«Une salopette. C'est ça que tu devrais porter. Tu es si jolie avec!» m'avait répondu mémé.
Nous étions déjà mercredi soir. D'habitude, on ne sort pas en semaine. Mais demain est un jour férié pour nous, cela fera 100ans que notre ville a été édifiée. Le maire prévoit une parade à laquelle on n'assistera surement pas. C'est pas le genre de la maison. Je me courbai dans tous les sens devant le miroir. Je n'étais pas certaine de ma tenue. Je ressemblais bien plus à une plombière ou une garagiste qu'à quoique ce soit d'autre. Il fallait se rendre à l'évidence, grand-mère ne m'avait pas été d'une grande aide vestimentairement parlant.
- Mon Dieu quelle horreur. Tu vas pas mettre ça?
Mick venait de rentrer dans la pièce. Il avait l'air horrifié. Évidemment lui et ses coups de théâtre, il en fait toujours trop. À cet instant, Keith aussi a fait son apparition.Ils allaient aussi sortir ce soir, dans un bar me semble-t-il.
- Pour une fois, j'suis d'son avis. C'est ignoble.
Merci les mecs je suppose? Pendant qu'ils cherchaient autre chose dans mon placard, je me maquillais. J'ai foncé mes yeux et souligné discrètement ma bouche. Mes cheveux ne ressemblaient pas à grand chose, je les avais bouclé un peu mais je ne supporte pas les avoir lâché. Pour danser, ce n'est pas pratique, ça donne vite chaud. J'ai donc créé une sorte de chignon crêpé effet coiffé/décoiffé. Un vrai projet! On avait dégotté une robe bustier noir. Je n'aimais pas mes épaules carrées, mais les frangins me traitaient d'aveugle et de gosse jamais satisfaite!
- Ronnie, t'es grave cool dans cette tenue. rétorquait Keith.
- Un air d'Elvira dans Scarface même. Style femme fatale. continua Mick
J'ai souri de toutes mes dents. C'est le plus beau compliment qu'on puisse espérer non? J'veux dire, cette femme-là, c'est le fantasme de tous les hommes. Même le mien.
- Mon Dieu ce que tu es belle! Je ne ferai de toi qu'une bouchée.
C'était Elen qui venait de crier. Je lui avais dit de venir me chercher à la maison directement, que ce serait plus simple qu'on y aille ensemble. Elle s'est approché des garçons pour les embrasser. Je savais qu'elle avait un faible pour Mick. Depuis le jour où elle l'a rencontré, elle ne fait que de le complimenter.
- Il est sympa ton blouson Mick. Tu l'as chopé où?
Vous voyez. Qu'est ce que je vous disais? Elle était belle. Elle l'a toujours été. C'était l'adolescente phare. Cheerleader, déléguée de classe, présidente du conseil des élèves et du club d'échec. Elle participait au spectacle de la chorale, à toutes les oeuvres caritatives, faisait des brownis chaque vendredi pour sa classe. Elle savait être sage. Et le soir, elle s'amusait. Elle a toujours eu tous les garçons à ses pieds.
- Eh oh la terre? Ici la lune? Vous me recevez?
- Oh pardon Keith. Qu'est ce que tu disais? ai-je dis confuse.
- Je disais qu'il était l'heure d'y aller p'tit ange.
Oui. Il était 21h. Mick et Elen descendaient déjà l'escalier tout en se racontant leurs dernières aventures. J'en ai profité pour attraper mon malade.
J'ai chuchoté: - « Tu feras bien attention hein. Pas de bêtises. Ne prends pas de risques.»
Tout en embrassant mon front, à son tour, il m'a dit dans l'oreille: -«Qui est le grand-frère entre nous deux?»
Il avait raison. Mais je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter. J'avais passé la journée à ruminer tout ça. J'ai acheté des revues, les dernières analyses sur le VIH venaient tout droit du Canada. De nombreuses femmes témoignaient de leurs expériences. J'avais montré tout ça à mon père. Pour lui prouver que ce n'était pas qu'une simple maladie de «pd» comme il aime si bien dire. Mais rien n'y fait. Les vieux et leurs idées à la con.
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1986, la proie.
RomanceEn 1986, Ronnie n'a que seize ans. C'est une enfant qui se donne des aires de femme. Qui parle fort, qui pleure, qui se soucis de son apparence, et un peu moins de son intellect. Elle est pleine de bonté et ne s'en doute même pas. Ronnie ressemble...