Chapitre 4 : L'étranger.

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  La jeune fille s'est réveillée et a parcouru les bois, attirée par une si jolie mélopée  qu'elle sembla comme hypnotisée par celle-ci. La mélodie était chantée par une voix si mielleuse que celle-ci guida la jeune princesse jusqu'à une étrange clairière. La jeune fille ne se rendit pas compte qu'elle semblait être  tombé dans un piège où un être surnaturel lui faisait face. Cette homme, si on peut l'appeler ainsi, présentait toutes les caractéristiques de l'An duine math, un croque-mitaine diabolique aspirant les âmes de ses malheureuses victimes. Cependant, était-ce vraiment le démon légendaire qui se trouvait devant elle ou était-ce quelqu'un de beaucoup plus mystérieux ?

   Artémise ouvrit les yeux et desserrant les poings, elle prit son courage à deux mais sa peur ressurgit aussitôt, l'instant d'après. L'homme faisait face à une Artémise qui restait paralysée par la peur, les yeux exorbités, incapable de détacher son regard de cet être sorti tout droit d'un conte horrifique. 

"Ai-je la moindre chance de survie face à cet homme ? Est-ce que je pourrais trouver la force de m'enfuir si il s'apprêtait à me causer d'horribles souffrances ? J'ai toujours risquer ma vie lorsque je vivais au palais mais je m'en suis toujours sortie indemne, la plupart du temps..."  songea-t-elle. 

Dans la tête d'Artémise, les questions se bousculaient sans cesse. Elle pouvait regagner La Citadelle des Mille et un rois si elle le désirait mais ce serait retomber dans un cycle de violence sans cesse renouvelée. De surcroît, elle ne voulait plus éprouver cette sensation d'être un oiseau attendant de se faire déchiqueter par le chat. Elle n'avait plus envie de se demander quelle pouvait être le terrible et nouveau sort que lui réservait les concubines du roi.  Pourtant durant plusieurs minutes, elle se mit à préférer une mort par empoisonnement plutôt que de servir de repas à une créature aussi épouvantable. Jusque là, elle ne croyait pas aux contes au sujet de L'An duine math mais maintenant que celui-ci la fusillait du regard, elle n'éprouvait plus aucun scepticisme .

Quand elle avait fui la Citadelle des mille et un rois, il s'agissait pour elle  d'échapper aux actes aberrants et immondes perpétrées par les concubines. Néanmoins, désormais, elle semblait être en fâcheuse posture. elle ne pouvait se laisser aller à son triste sort. Elle ne pouvait accepter de souffrir aux mains de L'an duine math. Elle pouvait constater, avec beaucoup de peine, qu'elle était tombée de Charybde en Scylla. La situation ne pouvait qu'empirer.

Etant dans l'incapacité d'agir ou d'émettre le moindre son, Artémise examina l'individu qui persistait à la gratifier d'un regard haineux. Pourtant, quelques seconde après, elle émis des réserves. L'homme ne possédait pas de grands yeux blanc luminescents et malgré le fait qu'il semblait en colère, il ne paraissait pas dangereux. Etait-ce vraiment l'esprit effroyable dont parlaient les folklores ? Etait-ce réellement une cruelle divinité qui, debout face à un cromlech, attendait patiemment l'arrivée d'une proie à chasser ? Possédait-il vraiment de mauvaises intentions ? Et surtout allait-il la poursuivre à travers les bois et la tuer, ne laissant alors aucune trace de son sinistre méfait ?

Tout en s'interrogeant sur son identité et ses desseins, la princesse demeura tout de même figée comme sous l'emprise de l'incroyable aura de charisme se dégageant de l'individu.  Elle paraissait envoûtée par sa prestance et l'ascendant qu'il exerçait sur elle. Il n'avait prononcé aucune parole, aucun mots, se contentant de la regarder, ses yeux brillant d'un étrange éclat et  la bouche se tordant peu à peu en un rictus de rage, semble-t-il. Enfin, naturellement, c'est ce qu'en déduisit Artémise. En quelques minutes, il n'avait prononcé aucun mais la jeune princesse n'eut aucun mal à interpréter son silence comme un signe d'agacement. 

"On ne pourrait pas dire que ce type est quelqu'un qui jacasse inutilement... Non, à mon avis, si il s'entête à rester silencieux, c'est peut-être, déjà, pour signifier qu'il ne recherche nullement la compagnie d'autrui mais aussi, pour affirmer silencieusement qu'il préfère être seul... En tout cas, il m'a tout l'air d'être un ermite..."  se dit Artémise en courbant l'échine.

Les Fables des Cinq Mondes - Tome I : La princesse vagabonde.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant