8. Le Secret

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XVII.

— Esther ! ESTHER !

La voix de Tobias fit écho dans mon esprit. J'ouvris lentement les yeux et laissai la lumière autour de moi m'aveugler.

— Regarde-moi.

Sa main pivota mon visage dans sa direction et je fronçai des sourcils. Les souvenirs me revinrent et je gémis de douleur en sentant mes tempes cogner avec acharnement.

— Je suis là, tout va bien se passer.

Ma vue redevint claire et je le vis accroupit face à moi. Mon regard passa de sa silhouette aux alentours. Nous étions encore sur la scène de crime. Transportée à l'extérieur de l'appartement, on m'avait placé à terre contre le mur du couloir de l'étage. Et en voyant les balises au sol et toutes ces personnes en combinaison s'afférer vers l'ascenseur non loin de moi, tout me revint pour de bon.

La bague, le mot, tout le reste.

J'avais eu une hallucination, une vision si claire que je jurai encore sentir sur moi les brûlures fantômes qu'elle m'infligea.

Mais tout était dans ma tête. Mon esprit jouait avec mes angoisses.

Prise d'un vif pincement au cœur en me rappelant de tout, je grimaçai et sentis la main de Tobias toucher mon front.

— Que s'est-il passé ? continua-t-il, sa paume caressant avec douceur mes cheveux jusque dans ma nuque. Qu'y-a-t-il que je n'ai pas vu... ? Tu étais juste à côté de moi et la seconde d'après, tu t'es écroulée.

Son expression était torturée par la culpabilité. Inquiet, il m'analysait d'un regard triste.

— Parle-moi, Esther.

Tout ça... je crois que ça fait beaucoup.

Ma gorge était sèche et mes jambes encore engourdies. J'avais atrocement soif.

— Qu'est-ce qui fait beaucoup ?

Je fermai les yeux pour chasser les souvenirs amorcés par sa question. Il plaça ses doigts sous mon menton pour me forcer à lui faire face.

— Tu me le dirais si quelque chose t'étais arrivée, hein ?

Je le dévisageai, hésitante.

Et si finalement, je lui disais ? Le coup d'aujourd'hui m'avait assommé. Avais-je la force d'en affronter davantage toute seule ?

— Tu me le dirais, pas vrai ?

L'intensité de son regard était réconfortante. La chaleur de sa main était apaisante. Tobias me connaissait. Il me comprenait. Je pouvais tout lui dire. Je ne voulais plus mentir.

— Eh bien, je...

J'entendis une sonnerie retentir et son regard délaissai le mien pour regarder son téléphone.

Je ne quittai pas le sien. J'avais les mots sur le bout de la langue. Une seconde de plus et je libérai mon esprit d'un poids insoutenable.

Je n'avais qu'à ignorer cette sonnerie ; qu'à devenir plus captivante qu'elle et recapturer son attention.

Il fixa son écran pendant plusieurs secondes.

— Tobias.

Au son de ma voix, il rejeta l'appel et me refit face.

— Tu dois te reposer, dit-il en caressant mes cheveux. Je nous appelle un taxi.

Je fronçai des sourcils et baissai les yeux. Un drôle de sentiment me gagna en voyant cette opportunité me passer sous le nez.

Le MarionnettisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant