Santa Clarita

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Carla.

Nous pénétrons à l'intérieur par la baie vitrée du porche arrière, débouchant sur un grand hall au design épuré. Ce n'est ni chaleureux, ni glacial malgré les plafonds élevés et l'escalier en marbre. Je me sens minuscule dans cet espace si vaste et impeccable, tout est à l'opposé de mon état actuel. Je suis immédiatement soulagée en constatant qu'il n'y a personne d'autre. Eux. Mes battements de cœur se calment quelque peu.

Le temps d'aller d'un bout à l'autre du hall, je peux me familiariser avec les lieux, je balaye mon regard sur les œuvres d'art au mur, dont une qui retient mon intention, une femme aux yeux bandés, tenant une balance à bout de bras. Ce tableau fait écho au discours que tenait l'homme tout à l'heure, car je savais que cet objet était le symbole de la justice :'' Des peines juridiques, parfois justes, parfois moins justes ''. Le tableau est très grand, bien plus que tous les autres, il doit avoir une signification particulière, presque religieuse.

— Tu resteras ici un moment. Je dois réfléchir à ton sort. Sois reconnaissante d'être arrivée à Santa Clarita, d'autres clans ne t'auraient jamais laissé le bénéfice du doute.

Je connais de nom cette ville. C'était à moins de 2 h de Santa Barbara, de mon appartement, de ma boutique. . . Est-ce qu'un jour, je vais retrouver mon quotidien ? C'est compromis ...

Je me retourne vers lui et me risque à lui demander :

— Pourquoi vous ne me relâchez pas alors ? Je vous ai dit que je n'étais pas mêlée à la mort de mon demi-frère. Donc vous ne me croyez pas ?

Un rire narquois s'échappe de ses lèvres fines.

— Non. D'ailleurs, personne ne te croit. Tu as juste permis un léger doute aux yeux d'Andréas. Pas aux miens ni à ceux des autres. Je pensais que tu étais assez intelligente pour comprendre l'enjeu de la situation, mais apparemment non. Je vais donc te le rappeler : tu es censée être morte et nous avons trahi un client. Donc si quelqu'un s'aperçoit que nous n'avons pas honoré un simple contrat. Aussi facile soit-il. Nous perdrons beaucoup. Vraiment beaucoup.

''Qu'un simple contrat ...''. ''Aussi facile soit-il ...''

— Stop les questions, m'arrête-t-il lorsque j'ouvre la bouche pour répliquer. Tu n'es pas en mesure de donner ton avis.

Il fait demi-tour pour prendre les escaliers sans dire un mot de plus. Comme s'il m'ordonne silencieusement de le suivre, ce que je fais.

L'étage est spacieux lui aussi et je note les nombreuses portes.

Ils sont combien ici ? Est ce que toutes ces chambres sont occupées ?

Nous nous arrêtons au niveau de l'une d'elles et il me dit :

— Prends une douche. Il y a des vêtements propres.

Il me toise une dernière fois de haut en bas en secouant la tête. Son exaspération est palpable. Une chose est certaine, ma présence le dérange profondément.

Quand j'entre dans la salle de bain, c'est la même atmosphère que le reste de la maison. Tout est en marbre et il y a une baignoire aux détails dorés au centre. Je suis perplexe. Il y a quelques instants, j'étais dans une cabane délabrée avec une bouteille d'urine à côté, et maintenant, je suis dans une salle de bain de luxe. Mais une chose est commune : l'endroit a l'air inoccupé. L'homme ferme la porte derrière moi et je l'entends verrouiller, me rappelant que je ne suis pas dans un bel hôtel en vacances, mais bien retenue par un groupe criminel.

Des meurtriers. Des ordures.

Quand je me regarde dans le miroir, je prends conscience de mon apparence négligée. Je n'ai jamais réussi à être à l'aise avec mon apparence et je me considère tellement banale. Mon maquillage s'est étalé partout, me faisant ressembler à un panda dépenaillé, et je suis terne et poussiéreuse avec des cernes mornes qui montrent à quel point je suis fatiguée. J'espère que cette pause me permettra de retrouver un peu de dignité.

Gazelle - Tome 1 -  [ Dark Romance ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant