Chapitre 4.1

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Les nouvelles recrues de Marchepin passèrent les deux pires mois de leur existence. Ils avaient enchaîné les missions sans jamais pouvoir se reposer. Soumis à des cadences infernales et contraints de manger ce que la forêt voulait bien leur concéder, ils étaient tout amaigris. Toujours occupés, ils ne voyaient pas le temps passer. Pourtant, même s'il ne leur restait qu'un mois de labeur avant de rentrer chez eux, ils avaient l'impression qu'une éternité les séparaient de ce jour. Les seuls moments où ils pouvaient se détendre un peu, c'était à leur retour à Marchepin où lors des bivouacs dans la forêt profonde.


Enfin, les transporteurs pouvaient souffler. Partis à l'aube, ils n'avaient pris qu'une courte pause pour déjeuner. Cela faisait donc un bon moment qu'ils ne s'étaient plus reposés et leur progression dans la forêt profonde s'en était fortement ressentie. Il faut dire que, depuis quelques temps, Dubois Transporteur n'acheminait plus que de lourds sacs rouges et l'accumulation de missions exténuantes avait fini par épuiser ses employés.

La petite troupe venait de monter le camp qui les abriterait pour la nuit. Chaque membre avait accroché son hamac à l'emplacement qui lui semblait le plus approprié puis, tous ensemble, ils étaient partis chercher la nourriture qui devait les rassasier jusqu'au lendemain. Par chance, la cueillette avait été bonne. Fraises des bois, choux, carottes, menthe, myrtilles et groseilles constituaient pour eux un festin hors du commun. Pour l'occasion, ils avaient partagé leur butin en vingt-cinq portions équitables et les avaient servies dans de grandes feuilles de choux. A la lumière des lucioles, de petits groupes s'étaient formés selon les affinités de chacun. A côté des sacs de marchandises, les cinq policiers du voyage mangeaient tranquillement leur salade en s'assurant du coin de l'œil que les transporteurs se tenaient à carreau et qu'aucun danger extérieur ne les menaçait. Huli, quant à lui, profitait de son repas aux côtés de son meilleur ami Anatole, du blaireau peureux Raoul et de Maral, le bienveillant cerf qui leur était venu en aide lors de leur premier voyage vers Marchepin.

« C'est trop bon, fit remarquer le jeune blaireau la bouche pleine. Je pourrais en manger des tonnes ! Anatole, si tu n'en veux pas, je peux prendre ta part ?

—Si tu veux répondit-il d'une voix éteinte.

—Fais un effort ! Manges-en quand même un peu, lui conseilla Huli, inquiet de voir son ami si malheureux. Tu ne tiendras pas le coup si tu ne te nourris pas. »

D'une main fébrile, l'écureuil porta à sa bouche une poignée de salade qu'il mâcha lentement sans conviction.

« Je sais que ta dernière mission avec tes parents t'a beaucoup affecté mais tu ne dois pas désespérer pour autant...

—Parce que tu ne trouves pas ça désespérant, toi, de découvrir que tes parents sont horrifiés que leur petit écureuil chéri ait choisi le même métier qu'eux ? C'est pas toi qui les as eu sur le dos pendant trois jours ! Quand ils ne me faisaient pas la gueule, c'était pour me faire des reproches. Alors moi, évidemment, j'me suis pas laissé faire, je leur ai dit leurs quatre vérités aux parents : qu'ils ne s'étaient jamais intéressés à moi, que s'ils ne voulaient pas que je fasse transporteur ils n'avaient qu'à me le dire, et surtout, je leur ai dit qu'ils étaient les pires parents de la forêt !

—Super ambiance », chuchota Raoul.

Anatole qui l'avait entendu lui lança un regard noir puis se jeta sur sa salade et l'engloutit en un instant.

« Tu sais, c'est normal de se disputer de temps en temps avec ses parents. Tu verras la prochaine fois que vous vous verrez tout sera oublié et ils seront ravis de pouvoir passer plus de temps avec toi, le consola le renard. De toute façon, toi, tu ne regrettes pas de faire ce métier, non ? C'est bien celui dont tu rêvais ? »

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 23, 2023 ⏰

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