3. Mensonge

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III.

— Et ce connard de Le Blanc !? s'emporta Tobias en levant son verre. D'où il sort !?

— Qui ça ?

Je posai ma main contre le bras de Safa et secouai la tête en souriant. Sans répondre, il bu d'une traite la fin de son vin et se laissa retomber sur le canapé derrière lui en grognant.

Prévenue à la dernière minute, ma meilleure amie nous rejoignit chez nous  tard dans la soirée tandis que Tobias et moi entamâmes notre seconde bouteille.

Je n'avais dans ma vie qu'eux deux.

Je passai mon bras autour d'elle et lui chuchotai les grandes lignes de ces dernières heures. Elle grimaça à la mention des cadavres.

— Voilà, fallait rester avec moi en psycho' au lieu de m'abandonner pour un autre master ! répondit-elle en levant son verre. Là-bas au moins, le seul con arrogant que tu dois supporter c'est celui que tu deviens.

Je ris et rejetai la tête contre le dossier de mon siège.

— Je te rassure, t'es pas du tout comme ça, lui dis-je en fermant les yeux.

— Ça ne saurait tarder.

Avachie à côté de moi dans le grand fauteuil de notre salon, je la rapprochai de moi et soupirai. Safa prit au même moment mon verre de ma main et le termina.

— Vous comptez finir de tout ranger un de ces quatre ? lança-t-elle.

Je redressai la tête en direction des derniers cartons de déménagement qui trônaient vers l'entrée de l'appartement.

Les affaires d'hiver de Tobias traînaient ici depuis mon arrivée, et aucun de nous n'avait encore trouvé la motivation de les sortir. Il avait fait du tri dans ses habits pour me faire de la place, et aucune de ces boîtes n'avait bougé depuis.

Enfin, si. Il y eut bien une fois où je décidai de m'y coller mais il insista pour s'en occuper lui-même. Il prononça ces mots fin mai et nous entamions à présent octobre. Les cartons étaient toujours là. Ce bazar était presque devenu un élément de notre décoration.

Notre appartement était petit mais parfait pour un couple. L'entrée donnait directement sur le coin salon. Canapé trois place, gros fauteuil disposé à côté et petite table basse en bois ; nous avions tout chiné dans les brocantes de Nethem. Seul l'écran plat qu'apporta Tobias avec lui était neuf.

Derrière moi se trouvait une cuisine ouverte ; modestement décorée, dans laquelle j'avais placé plusieurs plantes que j'entretenais avec soin.

La grande pièce avait deux fenêtres; l'une côté salon et l'autre côté cuisine, et donnaient sur une route et sur le balcon des voisins d'en face. Nous vivions au deuxième étage d'un immeuble plutôt ancien mais particulièrement avantageux pour son loyer.

Situé dans un quartier à l'est de la ville, nous étions loin des tours et du centre. Pour cause, le Département de Criminologie de l'université se tenait à moins de trois kilomètres de là où nous habitions.

En bref, un endroit pas cher, idéal pour un couple et bien localisé. Parfait pour le numéro un et deux.

— Il ne veut pas que j'y touche, c'est sa responsabilité, répondis-je. Mais comme tu peux le voir, il a d'autres priorités.

Nous scrutâmes toutes les deux Tobias qui secouait la tête en rythme les yeux fermés. La musique et l'alcool l'avait transporté dans un monde où nous n'existions plus.

Safa claqua de la langue en le voyant.

— Comme le week-end dernier, quoi. Et celui d'avant. Et les dix milles autres d'avant encore, dit-elle, faussement irritée.

Le MarionnettisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant