Chapitre 13 - Steven

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J'ai du mal à contenir ma rage. Harry ne cesse de revenir vers Summer alors qu'elle le repousse à chaque fois. Il commence à devenir lourd. Tout dégénère quand je le vois la serrer trop fort contre lui. Elle hurle, je le vois mais ne l'entends pas d'ici. Je me décide à bouger pour intervenir quand il la pousse vers la piscine. L'horreur se peint sur son visage et son corps s'engouffre dans l'eau. Je cours vers son point de chute en espérant la voir remonter mais rien. 

Sans plus attendre, je plonge. Il ne se passe que quelques secondes avant que je ne la trouve, pourtant elle est totalement figée, les yeux exorbités. Mon bras s'enroule autour de sa taille et la plaque contre mon torse. Mes pieds battent avec frénésie pour nous remonter à la surface. je sens ses ongles se planter dans mes épaules alors que le reste de son corps est toujours aussi crispé. 

De retour à la surface, elle tousse et recrache une quantité impressionnante d'eau au vu du peu de temps qu'elle y a passé. Sa crise de panique l'a complétement tétanisé l'empêchant de raisonner et de bouger. Toujours accrochée à mes épaules, ses jambes se sont enroulées autour de ma taille. Je sors de l'eau et la couvre d'une serviette que Karl me tend. James et Laurie nous suivent jusqu'à la voiture. Je m'installe à l'arrière en silence. Summer ne me lâche pas et son corps tremble contre le mien alors qu'il fait une chaleur à crever ce soir. Laurie tente de parler à son amie mais en état de choc elle ne répond pas, toujours paralysée. 

— Je vous ramène où? demande James au volant.

— Chez moi, je réponds sans hésitation. 

Ma main caresse son dos alors qu'elle commence à sangloter dans mon cou. Je la serre un peu plus fort, incapable de parler. Qu'est ce que je pourrais bien lui dire de toute façon? C'est rien, ça va aller? Je ne sais même pas pourquoi elle panique autant à l'idée d'être dans l'eau, alors je préfère m'abstenir plutôt que d'être maladroit. 

James se gare devant chez moi et vient m'ouvrir la porte. Je le remercie et emmène Summer chez moi. Boris dort déjà à cette heure ci. Eparpillés sur la table de la salle à manger, j'attrape des vêtements secs et nous dirige vers la salle de bain. Assis au bord de la baignoire, je tente de défaire sa prise autour de mon cou, en vain.

— Il va falloir me lâcher bébé koala, je murmure.

— Il est mort..

Je fronce les sourcils.

— Personne n'est mort ce soir Blondinette, je tente de la rassurer. Il faut que tu te changes, tu vas être malade.

— Il est mort... je l'ai lâché et il est mort...

Bon, je n'arriverai peut être pas à la refaire nager un jour finalement...

— Summer, on est dans ma salle de bain, sur la Terre ferme, je vais bien, toi aussi. Tu peux me lâcher, personne ne va mourir, c'est promis. Summer, regarde moi...

Ses yeux bleus sont remplis de larmes. J'essuie ses joues avec mes pouces. A mon contact, ses yeux se ferment et sa respiration ralentie. 

— Tout va bien Summer, je lui répète. 

Petit à petit ses ongles sortent de ma peau. Elle laisse glisser ses mains de mes épaules à mon torse, secouant mon corps d'un frisson délicieux. Elle ne semble pas encore prête à lâcher prise et cherche un contact quelconque. Je lui laisse le temps nécessaire pour s'éloigner définitivement.  

J'attends dans le salon quand elle revient vers moi. Mon t-shirt trop grand est noué sous son nombril et mon short lui sert de pantacourt. Elle essuie ses joues d'un revers de main et se balance d'un pied sur l'autre, comme à chaque fois qu'elle est mal à l'aise. 

— Viens, je l'invite en montrant la place à mes côtés.

Elle s'assied hésitante jusqu'à ce qu'un sourire étire enfin ses lèvres en découvrant le thé et la tablette de chocolat que j'ai préparé.

— C'est pour se remettre d'une attaque de détraqueur normalement, plaisante t elle en désignant le chocolat.

— Vu la tête qu'aura Harry demain, on peut considérer cette soirée comme une attaque de détraqueur...

— Merci, souffle t elle.

Elle vient caler sa tête contre mon épaule tout en croquant dans un carré. Si Boris la voit, il va poser tout un tas de questions auxquelles je n'ai vraiment pas envie de répondre. 

— Mon père est mort noyé en voulant me sauver, me confie t elle.

— Je suis désolé. C'est arrivé quand?

— Il y a 16 ans, j'avais 8 ans. 

Elle se redresse et joue avec la lanière du short, perdue dans ses souvenirs.

— Il était océanographe. Le monde marin c'était toute sa vie. On partait souvent en mer tous les trois. Il savait très bien nager et moi aussi. Mais ce jour là, le vent s'est levé, les vagues déferlaient avec de plus en plus d'intensité. En voulant l'aider, j'ai glissé et suis tombée à l'eau. Mon père a sauté et m'a vite récupéré. Ma mère m'a aidé à remonter à bord, j'ai lâcher ses épaules et... il a disparu. Le bateau a été secouée par une bourrasque plus violente, sa tête a heurté la coque et le temps qu'on le retrouve, c'était terminé. Je n'ai pas peur de l'eau, j'ai peur d'être immergé dans l'eau. 

Des larmes barrent à nouveau ses joues. Je la prends dans mes bras. Allongés l'un contre l'autre sur le canapé, elle pleure tout son saoule. Mon nez dans ses cheveux, je respire son odeur. Quand j'ouvre à nouveau les yeux, la lumière m'aveugle et la tête de Boris se trouve à quelques millimètres de la mienne.

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