6. Take my hand, save your soul

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God is a woman-Ariana Grande

Shizuka

Je n’ai pas le temps de manger, ce midi, mais qu’importe : je n’ai pas faim, l’estomac retourné par les récents événements.

Je me hisse difficilement sur mes pieds. Je suis restée si longtemps assise sur le carrelage froid que j’en ai perdu la notion du temps. Chaque mouvement est un supplice. Chancelante, je m’avance pour sortir de la cabine. J’attrape des essuie-mains en papier, et je les humidifie. L’eau glacée me fait frissonner. Le plus délicatement possible, je nettoie mon propre sang qui salit ma peau. Malgré la douleur, j'efface méticuleusement toutes traces du liquide écarlate restant sur mon épiderme.

J’ai beau serrer les dents, sans la pression liée à la présence de mes camarades de classe, une larme solitaire m'échappe. Elle roule le long de ma joue droite, avant d’aller s’écraser par terre sans un bruit.

Je suis vraiment putain de faible.

Maintenant je dois me désinfecter. Et tout ce que j’ai sous la main, c’est du savon. Ça pique, mais c’est toujours mieux que rien.

Je soupire en me faisant des bandages de fortune avec du papier toilette, j’ai l’impression de faire un cosplay de Dazai.

La sonnerie annonçant la fin de la pause va retentir d’ici peu, et même si je n’ai pas le temps de manger, je sens que prendre l’air me fera le plus grand bien.

Je remet mes vêtements bien en place, puis je prends une grande inspiration avant de me mettre en marche pour me rendre à l’extérieur du bâtiment des salles de cours. Chaque pas manque de m’arracher une grimace ou même un gémissement de douleur, mais je me force à garder un rythme régulier et je supporte sans rien laisser transparaître.

Le léger vent qui souffle m’ébouriffe les cheveux, je regarde les brins d’herbes des pelouses du lycée danser au gré de ses envies. Je suis appuyée contre un arbre, près de l’entrée. Il n’y a pas grand monde autour de moi, juste un groupe de filles de première année qui sortent et qui s’assoient sur un banc non loin de moi, et j’entend leur conversation malgré moi.

- COMMENT ÇA IL Y AVAIT DU SANG!? s’écrie une grande brune. 

- Je sais, ça paraît dingue, mais quand je suis allée aux toilettes -enfin, quand j’y suis retournée après m’être rendue compte que j’avais fait tomber ma carte de transport là-bas- j’ai vu qu’il y avait des petites taches bizarres sur le sol de la cabine. Du coup, j'ai décidé d’aller voir de plus près, et je vous assure que c’était du sang, explique une blonde qui n’a pas l’air plus impressionnée que ça.

- Tu es trop courageuse, Hisae-chan… moi à ta place je flipperai à mort, se lamente une deuxième brune, beaucoup plus petite et fluette que la première.

- C’était quels toilettes ’Sae? demande à ladite Hisae-chan la seule de leur quatuor qui n’avait pas parlé pour le moment. Ça pourrait faire une bonne histoire pour le journal du lycée! On peut dire que c’est un esprit style Hanako-san…

Je retiens ma respiration probablement depuis qu’elles ont commencé à parler. La fille blonde, c’était elle, la première année des toilettes, et elle a vu. Elle a vu le sang. Mon sang. Je n’avais même pas remarqué la trace que j’avais laissé derrière moi. J’aurais dû nettoyer.

Quelle conne.

- Oula, calme toi avec tes histoires de fantômes. Les esprits des toilettes, c’est vu et revu! Au début je me suis dit que ça pouvait être une fille qui avait eu un problème avec ses règles, mais les tâches n’avaient pas la bonne forme, elles étaient trop petites, alors…

𝕋𝕨𝕠 𝕔𝕒𝕥𝕤 {K.Kozume x OC}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant