Une décennie a passé. Et pourtant je n'oublie rien.
On dit que chaque histoire nous change. La notre reste gravée au creux de ma main.
Nous étions si forts, nous deux contre le reste du monde.
Te rappelles-tu?
Souvent, je nous revois fuir la vie, la police, nos malheurs. Je me souviens ces interminables attentes à ne pas savoir si tu allais rentrer. Mais aussi ces montagnes russes et ces danses effrénées. Ces nuits blanches à parler. Cette euphorie. Ces déclarations passionnées, ces heures à sembrasser.
Nous avons cramé la vie, l'amour, nos limites.
Toujours à nous croire plus forts.
Nous deux contre le reste du monde.Pourtant nous ne voulions qu'être heureux. Faire battre pour de vrai nos petits coeurs. Deux êtres brisés qui se trouvaient. Nous ne cherchions qu'à nous aimer. Le nez dans le caniveau et la vision à 180 degrés.
Encore maintenant, après toutes ces années j'ai parfois l'impression de te croiser. À la sortie d'un after, d'un café. Ton long corps maigre, ton sourire carnassier. Essaierai-tu de revenir? De me ré-enfermer? M'obligerais-tu à te suivre. Profiterais-tu de ma faiblesse? Ton fantôme revient comme on rappelle la douleur.
Quand je me regarde dans le miroir, je ne vois que cette cicatrice. Il y a tellement de choses que j'aimerais te dire. Que j'ai tant de fois souhaiter ta mort. Peut-être autant de fois que ton bonheur. Que je te hais pour tout ce que tu m'as fais. Que j'aimerais connaitre de longues nuits sombres sans réveil. Que j'aimerais ne plus y penser. Que j'aimerais que ça ne m'ait pas autant marquée.
J'imagine ce que tu es devenu.
Tes peines se sont-elles envolées? Tes angoisses ont- elles disparues? A-t'elle réussi à les apaiser ?
J'aimerais qu'elle soit heureuse. Qu'elle ne s'endorme pas la peur au ventre. J'ai voulu la prévenir. Mais je n'ai pas osé.Je me dis tout de même que j'en suis revenue, qu'il a calmé les cris, les cauchemars, les pleurs. Que j'ai enfin pu me reposer. Que j'ai moi aussi connu mon quart d'heure de bonheur.
J'y ai cru pendant longtemps. J'ai cru que j'avais enfin le droit à une vie apaisée. J'avais baissé ma garde. Je m'étais persuadée de l'aimer.
Puis il ma quittée et j'ai replongé.Il n'y aura pas de fin heureuse.
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