Aux pays des contes - I

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L'on se souvient encore d'un jeune garçon du XVIIème siècle que l'on apercevait souvent vagabonder dans les jardins de Tours. Du haut de ses sept ans, il n'était pas rare de le rencontrer au détour d'un chemin des Prébendes, ou dans les allées du Jardin Botanique. Durant ses excursions, ce garçon, doté d'une incommensurable imagination, affabulait les petits enfants d'extravagantes histoires auxquelles nul n'aurait jamais su donner crédit. Dès qu'elles l'apercevaient, les mères s'empressaient d'éloigner leurs enfants, convaincues qu'il ne leur était pas de bonne compagnie.

Mais si ce garçon se prêtait souvent à raconter d'aussi invraisemblables récits, c'est parce qu'il avait été élevé dans un entourage des plus raffinés qui lui avait donné accès à toute sorte de privilèges, et notamment celui d'accéder aux impressionnantes bibliothèques bourgeoises. Aussi, lorsqu'on ne le croisait pas en ville, on le savait alors chez lui, plus particulièrement au chevet de son lit en train de lire quelqu'ouvrage de légendes populaires, au grand désarroi de ses parents qui se reconnaissaient davantage dans la littérature d'Homère que dans les manuscrits de quelqu'autre auteur plébéien.

Un soir pourtant, il s'affaira à l'un de leurs ouvrages mais convint rapidement de revenir à ses désinvoltes historiettes, lesquelles lui plurent tellement que, dans l'empressement de tourner la page, il la déchira. Agacé, il froissa le papier, et remit sa lecture au lendemain. Il ne fallut pas longtemps à Morphée pour venir le rejoindre, et il s'endormit sans avoir pris le temps de se débarrasser du papier déchiré.

La nuit fut particulièrement longue. Il ne cessa de se retourner dans ses draps, d'abord parce que la nuit était froide, mais aussi parce qu'il n'arrivait pas à se positionner confortablement dans son lit. C'est en se réveillant qu'il constata l'avoir quitté pour le plancher, ou plutôt avoir quitté sa chambre pour une cabane de jardin. C'est du moins la conclusion à laquelle il aboutit lorsqu'il aperçut l'entassement d'outils à ses côtés. Il se crut d'abord dans un rêve, victime de sa propre extravagance imaginative, mais un examen rapide de ses sens lui indiqua que sa situation était bel et bien réelle.

Un rapide coup d'œil à la fenêtre le fit comparaître devant un paysage qui n'avait rien à envier à celui qu'il observait habituellement depuis sa chambre. Et pour cause, il apercevait une superposition de vallons, pour les uns surmontés de forêts, pour les autres de plaines, le tout sillonné par une rivière. Mais ce qui l'interpella davantage dans le tableau idyllique qui s'offrait à lui, c'est qu'il était dépourvu de toute présence humaine, si ce n'est le château que l'on distinguait à l'horizon.

Il se mit alors à pleurer car il ne comprenait pas quel tort il avait pu commettre pour se retrouver si loin des siens en ce lieu qui lui était visiblement inconnu. Il invoqua Dieu lui demandant pourquoi il avait mérité pareil châtiment. Finalement, conscient que la lamentation ne lui serait d'aucun secours, il entreprit d'aller explorer les alentours.

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