Chapitre 10 : Une nuit sereine

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Après avoir couché Marc, préparer la table pour le petit-déjeuner du lendemain et fait un rapide tour de la maison pour s'assurer que tout était en ordre, Suzanne rejoignit son lit, laissant la lueur tamisée de la lampe de chevet envelopper la chambre d'une ambiance chaleureuse. Les événements de la soirée tournaient dans son esprit, comme les pages d'un livre qu'elle relirait avec une certaine satisfaction mêlée d'appréhension. Avait-elle bien agi durant cette soirée avec cet adolescent en proie à la gestion de ses émotions ? Les questions tournoyaient dans son esprit, tissant des fils d'incertitude.

Elle se remémora le moment où elle avait retrouvé Marc dans le rayon BD jeunesse, absorbé par la lecture de la BD Yakari. Sa demande hésitante s'il pouvait la prendre avait touché une corde sensible en elle. L'image de l'adolescent, perdu dans les pages d'une bande dessinée destinée à des enfants plus jeunes, lui semblait en même temps incongrue et poignante.

La soirée s'était poursuivie avec la préparation d'une pizza maison, un repas partagé dans la convivialité de la cuisine. Avant de passer à table, elle avait découvert Marc dans la salle de jeux, bâtissant des mondes imaginaires avec des Lego et engagé dans des conversations animées avec la peluche qu'elle lui avait offerte. Un tableau touchant qui évoquait davantage l'innocence de l'enfance que l'adolescence.

Le moment des épisodes de Lucky Luke avait révélé une timidité palpable chez Marc, comme s'il était paralysé par la simple idée de demander un câlin. Elle avait alors pris l'initiative de l'inviter à reposer sa tête sur ses genoux, accompagnée de douces caresses dans ses cheveux, dans l'espoir de le détendre. Une tendre proximité qui avait parue apaiser le garçon, bien que ce geste semblât plus naturel pour un enfant de 6 à 8 ans que pour un adolescent.

Après le repas, l'étape du brossage de dents et de la mise en pyjama avait précédé la mise en place de la couche pour la nuit. Elle se souvint du moment où Marc avait commencé à montrer des signes de crise d'angoisse, et comment l'atmosphère avait changé lorsqu'elle lui avait redonné la peluche qu'il avait laissée dans la nursery. Un simple objet qui paraissait avoir le pouvoir de rassurer et de ramener un sourire sur le visage de Marc.

Pourtant, une pensée pragmatique s'insinua dans son esprit. Elle ressentait la douleur persistante de son dos, témoignage silencieux des tâches exigeantes de la journée. Changer Marc sur son lit n'était peut-être pas la meilleure solution, pensa-t-elle. Demain, elle déciderait d'utiliser la table à langer, une alternative plus pratique pour ménager son dos. C'était un détail, certes, mais dans la somme de petites actions, Suzanne se questionna sur le fil délicat qui séparait la prise en charge d'un adolescent de celle d'un enfant, une frontière parfois floue qu'elle commençait à découvrir. 

Un long bâillement et un regard sur son roman lui fit se dire : "Ce ne sera pas pour ce soir que tu pourras avancer dans ton roman, Suzanne." Elle éteignit la lumière et, bercée par la tranquillité de la maison endormie, elle s'abandonna au sommeil, espérant passer une nuit reposante.

Alors que la lune tracer sa route dans le ciel étoilé. L'esprit de Marc se déployait dans un univers de western féérique. À dos de cheval, il chevauchait aux côtés de son ami Jinn, une figure à la ressemblance frappante, mais dont la prestance et le gilet en cuir orné d'un éléphant brodé les distinguaient. Les sabots des chevaux résonnaient dans l'allée poussiéreuse d'un village de l'Ouest, baigné dans la lumière dorée du crépuscule.

Soudain, des cris déchirèrent l'air, suivis du crépitement des coups de feu. La peur étreignit Marc, mais Jinn, imperturbable, l'encouragea à les affronter. Au galop, ils foncèrent jusqu'au Salon, où Jinn, après un saut agile de son cheval, dégaina son Colt et s'engouffra dans l'établissement. Marc, tremblant mais résolu, ne pouvait abandonner son ami. Une étrange sensation lui fit croire qu'il se faisait dessus, mais aucun indice n'apparaissait sur son pantalon. Il décida de sauter du cheval, prêts à rétablir l'ordre dans leur ville.

Pas facile la vie de familleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant