le salon et la vois assise sur le canapé. Elle a l'air bouleversée et ses yeux sont rougis par le chagrin.

-Mia ? Qu'est-ce que...

Je me fige tandis que je vois un homme d'une cinquantaine d'années se planter entre nous. Il a ouvert ses bras en grand comme pour m'encourager à l'étreindre et un sourire narquois défigure son visage vieilli par le temps. Mon père... et par sa présence ressurgissent instantanément des souvenirs ténébreux que j'avais essayé tant bien que mal d'enfouir au plus profond de mes entrailles.

-Surprise, fiston ! s'exclame-t-il.

Une forte odeur d'alcool s'émane de lui. Dans sa main, un revolver. La rage et la peur s'emparent maintenant de moi. Qu'est-ce qu'il fait ici ? Et qu'a-t-il fait pour que ma copine se retrouve sur le canapé en état de choc ?!

-Qu'est-ce que tu fais là ?! rugis-je, en le dépassant pour me précipiter vers Mia.

-Quoi, un père n'a pas le droit de rendre visite à son fils ? raille-t-il.

Je m'assois à côté d'elle et prends son visage en coupe pour mieux l'examiner.

-Ça va ? m'enquiers-je.

Elle hoche la tête en signe de oui, mais son corps est secoué par les sanglots et les larmes perlent sur ses joues. En la voyant dans cet état, mon sang ne fait qu'un tour.

-Qu'est-ce que tu lui as fait, espèce d'enflure ?! hurlé-je en me ruant sur mon père.

-Rien, on a juste papoté un peu avec ma belle-fille, feint-il.

-Tu n'as rien à faire ici, dégage de là !

-Je crois que tu oublies à qui tu parles, mon grand.

-Qu'est-ce que tu veux ?!

-Et bien, tu ne répondais pas à mes emails, je me suis permis de te relancer en personne.

-Comment as-tu eu mon adresse ?

-Je suis flic, je te rappelle, enfin ancien flic, grâce à toi...

Je sens alors le regard inquisiteur de Mia se poser sur moi. Je me sens bouillir de l'intérieur. Mon passé me revient en pleine face, tel un boomerang.

-Tu n'as pas le droit de te pointer ici, avec une arme, qui plus est, et menacé ma copine ! C'est moi que tu veux voir, tu la laisses en dehors de ça !

-Pour ma défense, je n'avais aucune idée qu'elle serait là.

-Alors, laisse-la partir ! On règle les choses entre nous deux et personne d'autre !

Un sourire en coin se dessine sur le visage de mon géniteur.

-Tu ne lui as rien dit, n'est-ce pas ?

Je serre les dents.

-Elle n'a pas besoin de savoir ! répliqué-je.

-Savoir quoi ? s'enquiert Mia.

-Je n'arrive pas à croire que tu ne lui aies pas dit qui tu étais vraiment, lance mon géniteur en secouant la tête.

Je le fusille du regard tandis qu'il tourne autour de moi, tel un lion prêt à bondir de sa cage.

-Carl ? De quoi est-ce qu'il parle ? me demande Mia.

Je ne lui réponds pas. Je n'ose même pas la regarder.

-Je comprends son désarroi, continue mon père, si elle t'avait connu à l'époque, elle n'aurait jamais craqué pour toi. Il faut dire que tu n'avais rien à voir à ce que tu es devenu aujourd'hui. J'ai moi-même bien failli ne pas te reconnaître quand je t'ai vu à la télévision deux mois plus tôt. Tu es loin du jeune homme frêle et brun que tu étais jadis. Tu as pris des stéroïdes pour devenir aussi baraqué ?

Mia me fixe d'un air interrogateur tandis que mon père lui révèle des bribes de mon passé. Mais je me tais. Lui exposer toute la vérité reviendrait à la perdre à tout jamais.

-Tu as raison de rester silencieux, mieux vaut qu'elle ne sache pas, au risque qu'elle te quitte.

-J'ai changé, elle n'a pas besoin de connaître mon passé, pesté-je.

-Carl, quel passé ? Qu'est-ce que tu ne me dis pas ? insiste Mia.

Elle se lève du canapé et s'approche de moi pour me faire face. Son regard est plein d'anxiété et dur à la fois. Je sens mon estomac se contracter et mon cœur se déchirer.

-Je peux me charger de lui répondre à ta place si tu le souhaites, fiston.

-La ferme ! sifflé-je entre mes dents.

-Carl ! m'assène Mia de sa voix suppliante.

Je sens mon regard se baisser et je finis par abdiquer. Mieux vaut qu'elle l'entende de ma propre bouche plutôt que par celle de ce manipulateur.

-Mia, je... je ne suis pas l'homme que tu crois, finis-je par dire après un silence.

-Comment ça ?

-J'ai fait des choses que je n'aurai pas dû quand j'étais jeune.

-Qu'est-ce que tu as fait ?

-Avant d'être DJ, j'étais dealer, Mia et... et j'ai... j'ai fait de la prison.

Nos coeurs accordésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant