Sur le tarmac de New York, George nous attend adossé à la voiture. Lorsque j'atteins son niveau, je le serre dans mes bras. Il a l'air surpris de mon étreinte mais heureux de nous retrouver après Thanksgiving et notre petit voyage à Green Bay. « C'est un plaisir de vous retrouver, Mademoiselle Hilton. J'espère que vous avez passé de jolies fêtes », me dit-il alors que nous rentrons dans la voiture. « C'était parfait, George. Il ne manquait que vous ! La conduite d'Elliott est beaucoup moins agréable que la vôtre ! » je plaisante alors que l'homme à côté de moi fait mine d'être vexé. Avant que George ne ferme la vitre entre lui et nous, Elliott demande à passer au bureau car nous avons reçu des nuanciers ainsi que des échantillons. Il est tard mais nous avons accès à nos bureaux quand nous voulons.
Le trajet de l'aéroport au bureau dure une quarantaine de minutes si tout est fluide, ce qui est assez rare à New York. Au bout de quelques minutes de route, Elliott me fixe l'air pensif. « Pourquoi tu me regardes comme ça ? » je demande, interloquée par cet air sur son visage. « Aujourd'hui, tu m'as demandé si t'allais croiser toutes mes conquêtes, du coup, j'étais en train de m'interroger sur ta vie amoureuse », lâche-t-il naturellement. Il n'y a rien de bien croustillant à raconter, j'ai même un peu honte comparé à lui. « Adolescente, je n'avais pas le droit d'avoir de petit ami. Ma mère me l'interdisait, elle disait que ça me déconcentrerait de l'école. Et pendant les études supérieures, je travaillais énormément, je n'avais pas beaucoup d'occasions », je confie un peu honteuse.
Ses yeux s'écarquillent et il n'a pas l'air de croire un traître mot de ce que je viens de lui affirmer, et pourtant c'est la vérité. « Avant que tu ne t'inquiètes, j'ai déjà eu des petites amourettes et des aventures. Je ne suis pas une sainte. Je n'ai juste jamais eu de petit ami à proprement parler », je conclus, espérant qu'on change de sujet, mais bien évidemment, ce n'est jamais le cas avec Elliott Grayson. « T'en fais pas, je me doutais que t'étais pas une sainte », à la seconde où ses mots quittent sa bouche, mes joues chauffent instantanément. Il sait comment me mettre mal à l'aise, c'est plus fort que lui, il veut me déstabiliser.
Quelques secondes plus tard, voyant que je n'élaborerai pas plus, il reprend : « Cela dit, moi non plus, je n'ai jamais eu de copine. J'étais pas fan des relations sérieuses avant. » Pour une fois, c'est moi qui me faufile dans la brèche qu'il a ouverte et j'ai bien envie de le mettre mal à l'aise à son tour. « Avant ? Et qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ? » je demande rapidement avant de perdre mon élan de courage. Un petit sourire se niche au coin de ses lèvres et je regrette instantanément d'avoir posé cette fichue question. « Ah, Alena... » soupire-t-il en penchant sa tête en arrière. « Tu vas pas me faire croire que tu ne sais pas », termine-t-il en me prenant la main délicatement.
Maintenant que nous avons quitté Green Bay, c'est le champ des possibles. Que va-t-il se passer ? Quand est-ce que l'un de nous va craquer en brisant cette dernière barrière entre nous ? Je ne sais même pas où il va dormir ce soir. Est-ce que nous allons redevenir colocataires ? Et surtout, est-ce que ce n'est pas inapproprié d'avoir ce genre de relation avec son collègue, qui plus est avec le protégé de son père ? Je ne veux pas prendre le risque de le décevoir à nouveau après tous nos efforts pour renouer les liens. C'est à cause de tout ça que délicatement, je retire ma main de la sienne, faisant mine de pianoter sur mon téléphone tout en ignorant son regard cherchant le mien.
VOUS LISEZ
Sketches for Two
RomanceDans l'effervescence de New York, Alena, une jeune architecte fraîchement diplômée, entame un nouveau chapitre de sa vie. Entre ses racines franco-américaines, une famille en morceaux et le poids de l'héritage de son grand-père, directeur d'une pres...