41 - Déjà-vu

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~Outnumber - Dermot Kennedy~

PDV Simon :

J'ai comme une impression de déjà vu. Cet aquarium, ces larmes, le film se rejoue malgré nous. Cette fois ce n'est pas moi qui ai fui, c'est lui qui m'a demandé de pouvoir prendre de la distance. Il a réussi, au milieu d'un torrent de larmes, à me faire comprendre qu'il ne pouvait, pour l'instant, pas s'empêcher de nous associer, mais qu'il ne voulait pas me blesser. Au final, c'est même moi qui l'ai encouragé à prendre du temps pour lui. Parce que même si ça me déchire le coeur, je ne veux pas que la vue de mon visage lui rappelle, encore et encore, les horreurs qu'il a subi.

Les yeux plongés dans le bassin où des raies semblent improviser un ballet digne des plus grandes salles, je retiens difficilement les larmes que je ne veux pas laisser couler devant tant de monde. On est en pleine après-midi, et, pour une veille de Noël, l'aquarium est bondé. Je m'en fout maintenant, des heures creuses ou pleines. J'y passe tout mon temps et c'est le seul seul endroit où je n'ai pas l'impression que mon cœur va exploser dans ma poitrine.

Je ne détache pas mes yeux de l'eau, essayant de faire disparaitre le monde réel, quand de petits rires suraiguës me font sursauter.
Un couple âgé accompagné d'un enfant qui ne doit pas avoir dix ans, s'approche de mon bassin, resté, pour l'instant, miraculeusement vide de public.

-"He ! Charlie, pas trop vite ! Tu sais bien que papy et mamie ont du mal à te suivre !" Rigole la petite dame, qui essaie de ne pas perdre des yeux une petite flèche à tête blonde.

-"Vous aviez qu'à être moins vieux !" Rétorque le petit garçon, déjà adossé à la vitre à côté de moi.

Sa grand mère éclate de rire, avant de prendre la main de son mari, visiblement un peu perdu, pour le faire accélérer.

Le dénommé Charlie, lui, s'assoit au sol, considérant sans doute que l'attente est trop longue pour ses petites jambes.

Ses grands parents le rejoignent rapidement et, relevant la tête vers le haut, il croise mon regard.

-"Mamie, pourquoi le monsieur il est triste ?"

Mince, je pensais être discret.

-"Je ne sais pas. Ça ne nous regarde pas mon sucre. Tu peux essayer de lui demander si tu veux mais il a le doit de ne pas vouloir te répondre, d'accord ?"

Je souris légèrement en me disant que, de toute façon, je pense que personne n'est capable de refuser quoi que ce soit à une bouille aussi mignonne.

-"Monsieur, pourquoi vous pleurez ? C'est pas pour les petits ça, de pleurer ?"

-"Non, non, il n'y a pas d'âge pour pleurer," je réponds doucement. "Tu sais ça fait du bien de pleurer et même les adultes le font quelques fois. Moi, mon amoureux est parti, alors ça me rend triste tu comprends.

-Ouah. C'est trop nul ça. Il vous aime pas ?

-Si. Mais c'est plus compliqué que ça.

-Bah alors ça va. Ma maman me répète tout le temps que rien n'est plus fort que l'amour. Moi ça m'intéresse pas l'amour, les filles elles sont moches en plus."

Je ris doucement avant de me baisser à sa hauteur.

-"Tu sais Charlie, l'amour c'est pas qu'entre les petits garcons et les petites filles. Ce que tu ressens envers ta famille et tes amis, ce que ta maman ressent pour toi, c'est ça l'amour. Et c'est le plus beau sentiment de monde, t'es pas d'accord ?

-Alors quand papy m'achete des glaces, c'est de l'amour ?

-Oui mon sucre, viens, laisse le monsieur tranquille, on va aller se chercher la plus grosse glace du magasin," interrompt le gentil grand-père, jusque là bien silencieux.

Toi, mon océan (Young Royals)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant