𝖢𝖧𝖠𝖯𝖨𝖳𝖱𝖤 𝖳𝖱𝖤𝖭𝖳𝖤-𝖭𝖤𝖴𝖥

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𝗗𝗘𝗔𝗧𝗛

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𝗗𝗘𝗔𝗧𝗛


Ce matin, on a vidé la chambre de Queen. Pendant plusieurs jours, la Chef a évoqué ce sujet avec moi, mais je n'ai rien voulu entendre.

C'était hors de question de toucher à ses affaires. Je ne voulais pas les voir disparaître. Je ne voulais pas que l'on efface les derniers souvenirs matériels que je pouvais avoir d'elle. Mais mon rang m'a vite rattrapé. Bien que le Chef ait été tolérant avec moi, je ne suis qu'un lieutenant et j'obéis à ses ordres.

Alors quand j'ai été forcé d'abandonner sa pièce pour qu'on la vide, je n'ai pas pu m'empêcher de virer les soldats venus pour faire le boulot. J'ai pris leurs cartons pour tout faire moi-même.

C'était dur.

Parce qu'ils attendaient devant la porte et que je me devais de rester droit et fort.

Putain, si j'avais été seul, je me serais encore mis à chialer.

J'ai gardé quelques-unes de ses affaires. Un gilet à elle, celui qu'elle mettait tout le temps et qui a gardé un peu de son parfum. Une peluche abîmée que j'ai trouvée dans le tiroir de son bureau : un chien brun avec une oreille trouée et un œil en moins. Puis un bracelet en perles avec son vrai nom écrit dessus, Faith.

Et son journal.

Elle tenait un journal intime, putain. Qui l'aurait cru ? Elle qui semblait tant détachée des autres et de la vie en général.

En même temps, moi aussi.

Bien sûr, je ne l'ai pas ouvert. C'est son intimité. Malgré tout, je ne voulais pas qu'on le jette. C'est son livre. Son récit. Sa vie racontée de sa main, vue par ses yeux et relatée par ses écrits.

Je ne pouvais pas m'en séparer.

Quand je suis obligé de retourner dans mon appartement, celui-ci est froid et sans vie. Ça fait des semaines que je le déserte et il a pris un peu la poussière, mais le maniaque en moi n'a même plus l'énergie pour nettoyer.

Assis dans mon fauteuil, son gilet sur mes cuisses en guise de couverture et son bracelet à mon poignet, je n'ai plus l'impression que mon cœur bat. Pourtant, je respire encore et c'est ce qui m'éloigne tant d'elle. Moi, je suis en vie.

Mes parents ne m'ont pas répondu, aussi. Je me suis souvenu de leur ancien numéro pour les contacter mais ce n'est sans doute plus le bon, après toutes ces années. Je me suis mis en tête de les retrouver. Je ne sais pas exactement comment. Mais je le ferai quand je... quand j'aurais à nouveau la tête froide. Là, mon esprit est encore trop embrumé.

Je regarde par la fenêtre le paysage enneigé. Il fait soleil, et les rayons qui se répercutent sur la neige font presque mal aux yeux.

Parfois, je me torture l'esprit à imaginer comment serait passé le retour de la mission si l'on était revenu ensemble.

Je ne l'aurais pas lâché.

Elle serait venue dans mon appartement, ou j'aurais envahi sa chambre comme je l'ai vraiment fait. On aurait dormi ensemble. Je l'aurais embrassé. Beaucoup de fois. Elle m'aurait poussé à enlever mon masque en sa présence. Et je n'aurais pas pu refuser. Je me serais senti bien. Entier.

Je lui aurais fait à manger dans ma cuisine et elle n'aurait plus jamais eu besoin d'aller à la cafétéria. On se serait entraînés pour la dernière mission ensemble.

On y serait allé.

Elle aurait survécu.

Et après...

Et après ?

Après quoi ?

Elle ne voulait pas rester à la Base. Elle m'a même demandé de la suivre ailleurs qu'ici. Aurais-je accepté ?

J'aurais été tellement fou d'elle que, ouais, j'aurais peut-être pu me barrer. Ramper à ses pieds. Aller où elle aurait voulu m'emmener. Et cette vérité blesse.

J'étais prêt à la laisser filer, sans savoir qu'en fait, je l'aurais suivi jusqu'au bout du monde. Je me voilais la face et ce n'est que maintenant que je m'en rends compte.

Ma gorge se noue et je triture son bracelet.

Bien que je pense énormément à elle, d'autres fois, je veux juste tout oublier. Arrêter de réfléchir.

Comme maintenant.

Ça fait mal.

Son absence fait mal.

Et je connais bien trop le moyen de ne plus sentir tout ça.

Je ne voulais pas y retomber, pourtant, aucune autre solution ne s'offre à moi. Je m'étais juré de ne plus jamais boire une seule goutte d'alcool après ce qu'il s'est passé pendant l'armée. Mais... l'image de Queen est douloureuse.

Je veux juste... oublier. Juste une heure.


Je ne le comprends pas de suite, mais cette idée ne me quittera pas. Elle me hantera. A tel point que je succomberais. Que je trouverais où je peux des bouteilles d'alcool pour les boire chez moi et replonger.

Me laisser couler. 

















FIFTY NINE [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant