Chapitre 10

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Cependant, lorsqu'elle me rejoint dans la matinée, je n'ose rien lui demander. Après tout, c'est vraiment gênant, et même si j'ai l'habitude de ruer dans les brancards, ce n'est pas le moment. Sans compter que je me rappelle très bien ce que je lui ai confié le jour précédent sur l'attitude de mes parents envers moi. D'ordinaire, je ne parle pas de cela. Et au fond, sa présence me réconforte, sa manière d'être est tellement maternelle.

Comme nous terminons notre déjeuner, Djamila nous retrouve dans la chambre :

— Bonjour !

— Bonjour Madame.

Elle nous fait un sourire, puis elle se tourne vers Liz :

— Tu vas bien ?

— Oui, mais je me sens un peu fatiguée.

— C'est normal.

Puis elle pivote vers moi :

— Nous pouvons aller dans le couloir ?

— Bien sûr.

Une fois à l'extérieur de la chambre, elle me demande sur-le-champ :

― Elle va rester jusqu'à demain, c'est cela ?

― En effet.

― Alors je vous propose de dormir chez nous la nuit prochaine. Ainsi quand vous reviendrez ensemble chez vous, vous serez reposée. Je sais par expérience qu'une nuit à l'hôpital n'est jamais confortable.

― Chez vous ?

― Oui, au palais.

― Au palais ?

Elle éclate de rire :

― Vous allez répéter chaque fois ce que je dis, ou vous acceptez de passer la nuit chez nous ?

― Vous vivez dans un palais ?

Et c'est une universitaire qui parle... C'est difficilement croyable cette pauvreté de vocabulaire !

Tout à coup me reviennent les dernières paroles de Djalil. Il avait parlé d'un palais, mais sur le moment, j'étais trop dans l'émotion pour y penser.

Cependant, elle m'explique avec gentillesse :

― Celui de mon mari, ou plutôt de sa famille. Pour autant, cela ne doit pas vous rendre mal à l'aise. C'est un vieux bâtiment du XVe siècle. Et nos chambres sont assez confortables, et pas décorées avec un luxe ostentatoire, si cela vous convient mieux.

― Pourtant, si quelque chose arrive à ma fille pendant la nuit, comment cela se passera-t-il ?

― Nous serons aussitôt prévenus et il y aura toujours quelqu'un pour vous conduire à l'hôpital. Vous aurez besoin de prendre du repos. Et chez nous, vous pourrez le faire, car vous n'aurez que cela à vous préoccuper.

― Mais cela n'est pas raisonnable.

Bon sang ! Depuis que je suis dans ce pays, il me semble n'avoir jamais autant prononcé ou entendu ce mot ! « Raisonnable » ! J'ai beau avoir commis une grosse erreur dans ma vie, dès lors je suis toujours raisonnable. Je réfléchis. Toutefois, depuis que je suis ici, j'ai la tête ailleurs, et je suis souvent dépassée. Mon organisation se fissure.

Elle pose sa main sur la mienne.

― Ce qui ne le serait pas, c'est que vous soyez fragilisée. Une maman doit être forte, et de plus vous, vous êtes toute seule. Et je ne parle pas du fait que vous vous trouviez dans un pays étranger.

Je soupire. Elle n'a pas tort.

― Bon, d'accord.

― Parfait. Et nous vous donnerions une chambre assez isolée, comme cela vous n'aurez pas l'impression d'empiéter sur notre vie, et nous sur la vôtre. Car il y a aussi de cela derrière votre refus, si je ne me trompe pas.

Passion dans les dunesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant