Chapitre 12

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Lyam

Mais pourquoi j'ai accepté?

Je me pose cette question depuis un moment, maintenant que je suis rendue compte que c'était une mauvaise idée. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris, mais la seule chose que j'espère, c'est que Apolline soit une meilleure personne qu'elle.

Mes pensées fusent : je ne cherche certainement pas d'amie, encore moins de petite-amie.

Alors pourquoi j'ai accepté ce putain de rendez-vous?!

Je sais qu'il est maintenant trop tard pour changer d'avis, alors je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. Mais mon cerveau est en ébullition, et trop de choses me tracassent, alors j'ai besoin de me détendre.

Je me lève, attrape une feuille et un crayon dans un coin de mon bureau, avant de laisser ma main appréhender ses mouvements. Je ne sais pas ce que je dessine, mais je laisse faire. A vrai dire je me serais attendu à quelque chose d'abstrait, mais ce que j'ai fait ressemble à une fleur.

Une fleur, pourquoi une fleur??

Mon esprit est encore beaucoup trop actif, je n'arrive pas à me détendre, alors j'attrape ma veste posée à côté de la porte, puis je dévale les escaliers.

C'est parti pour se remplir les poumons de nicotine, épisode cinq milles deux-cents quarante-deux.

J'aurais pu aller fumer sur mon balcon, mais j'ai besoin d'air. Et de pluie, si possible : dommage que la météo ne soit pas sur commande. C'est décidé, je prendrai une bonne douche froide en rentrant.

Je marche dans le parc Lyonnais le plus près de chez moi, tout en allumant ma cigarette. La fumée s'occupe de dissiper mes pensées et je peux enfin me vider la tête comme il se doit. Cette fille est sortie de ma tête en même temps que cette rencontre imminente, et je continue à fumer tout en marchant. J'observe les oiseaux picorer ce qu'ils peuvent sur le sol, tandis qu'un petit garçon qui doit avoir cinq ans arrive en courant, les faisant tous fuir. Pris de pitié pour ses petits volatiles qui n'ont rien demandé, je marche vers ce petit, avant de me mettre à sa hauteur, un bon mètre devant lui, en m'accroupissant.

- T'es qui, le monsieur? Ma maman m'a dit que j'avais pas le droit de parler aux inconnus. Et puis d'abord, ça c'est pas bon pour la santé, elle me l'a dit aussi, dit-il en pointant ma cigarette du doigt avant que je n'ai pu prononcer le moindre mot.

Quelle chance, il a une maman!

J'essaie d'ignorer cette réflexion, alors je lui souris devant sa répartie, tout en enlevant ma clope de la bouche pour me présenter.

- Salut bonhomme, moi c'est Lyam, je réponds, ignorant ce qu'il vient de dire. Elle ne t'as pas appris, ta maman, à observer les oiseaux au lieu de leur faire peur? C'est comme si je te courais après : tu voudrais t'envoler aussi, hein, et tu ne pourrais même pas finir de manger, imagine! dis-je en me relevant pour imiter un géant près à le poursuivre.

Il part en courant, rigolant par la même occasion, ce qui me fait esquisser un léger sourire.

Ah les gamins!

Je reprends ma marche autour du lac, tout en finissant ma cigarette. Je ne sais plus quoi penser, ma vie est devenue fade, presque dénuée d'intérêt. J'ai envie de sortir de ce gouffre qui m'oppresse... juste de pouvoir vivre. Normalement.

Dès que je rentre chez moi, je pose mon téléphone et j'appelle Noah.

- Hi guy! me dit-il alors que ses cheveux blonds brillent à l'écran, l'air joyeux, avant de remarquer ma tête des mauvais jours et de fatigue, sans doute affreuse. Comment ça va?

- Salut Noah. C'est pas la grande forme, je pense que t'as remarqué, dis-je avec un sourire contrit. Mais j'ai l'habitude après tout. Et toi?

- Oh nooo! Tu veux en parler?

- J'ai accepté de rencontrer une fille, apparemment la meilleure amie de la petite sœur de ta copine - j'espère que tu as saisi, c'est un peu long, je m'exclame, à demi amusé. Enfin bon, je ne le sens pas trop, mais maintenant que c'est fait, c'est fait...

- Ah that is that! C'est Apolline son nom, n'est-ce pas? Don't worry sa meilleure amie m'a assurée qu'elle était adorable. Et puis si besoin je suis là, dit-il en reprenant son sérieux et en arrêtant de profiter de son bilinguisme.

- Merci mec, j'espère que tu as raison. D'ailleurs je suis sorti aujourd'hui. J'ai croisé un gamin, ça m'a rappelé mon enfance...

Je repense alors à "celui-qui-n'a-pas-de-maman" comme on m'appelait à l'époque... J'étais déjà assez malheureux avant qu'elle ne me tombe dessus et empire les choses.

- Lyam, dit soudain Noah en soupirant, me sortant de mes pensées qui s'apprêtaient à m'emporter dans les ténèbres de mon esprit. Tu n'as pas à t'en vouloir. Ni à avoir honte. Ce n'est pas de ta faute, ça ne l'a jamais été, prononce-t-il, me regardant avec des yeux doux, alors que je remarque qu'il est toujours dans le bureau de son agence.

- Mais c'est dur, No'.

- Je sais Lyam. Mais quoi qu'il arrive, je serai toujours là pour toi, même à l'autre bout de la Terre, je suis bien caché dans un coin de ton cœur pour t'aider. Ne l'oublie jamais.

- Tu me manques Noah...

- Toi aussi, Lyam. Je reviendrai bientôt, dès que je le pourrais, promis.

- Bon raconte sinon, tu fais quoi de beau en ce moment? je lui demande afin de me changer les idées.

- Oh je suis allé surfer à la Great South Bay hier soir, les vagues étaient fantastiques!! Sinon il faut que j'aille voir mes chevaux demain, mais c'est toujours un peu compliqué à gérer une agence, you know. Et toi, toujours à dessiner?

- Mouais, en ce moment ma vie se résume au dessin, à la lecture, les séries, la guitare et mes clopes... tu me connais.

J'entends une voix lointaine qui semble crier, mais la qualité de l'appel est tellement bonne que je me demande si ça vient de mon côté ou du sien.

- Oh merde, on m'appelle, sorry Lyam, je vais devoir y aller. Anyway prend soin de toi mon ami, reviens moi en forme, et je suis sûre que ton rendez-vous avec this girl va bien se passer. I'm proud of you, see you soon!

- Okay, bye Noah, bon courage pour le boulot, et ne m'oublies pas surtout, dis-je avec un rire peu convaincant.

- Never. I miss you, j'essaierai de passer te voir en France bientôt! Salut!

- A plus.

Bien sûr, Noah, en tant que patron d'une entreprise sur un continent à l'autre bout du monde, a des obligations. Ce qui fait que je me retrouve une fois de plus tout seul : essayant d'éviter mes propres problèmes alors qu'ils m'encerclent avec acharnement.

AILY - Apolline Ivy. Lyam Youssef.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant