Le Royaume d'Atales

CHAPITRE 6

J’ouvre difficilement les yeux. Je suis allongée sur le lit de l’infirmerie et j’ai un tissu froid qui m’entoure la tête. Je me tourne et aperçois Julian sur le lit d’à côté. Il a des pansements partout et une attelle autour de la cheville gauche mais au moins, il n’a plus son oeil au beurre noir. Une infirmière concentrée projette une aura bleue au dessus de lui. Lorsque qu’elle remarque que je suis réveillée, elle me rassure :

- Ne vous inquiétez pas, vous n’avez rien de grave. J’ai déjà ressoudé votre côte et le choc que vous avez reçu sur la tête va passer d’ici 20 minutes. Votre ami sera guéri d’ici demain. Sa jambe a juste besoin de repos et j’ai déjà pu soigner ses égratignures. Il n’a presque plus rien.

Je suis encore dans les vapes et je ne lui répond pas. Un mal de tête me vrille encore le crâne et j’ai envie de rentrer chez moi. Je me lève et demande à l’infirmière de prévenir Julian que je suis rentrée lorsqu’il se réveillera. Je jette un dernier coup d’oeil à mon ami endormi avant de sortir. Après avoir refermé la porte, je remarque qu’il est assez tard. Il n’y a plus aucun élève dans les couloirs et il fait nuit. Je me dirige vers la sortie, perdue dans mes pensées. J’aurais dû être plus rapide. J’aurais dû frapper plus fort. J’aurais dû remarquer la feinte de Priam. Je ne referais pas la même erreur la prochaine fois. 

Encore à moitié endormie, je remarque trop tard que je fonce dans quelqu’un. Je murmure un « désolée… » avant de relever les yeux et de réaliser que la personne que je viens de percuter est Celyan. Je me demande ce qu’il fabrique encore si tard au lycée. Il me dévisage d’un air faussement inquiet sans rien dire. Je le foudroie du regard avant de continuer ma route. Ça ne sert à rien de commencer à m’énerver avec lui maintenant. D’ailleurs, je n’en ai pas la force. Il est assez amusé par la situation et semble sur le point de me dire quelque chose, mais s’interrompt tout net. Je comprends en suivant son regard : le roi d’Atalès, Eric de Silverios, se tient devant moi. Après une seconde d’étonnement, je m’incline profondément. 

« Votre Majesté. »

Il avance vers nous, me salue et entraîne son frère dans une salle. Ce dernier me lance un dernier regard avant de suivre son aîné. Ok, ce n’est pas bien d’écouter aux portes, mais j’aimerais quand même bien savoir pourquoi le roi est ici et pourquoi Celyan était encore là ce soir. 

Je sors, contourne le bâtiment et me poste sous la fenêtre de la salle. Je ne distingue que des bribes de conversations mais l’ambiance semble assez tendue. 

«  Tu… pas le choix.. » déclare le roi.

« Débrouille toi… seul… pas envie. » répond Celyan.

« … pas… solutions… annonce …demain » ajoute le souverain.

« Tu… fou… personne… y aller » proteste le prince.

« … tard. » finit Eric.

Ils sortent de la salle et je n’entend plus rien. Je n’ai pas tout compris mais je suis tellement fatiguée que je ne cherche pas à en apprendre plus.

Lorsque j’arrive chez moi, mon père ne me demande pas où j’étais. Il lève les yeux de son livre une fraction de seconde et se replonge dedans. Aline, ma belle-mère, se précipite vers moi pour savoir si je vais bien. Je la rassure et lui souhaite une bonne nuit. Elle me demande de monter dire bonsoir à Iris, ma petite soeur de 8 ans (enfin demi-soeur, puisque c’est la fille de mon père et d’Aline) car elle était très inquiète pour moi. Iris et moi sommes très proches. Je sais comme la vie peut être dure à Atalès, alors j’ai naturellement toujours veillé sur elle. En montant, je croise Oriana, mon autre demi-soeur d’un an de moins que moi, qui monte aussi se coucher.

« Tu vas bien ? » me demande-t-elle.

Je déteste ma voix toute faible lorsque je lui répond.

« Oui oui, ne t’inquiète pas, je suis juste un peu fatiguée ».

Elle n’insiste pas et me dit à demain. Oriana et moi sommes en bons termes, mais sans plus. Elle a un fort caractère et peut être vraiment désagréable parfois. Je passe embrasser Iris qui dort à poings fermés puis je me dirige tout de suite vers ma chambre. Je m’étale sur mon lit et sombre toute habillée dans un sommeil sans rêves.