Chapitre 5 : Le nid à vipères.

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Une jeune fille aux longs cheveux noirs quitte les appartements qu'elle occupe avec son amie et la mère de celle-ci. Vêtue d'une simple chemise de lin et d'un court pantalon en coton, elle ne passe point inaperçue, lorsqu'elle traverse les couloirs, et c'est le cas de le dire ! Une femme s'habillant avec des atours masculins et qui semble être, physiquement parlant, à l'opposé des valeurs de la cour constitue une anomalie plus qu'étrange aux yeux des nobliaux, ceux-ci éprouvant presque de la curiosité à son encontre, malgré leurs dégoût évident qu'ils portent pour cette jeune roturière. Chacun se retourne sur son passage alors qu'elle arpente ce dédale de couloirs et de galerie qu'est La Citadelle des Mille et un rois mais ne prêtant aucune attention aux quolibets qui fusent à son sujet, elle poursuit son chemin bon gré mal gré. Ce château est un nid à vipères, c'est l'évidence même, et les serpents qui s'y nichent sont aussi, voir plus, dangereux que la moyenne. 

Lucy n'ignorait point les regards condescendants que lui jetaient les nobles qui, d'ailleurs, riaient sous cape alors qu'elle les devançait. Elle ne s'en préoccupa nullement mais malgré sa détermination à faire fi des moqueries que s'échangeaient les nobliaux, elle fut néanmoins blessée dans son égo. Certes, elle ne ressemblaient pas aux dames de la cour avec leurs maquillages parfaits, leurs belles chevelures et leurs robes sublimes et hors-de-prix, toutefois, elle restait tout de même un être humain sensible. Nul n'avait besoin de lui rappeler constamment sa condition. Pourtant les grands de ce monde, sans vergogne, déployait de grands efforts pour lui faire comprendre une bonne fois pour toute qu'elle ne faisait pas partie de leur classe. Lucy se remémora la fois où elle était passée à deux doigt de se faire couper la main. Ce jour-là, tous s'était rassemblé pour participer à cette macabre attraction. Ils pouffaient de rire et ne se donnaient même pas la peine de cacher leur hilarité. La jeune fille garderait pour toujours à l'esprit, leurs ricanements et le dédain qu'ils ressentaient à son égard. Pas étonnant, que la princesse Artémise ait pris la décision de se retirer de ce milieu où les êtres les plus malfaisants qui soient grouillaient dans un nid à l'apparence luxueuse.

Pourtant, en dépit de leurs railleries, elle se borna à parcourir les quelques lieux qui la séparait des splendides jardins royaux. Là l'attendait sûrement son amie Jolyne devant probablement mourir d'impatience vu que l'ancienne voleuse s'était vu dans l'obligation de la faire patienter durant une demi-heure environ. La raison pour laquelle Lucy s'était attardée dans les appartements occupés par elle et sa mère était simple au demeurant : Lucy ne parvenait pas à retrouver un poignard offert par Anna, lors de son seizième anniversaire. En tant que garde du corps, la belle concubine considérait qu'il paraissait vitale que la jeune fille protège sa progéniture et surveille donc ses arrières car un accident pouvait survenir, dans la plupart des cas, surtout lorsque l'on vivait à la Citadelle... En conséquent, en raison de la perte de son poignard, Lucy se trouvait dans tous ses états et ne réussissait pas à calmer sa nervosité qui grandissait à mesure qu'elle s'adonnait à ses recherches.

 Lorsque Jolyne s'apprêtait à quitter sa chambre afin de se diriger vers les jardins bordant la Citadelle, Lucy était, à ce moment précis, au comble de l'excitation, manifestant une certaine allégresse à l'idée de visiter ce splendide parc s'étendant sur plusieurs lieux et se trouvant comme suspendus entre la terre et les cieux. Les lieux étaient indubitablement extraordinaires. De lourdes et immenses colonnes de marbres soutenaient de grands espaces de verdure où se côtoyaient une immense profusion de buissons et d'arbustes chargés d'une grande variété de fleurs multicolores telles des mimosas, des campanules ou des camélias. Ceux-ci bordaient des chemins pavés de pierre blanchâtre qui eux-mêmes sillonnaient à travers de belles pelouses aménagées de façon à concevoir des formes symétriques, créant dès lors, des figures spiralées se rejoignant à leurs embranchements. Aux carrefours, sur des terrasses surélevées, trônaient de splendides fontaines taillées dans le marbre le plus pur et à leurs sommets, se trouvaient des sculptures représentant divers personnages mythologiques comme les déesses Eichtangan-Van-Aed, Akienlinn-Van-Aed ou encore Louechian-Van-Aed. De celles-ci partaient un jet d'eau, déversant dans les bassins, une eau claire et pure, reflétant, pendant l'été, les rayons du soleil.

Les Fables des Cinq Mondes - Tome I : La princesse vagabonde.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant