Chapitre n°1 : Contrat de survie

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Luxe... Une notion bien étrangère aux yeux de la jolie Irénia Bellegarde. La jeune fille aux cheveux de feu avait apprit que ce mot dénonçait un mode de vie consistant à pratiquer des dépenses somptuaires et superflues, dans le but de s'entourer d'un raffinement fastueux ou par pur goût de l'ostentation, mais elle ne pouvait comprendre. Pourquoi faire une telle chose ? Pourquoi s'extasier devant une Ferrari ou une Rolex ? Pourquoi s'embêter à porter du Dior ou du Louis Vuitton en craignant de tâcher ces vêtements si coûteux ? Pourquoi préférer se complaire dans cette opulence tout en regardant avec mépris des personnes qui ne pouvaient se permettre ne serait-ce que d'envisager de payer son essence et de manger à midi ? Non... La vie était d'une telle injustice qu'elle pouvait être effrayante. Irénia Bellegarde n'avait jamais eu l'occasion d'imaginer une vie où elle aurait pu bénéficier de ce privilège.

Ses parents s'étaient toujours battus pour subvenir à leurs besoins. Propriétaires d'un petit restaurant, joindre les deux bouts leur avait toujours demandé un effort surhumain pourtant, ils avaient tout fait pour rendre leurs enfants heureux. Même si Irénia avait grandi dans des vêtements usés qu'ils avaient sûrement trouvés dans une décharge à défaut de pouvoir lui en offrir de nouveaux, face à ses centimètres gagnés chaque années, elle avait vu le temps que sa mère avait passé a recoudre chaque trou, ou chaque bouton perdu, alors la rouquine ne s'en était jamais plainte. À quel point aurait-elle été plus heureuse de recevoir des vêtements neufs ? Irénia ne l'aurait pas été, car cela aurait fait souffrir ses parents de nouveaux maux. Alors, même si elle était au courant de leurs difficultés financières, elle avait agi comme si elle l'ignorait, tout comme ils le souhaitaient.

Parfois, l'injustice de ce monde brûlait son cœur aussi usé que ses chaussures. Irénia Bellegarde couvrait souvent ses yeux d'un vert eau, refusant de baisser sa main de peur de voir la souffrance visible dans son foyer. Mais il n'y avait pas de place pour les faibles ou les regrets dans ce monde. Alors, le cœur sur le sol, Irénia s'était toujours relevée et avait souri à ses parents qui paraissaient bien plus âgés que leur âge réel, déjà éculé par la vie. Elle avait fini par s'habituer au regard des gens. Des regards de pitié, des regards de dégoût, des regards méfiants. « Saleté de clocharde » devait être leur insulte favorite bien que la jeune fille n'ait jamais fait la manche.

Travailler ? Oh ça, Irénia Bellegarde pouvait certifier avoir déjà testé pas mal de métier. Au collège, elle avait commencé par livrer les journaux et le lait, puis l'été, elle aidait aux fermes. Au lycée, elle avait continué ses livraisons, et avait travaillé dans une supérette le week-end et les vacances. Puis, une fois son certificat obtenu, Irénia avait pu travailler plus intensément sans les heures de cours. Alors, désormais, la rouquine cumulait trois emplois, travaillant de neuf heures à seize heures dans une clinique vétérinaire en tant qu'assistante. Puis elle rentrait dormir avant de prendre son poste de barmaid à dix-neuf heures, poste qu'elle tenait jusqu'à une heure moins le quart avant de troquer son tablier blanc contre ses accessoires et de monter danser sur l'estrade jusqu'à la fermeture, soit six heures du matin. Elle rentrait ensuite, épuisée, aider ses deux petits frères et sa petite sœur à se préparer pour l'école avant de s'effondrer sur son lit jusqu'à la prise de son poste. Irénia Bellegarde travaillait donc dix-huit heures sur vingt-quatre, six jours sur sept, dormant et mangeant dès qu'elle avait un creux dans son planning surchargé. Le week-end, elle avait plus de temps pour se reposer, même si elle faisait son possible pour aider ses parents avec le restaurant.

Bien sûr, Irénia Bellegarde était épuisée, mais que pouvait-elle y faire ? Ce n'était pas en priant que l'argent allait tomber du ciel ! Alors, elle se battait pour survivre et aidait sa famille du mieux qu'elle le pouvait. La jolie rouquine espérait que sa fraternité n'ait pas à se soucier de l'argent, qu'ils puissent manger à leur faim, acheter des vêtements neufs et elle avait le rêve fou que, eux au moins, ils puissent faire des études. Car l'une des choses qu'Irénia Bellegarde avait le plus regretté dans son adolescence était d'avoir dû refuser d'aller dans l'école qui lui proposait le métier de ses rêves malgré la bourse. Elle n'aurait payé qu'une partie du prix de l'inscription et n'aurait, ni logé, ni nourri sa famille. Alors, à contrecœur, Irénia Bellegarde avait poliment refusé leur offre généreuse.

The Survival ContractOù les histoires vivent. Découvrez maintenant