Il y a dix mois de cela.
Il faisait froid, trop froid.
Des silhouettes bravaient ce froid, malgré les bourrasques qui faisaient voltiger les flocons dans un ouragan de blancheur.
Ces mêmes étoiles de glace venaient se coller aux parcelles de peau exposées au froid mordant, sur les cils, sur des lèvres où une écharpe n'offrait pas sa protection et parvenaient à s'immiscer entre les interstices des vêtements.
L'air glacial s'infiltrait dans les manches des explorateurs, qui serraient les dents sous leurs foulards fourrés de polar.
Chacun de leur pas s'enfonçait dans la neige, et malgré leurs bottes qui étaient sensées préserver du froid, ils avaient l'impression que leurs pieds n'étaient plus que des blocs de glace.
- Pourquoi on n'a pas prit les véhicules ? souffla Sylvain ses paroles se condensant sous une forme de petit nuage.
- Le terrain est impraticable pour eux, les roues ont crevés lorsque l'on a voulu traverser la plaine. répondit un autre, son souffle se transformant également en buée.
- Eh bien, ce sera bientôt l'état de mes godasses. Si les voitures ne passent pas, pourquoi nous on saurait hein ? râla Sylvain qui leva sa jambe hors de la neige et la secoua pour éparpiller la glace qui y collait.
- Arrête de faire l'idiot. On doit traverser coûte que coûte ! s'énerva l'homme en tête de marche.
- Tu peux continuer si tu veux, mais moi j'ai un mauvais pressentiment. Ça fait un bout de temps qu'on a perdu la communication avec les autres, et tout déconne. Je sais même pas quelle heure il est !
Sylvain s'attendait à ce que le chef de groupe lui réponde, mais seul le vent siffla à ses oreilles dans un hurlement déchirant.
Le ciel lui même criait, comme un avertissement, rendant la conversation de plus en plus corsée. Pourtant, malgré les prémisses de la tempête qui faisait voltiger des bancs de nuages immaculés, Sylvain aurait dut entendre le chef de groupe, lui qui avait une des voix les plus audibles du groupe.
- Les gars... où est Gabriel ?
Personne ne donna de réponse, ils regardèrent tous autour d'eux, sans voir quoi que ce soit. Le manteau blanc qui les enveloppait ne les aidait guère à distinguer plus loin que ce qu'ils voudraient, et il n'était pas question de se séparer plus que nécessaire. Déjà des appels résonnaient dans le blizzard, mais restaient sans réponses. Bientôt une certaine peur s'empara vicieusement des explorateurs, leur espoir de retrouver leur leader s'amenuisait avec les minutes, tout comme leurs chances d'arriver à bon port sans lui. Mais partir sans Gabriel n'était envisageable pour personne de cette bande, et cette angoisse qui leur nouait les tripes n'influençait pas le volume de leur voix.
À rester immobiles, le froid commençait à prendre possession d'eux, les gelant de plus en plus. Mais une voix proféra un message différent que celui du nom du meneur.
- J'ai trouvé quelque chose ! On dirait une crevasse !
Le cri du jeune homme réveilla la troupe de sa léthargie, assez vite pour qu'elle le voie s'approcher de la tâche noire dans le paysage immaculé. Cette aberration dans le paysage morne était parfaitement visible, gouffre de noirceur perturbé par les flocons minuscules comme les parasites d'une vieille télévision.
Sylvain se demanda pourquoi il ne l'avait pas remarqué avant.
- Tu vois quelque chose ?
L'explorateur suivit du regard la progression du jeune vers le trou. Il voulut l'interpeller pour l'arrêter mais celui-ci s'arrêta à mi-chemin sans avoir eut besoin de son avis.
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Dragons et Solitaires
ParanormalPeu de choses séparent l'ami du monstre. Valérian, ou plutôt Axel si l'on veut se rappeler de lui ainsi, est un Martyr. Un dragonnier qui marchait auparavant parmi les humains, avant de s'être brutalement intégré au monde chaotique des Grandes Fami...