Histoires de mon enfance

Préface

Je me propose de raconter les histoires de mon enfance. Des histoires connues de tous ; d'autres qui n'ont encore jamais vu le jour. Pour les unes griffonnées à la main vite sur le coin des cahiers ; pour les autres nées de main forcées sur le carreau des copies. On ne retrouvera pas ici de longueurs, pas de texte qui ne soit ni conte, ni nouvelle, car que lisions-nous à cette époque sinon cela ?

Je souhaite raviver le temps où nous n'avions souci de la longueur des récits ; où nous nous intéressions davantage aux histoires qu'à leur morale ; où la fantaisie ne s'opposait pas encore au réel. Aux yeux de nos parents, ces récits paraissaient dénudés de tout intérêt. Ils leur semblaient tout aussi invraisemblables que le cours du monde nous le paraît aujourd'hui.

C'est pourquoi, en ces temps où la réalité semble s'effondrer d'elle-même, je souhaite retourner à l'imaginaire et au rêve. Ce recueil n'a d'autre visée que de ranimer l'enfance par le rire et les larmes ; le son et les odeurs ; la prose et les discours ; la mémoire et les souvenirs.

D'aucuns diront que le rêve est l'échappatoire de ceux qui cherchent à fuir leur existence. C'est parce qu'ils aimeraient également s'extirper de la torpeur du monde. La raison les rend prisonniers d'une réalité assombrie par la présence d'autres hommes qui vivent heureux. Si l'on venait à me demander de choisir entre ce petit garçon doté d'une inconcevable imagination ou l'un de ces moroses missionnaires, je pense bien savoir vers qui diriger mon choix.

Les hommes de notre temps ne croient plus qu'aux histoires qui leur ressemblent. M'est avis que par le rêve, ils peuvent fuir la misère de leur existence. C'est pourquoi j'ai rassemblé dans ce recueil plusieurs contes au travers desquels poursuivre son enfance. Il serait grossier de croire que l'on peut définitivement tuer l'enfant qui est en nous, et j'aurai bien pitié de l'homme qui le soutiendrait. Tout homme connaît ses moments lumineux qui le construisent à la manière d'un enfant. Et je persiste à croire que c'est l'enfant lui-même qui nous élève au rang d'adulte.

Chers amis lecteurs, je vous convie à la lecture de ces récits qui semblent aujourd'hui davantage réservés aux enfants qu'aux adultes. Ne les dénigrez pas. Au contraire, élevez-les car ce furent vos premières lectures. Sur ces mots, je m'en retourne à ma plume et vous laisse accéder à la désinvolture de mes écrits.