01 | Valia.

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"𝑨𝒑𝒓𝒆̀𝒔 𝒂𝒗𝒐𝒊𝒓 𝒄𝒐𝒏𝒕𝒆𝒎𝒑𝒍𝒆́ 𝒍𝒂 𝒍𝒖𝒏𝒆, 𝒎𝒐𝒏 𝒐𝒎𝒃𝒓𝒆 𝒎𝒆 𝒓𝒂𝒄𝒄𝒐𝒎𝒑𝒂𝒈𝒏𝒆"
𝒀𝒂𝒎𝒂𝒈𝒖𝒄𝒉𝒊 𝑺𝒐𝒅𝒐̂



𝑽𝑨𝑳𝑰𝑨

6 mois plus tard, septembre 2024
Tokyo, arrondissement de Shibuya

La pluie cogne continuellement contre la vitre du bus, son fracas me berçant comme une comptine.

Mon casque audio enfoncé sur mes oreilles, je laisse les notes de Something In The Way m'envelopper dans une bulle hypnotique, le regard rivé sur ces gens aux parapluies trempés qui courent sur les trottoirs glissants.

Le bus freine brusquement à un feu rouge et me projette en avant sur le siège face au mien. Je reprends ma position initiale en soupirant et relance les premières secondes de la chanson. Je déteste quand on me coupe au beau milieu de ma musique.

Malheureusement, je n'ai pas le temps de l'écouter jusqu'au bout car le chauffeur bondit hors de sa cabine en agitant les bras avec fureur. Je retire mon casque afin de l'entendre crier des mots dans une langue que je ne comprends pas.

Il se penche en grommelant, attrape une masse blanche qui remue sur le sol et la balance sur mes genoux avant de me jeter dehors. Il se dépêche de refermer sa porte et démarre sans attendre que le feu ne repasse au vert.

Ce n'est pas comme ça que j'avais imaginé ma première soirée à Tokyo. Me retrouver sous la pluie battante et transpercée par le vent glacial d'automne.

Je traîne ma valise et mon skateboard jusqu'à l'intérieur d'une supérette encore ouverte ; c'est là que je me rends compte que la faim me brûle l'estomac depuis plusieurs heures.

J'ouvre mon sac à dos trop lourd à la recherche d'un peu de monnaie, mais je n'ai qu'un billet de mille yens. Pas de quoi acheter un vrai repas.

Je me résigne à sortir du magasin lorsque je sens quelque chose me mordre la peau. J'ouvre mon épaisse veste en jersey achetée près de l'aéroport afin de laisser sortir une petite tête blanche à l'air libre.

— Je te ferais dire que c'est à cause de toi qu'on est là, Sukie, murmurai-je. Je t'avais demandé de te tenir tranquille.

Mon hermine blanche grogne et me mord une nouvelle fois par-dessus mon t-shirt.

— Je sais que tu as faim mais tu n'auras rien. Si tu n'avais pas décidé de t'enfuir, le chauffeur ne t'aurait pas trouvée et on ne serait pas ici à se les geler.

Sukie couine contre ma poitrine puis finit par abandonner. Si je n'avais pas dépensé la quasi-totalité de mon argent dans cette vieille veste, j'aurais pu la nourrir un peu. Et moi aussi par la même occasion.

Je rabats ma capuche sur ma tête, prends une grande inspiration et remets un pied sous la pluie.

L'heure sur mon téléphone indique vingt-et-une heure douze, cela fait plus de deux heures que j'ai quitté l'avion. Et quarante-huit heures que j'ai quitté mon ancienne vie.

Je range mon appareil dans ma poche avant qu'il ne prenne l'eau, puis cherche du regard un endroit où m'abriter le temps de trouver un nouveau moyen de transport.

Je m'avance vers un arrêt de bus à quelques dizaines de mètres de la supérette, dont l'écran lumineux affiche les horaires des prochains passages.

NIGHTBREAKEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant