Cassette #3

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Alastor prit la troisième cassette, et la mit dans le lecteur. Il regarda les autres membres de l'hôtel pleurer leur ami, pendant que lui s'occupait juste de sa curiosité à assouvir. Il avait bien remarqué l'appel à l'aide du démon araignée, il avait simplement décidé de l'ignorer. Parce qu'Angel n'était rien pour lui. Pas un ami, pas un ennemi, pas un jouet. L'existence de l'araignée ne lui procurait rien. Pas de joie, pas de tristesse, pas de peur, pas d'intérêt. Voilà, il n'avait aucun intérêt à maintenir ce démon en vie. Il ne l'avait donc pas fait.

Je te félicite d'être arrivé jusque-là. Je t'en pensais pas capable, pour être honnête. Pour commencer cette cassette, je vais d'abord raconter une autre de mes erreurs. Encore et toujours avec Valentino. Mais elle n'est pas pour lui. J'dois juste laisser du suspens :p
Bref. Un mois après m'avoir offert Fat Nuggets, Valentino est... bizarrement redevenu gentil. J'ai pas voulu y croire. J'me suis persuadé que c'était encore pour m'amadouer, mais... comme on dit, l'amour rend aveugle, et j'suis con. Et jusque-là, je m'étais pas encore débarrassé de mes sentiments pour lui. Alors j'ai accepté. J'ai accepté d'être encore plus con, et je l'ai cru. Il m'a emmené sur un toit, il m'a embrassé, il m'a touché. C'était doux. J'me forçais à ne pas m'y accrocher, mais ses mains qui me touchaient aussi gentiment m'ont fait perdre la tête. J'ai bêtement pensé qu'il était redevenu celui dont j'étais tombé amoureux. Il m'a fait dansé, j'ai adoré danser avec lui. J"me suis mis à genoux, j'ai pensé qu'il voulait une pipe. Mais il m'a relevé, et il m'a regardé dans les yeux. Il m'a fait reculé contre la rambarde, contre laquelle il m'a encore embrassé. Puis il m'a mordu la lèvre. Il m'a mordu le cou, et il m'a mis par-dessus bord. Son regard a encore changé. Et j'me suis senti bête de m'être laissé avoir. Il m'a menacé, il m'a dit que si je travaillais pas mieux, il me pousserait par-dessus la rambarde. J'espérais qu'il me lâche, qu'il me laisse tomber. Au fond de moi, je voulais mourir et me débarrasser de tout ça. Je voulais me sentir partir, je voulais m'endormir pour toujours. Je voulais revivre l'expérience de ma mort minable. Mais ce que j'ai dit... c'était tout le contraire. Je sais pas pourquoi, je l'ai supplié de me laisser une dernière chance, de me remonter en jurant que je ferai mieux. Encore une fois, j'ai pleuré pour lui. Je sentais mon coeur battre plus fort, les mots sortaient sans que j'le désire. J'lui ai juré que je ferai mieux, que je sucerai plus de bites, que je m'en prendrai trois de plus en même temps s'il le fallait, je l'ai supplié de me remonter. Et c'est ce qu'il a fait. Aujourd'hui, j'me pose une question... si je l'avais supplié de me laisser tomber, de me lâcher, de me laisser m'écraser contre le bitume froid des Enfers, est-ce qu'il m'aurait écouté ? Est-ce qu'il aurait accédé à ma demande ? 

Charlie n'en pouvait plus. Elle arrivait à ses limites. Et il restait encore trois cassettes entières, ajoutée à celle qu'elle écoutait. Comment était-elle censée survivre à ça et ne pas tuer ce connard qu'elle n'avait vu qu'une seule fois dans toute sa vie ?

Val a toujours été un peu mystérieux. À cette époque, en tout cas. J'sais pas si c'est parce que j'le kiffais ou parce qu'il était la seule personne que j'pouvais voir, mais il me donnait l'impression qu'il était seul. Pas de famille, pas d'amis, personne à part ses employés. Alors, quand après dix ans de souffrance, il m'a dit qu'il me présenterait à ses associés, j'ai été surpris. Dix ans que j'le connaissais, et j'avais vu personne à part lui. Dix putains d'années que j'ai passé à m"prendre des coups de poings, des coups de pieds, et même des coups de fouets. Honnêtement ? J'sais même pas comment j'ai survécu jusqu'à maintenant.

Angel avait ri d'un air un peu triste. 

J'avais hâte de vous rencontrer. Valentino m'avait trainé de l'autre côté de son palais. Il m'avait emmené dans cet endroit que j'avais jamais visité. Alors j'ai profité. Je pensais pas vous voir, vous rencontrer. En fait, je pensais pas croiser qui que ce soit. Mais c'est arrivé. Je vous ai vu, j'ai croisé votre regard. J'ai vu comment vous étiez habillés. Costard pour l'un, tenue décontractée mais toujours très classe pour l'autre. Des riches. Des putains de riches qui jetaient leur argent par les fenêtres pendant que j'galérais à m'en faire juste un peu puisque Val prenait au moins 80% de c'que j'gagnais. Mais c'est p'tête parce que vous étiez riches que j'ai fait c'que j'ai fait.
Val vous avait présenté comme étant ses associés, juste de simples associés. Il m'avait dit que vous saviez ce qu'était son job, mais que vous n'étiez pas au courant des détails. Et ces détails, c'était tout ce qu'il faisait de mauvais. Forcer ses employés, les violer, les frapper. Vous ne deviez pas être courant. C'était la condition pour que j'puisse un jour revoir de nouvelles personnes. J'devais pas vous mettre au courant. Alors j'ai essayé. J'suis arrivé dans la pièce, et j'vous ai vu. Et j'ai vraiment essayé. Mais j'ai pas pu retenir mes larmes. J'ai pas pu m'retenir de pleurer toutes les larmes que mon corps pouvait créer. J'en oubliais Val qui était derrière moi, j'me suis avancé vers vous, et j'me suis mis à genoux. J'vous ai attrapé les jambes, et j'vous ai supplié. J'vous ai dit ce que Val me faisait, ce qu'il me faisait faire, ce que j'étais devenu à cause de lui. J'ai hurlé à l'aide, j'vous ai supplié pour que vous me sortiez de cet enfer. J'vous ai regardé dans les yeux alors que j'voyais flou. Votre réponse, ç'a été de me rire à la gueule. Vous vous êtes complètement moqué de moi. Pourquoi ? Parce que je pleurais ? Parce que j'étais à genoux ? Parce que je demandais votre aide, en espérant réellement que vous le ferez ? Ou alors, parce que je m'étais complètement fait avoir par les mensonges de Valentino ? Parce qu'il m'avait dit que vous saviez pas, que vous deviez pas savoir. Et je l'avais cru. 

Six reasons why || Hazbin HôtelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant