EVERY LITTLE THING (helenie)

CHAPITRE 10 - Mon cœur pour apaiser le tien

Lenie avait l'impression d'avoir atterri dans une boucle temporelle dans laquelle la fin de l'histoire était toujours foutrement douloureuse pour son cœur. Elle en avait assez d'avoir de la peine sans trop savoir comment elle en était arrivée là en premier lieu. Ça la rendait folle au point de lui donner un besoin critique d'extérioriser toute cette agitation intérieure.

En temps normal, elle se serait époumoner en criant car elle connaissait l'effet libérateur et thérapeutique que cette technique pouvait avoir face à un trop plein d'émotions contradictoires.

Mais au sein du château, elle ne pouvait hélas pas se permettre de pratiquer cette méthode.

Néanmoins, déterminée à se défouler, la brune metta le cap sur la salle de danse. Une fois là-bas et la musique en marche, elle se mit à bouger jusqu'à en perdre la notion du temps. Prise de frénésie, elle ne s'arrêta qu'à l'instant où son souffle vint à lui manquer.

Installée au sol, elle s'y allongea complètement, fixant le plafond et respirant lourdement.

Ainsi, plongée dans ses pensées, elle n'entendit pas la porte s'ouvrir et ne remarqua la présence de Djebril qu'au moment où celui-ci prit place à ses côtés, imitant sa position.

"Âme tourmentée?" demanda Djebril avec le regard compréhensif. "Tu souhaites en parler?"

Lenie inspira puis expira, ravalant les larmes qu'elle sentait venir.

"Est-ce qu'il y a quelque chose qui ne va pas chez moi?"

Djebril se redressa pour s'asseoir, genoux pliés. Lenie en fit de même.

"Alors, Lenie, il faut savoir que tu es parfaite. Littéralement."

Il lui lança un regard entendu.

"Regarde-toi," appuya-t-il en la désignant de la tête aux pieds. "Est-ce qu'il y a quelque chose qui te ferait croire que tu as un problème quelconque?"

Lenie hésita avant de finalement se confier. "Je ne sais pas trop. J'ai beau rebattre toutes les cartes dans ma tête, je ne vois pas ce que j'aurais pu faire de mal. Pourtant, c'est sans doute le cas et ça me met dans un état d'hypersensibilité constante."

Djebril prit une minute pour réfléchir aux paroles de la benjamine.

"Est-ce qu'il y a quelqu'un qui t'a fait une remarque?"

"Non!" s'empressa d'éclaircir la jeune fille. "C'est juste," balbutia Lenie en trépotant nerveusement ses doigts. "Il y a cette personne que j'apprécie beaucoup qui me donne des signaux contradictoires."

"D'accord, objectivement, si tu veux mon avis, il me faudrait en savoir plus, mais peut-être que le mieux ce serait surtout d'en parler avec la personne concernée. Si ça te touche à ce point, c'est sans doute qu'il y a quelque chose à creuser et tu ne devrais pas le laisser te consumer au point de devoir te crever le cul ici alors que le cours ne commence que dans," Djebril se coupa dans son élan pour vérifier l'heure. "15 minutes. Un peu tôt pour s'écrouler au sol, non?"

La mine déconfite, Lenie haussa les épaules. "J'avais besoin d'un exutoire immédiat."

Djebril se leva, offrant sa main à sa camarade. "Alors dansons," proposa-t-il en lui souriant généreusement.

Souriant en retour, Lenie saisie sa main, consentant implicitement à sa proposition.

▪︎▪︎▪︎

Le cours de danse était un véritable cauchemar pour Héléna.

Pour cause, elle avait d'abord été en retard à cause de nausées soudaines qui l'avait obligé à s'arrêter aux toilettes avant de rejoindre la classe.

Puis, en arrivant, elle s'était embarrassée devant les autres en trébuchant. Heureusement, elle ne s'était pas blessée, mais pour le coup, au vu des rires qu'elle avait déclenché, elle était certaine d'avoir donné de quoi alimenter le star ac mix du samedi.

Pire encore, Malika avait ensuite choisi de les faire bosser en trio. Et, de toutes les combinaisons possibles, elle s'était retrouvée avec Lola et Lenie.

Qui ne penserait pas avoir la poisse après cette suite d'événements?

La blonde en était venue à penser que peut-être tout ça n'était que punition divine pour sa lâcheté antérieur. Elle, qui dépassée par tout, avait évité la benjamine après la douche.

C'était le bazar dans sa tête, avec ses sentiments. Elle avait besoin de fuir tout ça pour faire le point mais, par constat, elle n'avait pas su le faire sans maladresse.

Elle le savait maintenant car Lenie se tenait à l'écart. Elle dansait avec Lola comme le demandait l'exercice mais Héléna était intentionnellement ignorée, toutes ses tentatives pour capter l'attention de Lenie terminant par un bide total.

Un rien, comme si la belge n'était que l'ombre d'elle-même.

Héléna avait du pencher la tête en arrière à plusieurs reprises pour éviter la pluie.

Elle récoltait ce qu'elle avait semé, mais ça faisait toujours un mal de chien.

Lenie était blessée ou en colère ou les deux et elle était la seule à blâmer.

Quoi qu'il en soit, il lui fallait trouver une solution au plus vite où elle finirait la soirée entre son anxiété nauséeuse et son cœur sanglotant.

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Héléna avait passé le reste du cours prise entre son envie d'étriper Lola (dont elle était viscéralement jalouse) et son envie de vomir à cause de l'inquiétude qui l'habitait depuis tantôt.

Elle avait fini par concocter un plan bancal pour pouvoir arranger les choses avec la benjamine.

Aussi, quand la sonnerie annonçant la fin du cours retentit et que les élèves commencèrent un à un à quitter la salle, Héléna profita de la solitude soudaine de Lenie pour suivre ses mouvements. Une fois la porte franchit, elle enlaça sa main dans la sienne et l'entraîna vers le théâtre sous le regard interloqué de cette dernière.

Enfin en tête à tête, Héléna libéra la main de la brune qui croisa à brûle-pourpoint les bras, prête à vociférer toute la rage amarescente qui lui crevait le cœur.

Cependant, avant qu'elle ne puisse s'agiter, Héléna s'empressa de désamorcer la bombe.

"J'ai essayé de te repousser," commença-t-elle par avouer le ton plein de regrets, "mais rien ne m'a jamais fait me sentir aussi mal."

Quelque chose changea dans le regard de Lenie, un quelque chose qui invita silencieusement Héléna à poursuivre son propos.

"Je suis désolée, c'est peu dire. Saches juste que je n'ai jamais voulu que tu te sentes rejetée ou toute autre chose. Je sais que je t'ai laissé tomber mais je promets, je ne ferai plus jamais cette erreur."

Elle fit un pas pour être au plus prêt de la fille en face d'elle. "S'il te plaît, pardonne-moi?"

Lenie se mordillait sa lèvre, se frottant le bras nerveusement. "Pourquoi?"

Héléna soupira avant de contourner Lenie pour aller s'asseoir sur les marches de la scène. Elle donna sa vérité dans un demi-mensonge.

"Je ne sais pas vraiment. J'ai juste été écrasé par mes émotions et je ne savais pas comment les gérer. Je suppose que je ne voulais pas t'inquiéter alors je me suis éloignée."

Lenie alla la rejoindre. Une fois à ses côtés, elle surprit Héléna en la prenant dans ses bras. Une fois l'étonnement passé, la belge resserra l'étreinte, enfouissant sa tête dans le cou de la brune.

"Si tu as besoin de moi, c'est normal que je sois là pour toi," murmura Lenie sans perdre le contact avec la blonde.

"Je suis désolée," répéta Héléna, l'émotion évidente dans la voix.

"Je crois que j'ai pris ça très à cœur. Mais tu es déjà pardonnée," rassura la ciotadenne en s'éloignant mais gardant le lien dans l'intensité de leurs regards partagés et leurs mains enlacées.

Portée par la tendresse du moment, Héléna approcha les mains de Lenie jusqu'à son visage pour y déposer un baiser. "Voilà mon cœur pour apaiser le tien."