EVERY LITTLE THING (helenie)

CHAPITRE 25 - Tu m'as manqué

Le coin sapinage était l'un des endroits qu'Héléna aimait le plus fréquenter au château. Vous pourriez naturellement penser qu'elle apprécie cet endroit pour l'utilité de la chose, mais elle appréciait surtout s'y rendre car il n'y avait pas de caméras pour scruter le moindre de ses mouvements.

Et à l'instant, alors qu'elle avait le cœur troublé et l'esprit en ébullition, elle était vraiment reconnaissante de pouvoir y échapper.

"Tu as l'air complètement ailleurs," l'interpella Pierre. Il pouvait dire que la blonde n'était pas dans son état normal. "Tu as du mal avec le départ de Marie-Maud?"

"Non," répondit immédiatement la belge avant de prendre conscience des paroles du jeune homme. "Enfin, oui, mais ce n'est pas à ça que je pensais," s'expliqua-t-elle alors.

"Tu vas bien?"

Héléna croisa son regard et savait qu'il lui était inutile de mentir, Pierre l'avait visiblement cramé. "Pas vraiment."

À la seconde où Héléna confirma ses craintes, Pierre se débarrassa de son mégot et s'avança immédiatement pour la serrer dans ses bras.

"Merci," chuchota cette dernière en se laissant attendrir par l'étreinte.

Après un bref instant de plus, le garçon fit un pas en arrière. En apercevant une larme au coin de l'œil de son amie, il porta sa main à sa joue pour la lui retirer de son pouce. "Est-ce que ça a un rapport avec la théorie d'MM?"

Héléna fronça les sourcils. "Quelle théorie?"

Pierre s'éloigna complètement, chacun retrouvant son espace personnel.

"Quelque chose à propos de toi ayant des sentiments pour-"

"Elle t'en a parlé?" l'interrompit la blonde.

"En réalité, non. Ce sont les autres ce matin."

Héléna ferma les yeux quelques secondes, prenant en compte l'information.

"Je-" commença Pierre avant d'être à nouveau interrompu.

"Écoutes, je ne sais pas ce qui se dit sur moi et je ne pense pas vouloir le savoir mais ce que je ressens ou non ne regarde absolument personne d'autre que moi."

Pierre acquiesça, il pouvait respecter ça. "Je comprends. Juste, saches que quoique tu ressentes- ou pas, je suis là pour toi."

Héléna le scruta longtemps, le regard empreint de doutes. Finalement, elle dû trouver ce qu'elle cherchait car elle finit par baisser sa garde.

"Ça me fait peur."

"La réaction des gens?"

"Non, ça je m'en cogne."

Pierre sourit face au commentaire. "Cool. Alors...?"

"J'ai peur de ce que je ressens. C'est un peu le bordel là-dedans et je ne sais pas comment mettre en ordre ce que j'ai sur le cœur," avoua Héléna la voix tremblante. "Il s'emballe, il s'emiette... les signaux se contredisent et j'angoisse à l'idée de tout gâcher."

Pierre allait répondre mais fut couper dans son élan par l'arrivée de Julien et Victorien.

"Fais-toi confiance," ajouta-t-il discrètement avant de laisser la conversation changer du tout au tout.

▪︎▪︎▪︎

Le début d'après-midi était vite arrivé pour les académiciens. Comme Lenie s'y était attendue, Héléna ne l'avait pas rejoint pour le petit déjeuner. Encore en cuisine entrain de manger une banane, elle l'avait entendu rentrer avec Pierre. Puis, la blonde avait disparu pour le reste de la matinée. Enfin, elle avait surtout évité Lenie. Ça, la brune en était presque convaincue car chaque fois qu'elle entrait dans une pièce où l'autre fille se trouvait, Héléna avait toujours un prétexte pour s'éclipser.

Elle recommençait à la fuir et cette fois Lenie savait pourquoi ou du moins, elle avait sa propre idée sur la question.

Lorsque vint l'heure du debrief, Lenie tenta une nouvelle fois sa chance et s'installa volontairement à côté d'Héléna qui, en l'attente de Cécile et Slimane, discutait avec Pierre et Victorien. La blonde ne lui adressa aucun signe particulier qui aurait pu montrer qu'elle avait senti sa présence derrière elle.

Pour en avoir le cœur net, Lenie prit son courage à deux mains et sous l'œil attentif de Pierre se pencha à l'oreille de la blonde. "Tu m'as manqué ce matin."

Surprise par la voix soudaine, Héléna se crispa. Puis, elle réalisa qu'il ne s'agissait que de Lenie et relâcha la tension qui s'était instinctivement glissée en elle. Afin de lui répondre, elle tourna ensuite la tête vers elle pour lui déposer un bref baiser sur sa joue. La benjamine se sentit immédiatement soulager par le geste d'affection.

Est-ce qu'elle avait elle-même créé cette distance en s'imaginant des choses qui n'existaient que dans sa tête ?

Lenie avait longuement pleuré dans les bras de Candice après le départ d'Héléna ce matin. Finalement, elle avait justifié sa crise de larmes par un manque de sa famille. C'était certes un mensonge, mais il y avait toujours une part de vérité dans cela. Sa famille lui manquait toujours, même si ce matin, elle avait craqué sous l'effet d'une toute autre prise de conscience.

Cette déclaration à Héléna l'avait prise aux tripes. Ça avait commencé par de simples taquineries entre elle et la blonde et puis avant qu'elle ne s'en rende compte, Lenie avait perdu la partie. Plongée dans le regard de l'autre fille, son cœur avait parlé pour elle. Aucune parole n'était préméditée à l'avance mais chaque mot, aussi lourd de sens soit-il, était pleinement réel et ressenti par la brune. Puis leur petite bulle a éclaté et Lenie a paniqué, revenant à son armure de défense, faisant comme si son petit discours ne lui avait pas donné des palpitations et une peur immense de ce qui allait suivre alors qu'elle réalisait ses sentiments.

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À la fin du debrief, Cécile donna ses encouragements à Héléna pour mettre à l'honneur sa progression. Dans un élan de fierté, Lenie en profita pour à son tour lui embrasser la joue. Héléna était rayonnante et pleine de reconnaissance. Après cette semaine difficile et le départ de Marie-Maud, cette attention à son égard lui donnait une nouvelle force pour la suite et lui permettait de gagner un pas de plus dans son combat contre elle-même. Peut-être qu'elle finirait par enfin croire en elle comme les autres semblaient le faire.

"On peut parler plus tard?" se manifesta soudainement Lenie dans un murmure.

Le regard d'Héléna semblait parler pour elle car la benjamine s'empressa de clarifier sa demande.

"J'ai besoin de mettre quelque chose au clair avec toi."