Chapitre 11 - Steven

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Nous sommes installés sur les bancs face aux requins baleines. Les allées sont plus calmes à cette heure ci et nous pouvons profiter de leur balais magnifique. Summer nous rejoint tout sourire et me tend un sandwich.

— Merci, je marmonne.

— Tu n'es pas content de ton classement?, me demande t elle en mangeant.

Je relève la tête vers elle, surpris par sa question. 

— Si, je suis qualifié pour les régionales. 

— Donc c'est moi le problème, raille t elle.

Je soupire et cherche quoi lui répondre mais elle ne m'en laisse pas l'occasion et se lève pour rejoindre Boris qui nous appelle.

— Regarde, regarde, hurle t il en sautant devant la vitre. 

L'une des baleines vient frôler la vitre sous ses yeux ébahis. Il lui pose des milliers de questions auxquelles elle prend le temps de répondre. Je les regarde interagir aussi intrigué que ce jour dans l'ascenseur. J'ai l'habitude du regard des gens et même quand ils essaient de bien faire ils sont toujours mal à l'aise. James a mis des années avant de se comporter naturellement avec mon frère. Laurie en fera surement de même vu son comportement du weekend. Mais elle, on dirait qu'elle sait, qu'elle a toujours su, comment agir avec lui. Qu'importe le déficit mental, chaque individu est différent. Je ne suis pas aussi à l'aise qu'elle avec tous les trisomique que je rencontre. Sa capacité d'adaptation me fascine. Mais je ne peux clairement pas lui expliquer mon silence par ma fascination pour elle... 

— Oh, j'allais oublier, s'exclame t elle en récupérant son sac. 

Elle en sort un poisson clown en peluche et le tend à Boris qui s'en empare immédiatement en sautant de joie. 

— Comment tu savais que c'était mon préféré? demande t il.

— Une intuition, sourit elle en fixant mon cœur.

Elle regarde l'endroit exact où se trouve mon tatouage représentant un poisson clown. Seulement mon t-shirt noir ne laisse rien deviner et je n'ai jamais été torse nu devant elle. A moins que... Je penche la tête sur le côté. Elle rougit en comprenant que j'ai surpris son regard et se détourne pour montrer d'autres espèces à Boris. Je m'approche d'eux et frôle son bras lui arrachant un frisson.

— Tu as aimé?

— Quoi donc? demande t elle innocemment.

— La compétition, je souris en fixant la vitre.

— Comment je le saurais?

— Une intuition, je ricane.

Elle frappe mon épaule, les lèvres pincées, prête à exploser de rire.

— Bon ok, j'ai peut être regarder la redif', mais c'était pour voir James, hein, râle t elle.

— Hmm hmm.. 

— Tu m'énerves, souffle t elle en s'écartant. 

Je la laisse s'éloigner avant de revenir à la charge. Depuis ce matin, je suis intrigué par cette soit disant peur de l'eau. Assise sur un banc, elle croque dans son repas. Boris continue à observer le monde marin, nous laissant un peu d'intimité, alors je m'assieds face à elle.

— Tu n'es pas aquaphobe.

— J'ai peur de l'eau, contre t elle.

— Mais tu n'es pas aquaphobe!

— Puisque je te dis que j'ai peur de l'eau, s'énerve t elle.

— Si tu avais si peur de l'eau que ça, tu ne pourrais pas approcher un bassin comme tu l'as fait ce matin. Tu rigolais quand ton phoque a failli te faire tomber à quelques dizaines de centimètres du bac.

— Qu'est ce que ça change que je sois aquatruc ou pas?! J'ai peur de l'eau, point! Tu es toujours aussi chiant ou ça aussi ça m'est réservé? 

Sa réaction me conforte dans mon hypothèse de départ et j'en suis presque rassuré, ça sera plus simple à soigner.

— Je crois que c'est toi qui me rend chiant, je rétorque en haussant les épaules. Traumatique?, je demande.

— J'ai pas envie de parler de ça, murmure t elle.

Ses yeux s'embuent me donnant ma réponse. Je m'en contenterai pour le moment et j'ai hâte de la mettre à l'eau pour endiguer son problème de peur irrationnelle. Reste à connaître l'étendue des dégâts pour adapter le travail à faire sur elle, mais chaque chose en son temps.

— Tu reprends le travail à quelle heure?

— Euh... je ne travaille pas aujourd'hui, m'avoue t elle les joues rouges.

— Tu passes ta journée de repos sur ton lieu de travail?

— Quoi? Tu ne nages pas en dehors des entrainements peut être?, se moque t elle.

— Touché.

— Et puis c'était pour Boris surtout. Je ne comprends toujours pas comment tu peux être son frère! Tu es si ... argh, râle t elle.

Je souris amusé par sa réflexion.

— On est jumeau en faite, je lui avoue.

Ses yeux s'arrondissent et me fixent comme un dément.

— Si c'est vrai, je t'assure. Je suis né en premier, c'est pour ça qu'il m'appelle toujours "grand frère".

— C'est surtout parce que tu prends soin de lui qu'il t'appelle comme ça.. Vous vivez tous les deux?

— Ouais, on a une maison près du centre. 

— Il a beaucoup de chance de t'avoir.

— Je crois que c'est plutôt moi qui ai de la chance, je contre en observant mon petit frère plus heureux que jamais. C'est pour lui que j'ai commencé à nager. Il a toujours adoré les poissons et n'arrêtait pas de dire qu'il voulait nager comme eux mais c'était compliqué de trouver un maître nageur capable de lui apprendre. Je sais pas pourquoi je te dis ça.. 

Summer me sourit, ses yeux perdus sur mon visage. 

— Tu lui as appris à nager?

— Ouais.. 

— Vous avez une jolie histoire tous les deux, constate t elle.

— Parce que je ne dévoile que la plus jolie partie, je rétorque en me raclant la gorge. 

Mal à l'aise par mes confidences inopinées, je me lève et vais à mon tour observer ces animaux marins. On passe le reste de l'après midi à contempler les différents bassins. Summer ne me prête plus attention, préférant la compagnie de Boris qui est bien plus agréable que la mienne depuis que je me suis renfrogné, je le conçois. Au moment de se quitter Boris ne peut s'empêcher de dire une dinguerie.

— Tu sais, mon grand frère, il a pas d'amoureuse, comme toi.

Fier de son idée, il sourit largement en nous regardant tour à tour.

— Voilà, voilà... On y va Boris? Merci Summer, pour ... tout.

Elle se contente de hocher la tête avec un sourire en coin avant de retrouver sa voiture. Mes yeux ne se détachent pas de son déhancher merveilleux.

— Pourquoi tu la regardes comme ça? Tu es amoureux?

— Raconte pas n'importe quoi, je ronchonne. Allez, on rentre. 

Ocean of LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant