Au pays des contes - III

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Dame Fortune est bonne, et pour cause : lorsque le danger prévient, elle accourt aussitôt à notre secours. Qui n'a jamais vécu cet instant providentiel qui nous dérobe à tout destin tragique ? Car voici qu'un enfant surgit à l'angle de la maison au moment même où le garçon s'apprêtait à frapper :

« Malheureux, sais-tu à qui tu demandes asile ? Tu ne trouveras point d'homme dans cette demeure, mais seulement d'infâmes ogres avides de chair humaine ! »

Mais le coup était déjà parti contre la porte.

« Fuis tant que cela est encore possible, reprit le garçon.

— Et toi, que fais-tu aux côtés de cette maison ? lui demanda-t-il.

— Je m'en vais prendre le trésor de notre hôte.

— Qui donc se risquerait à pareille entreprise ?

— Les pauvres, lui répondit-il simplement. »

L'enfant était effectivement vêtu de loques, ce qui suffisait à le reconnaître comme l'un de ces misérables enfants que l'on avait coutume d'abandonner dans la forêt. Mais, chose étonnante, celui-ci portait également de grosses bottes à ses pieds qui n'étaient pas sans revêtir une grande valeur. En l'observant ainsi, le jeune garçon fut saisi à la fois de honte et de pitié. Il rentra ses mains dans ses poches, et fut surpris d'y reconnaître les contours d'une pièce. Lui vint alors cette idée qu'il proposa à son compagnon :

« Ami, guide-moi au palais ! J'ai moins à t'offrir que ton ogre, mais c'est valeur plus sûre que ton entreprise hasardeuse, dit-il en présentant la pièce à son interlocuteur. »

C'est précisément à ce moment que la porte s'ouvrit. Les traits d'un ogre s'y dessinèrent. Lorsqu'il aperçut les deux enfants, il chercha à les attraper mais tous deux s'enfuirent en courant. Il s'élança alors à leur poursuite mais — reconnaissons que les ogres ont nature imposante, il fut bientôt contraint d'abandonner ses proies non sans émettre un long cri étouffé qui n'était pas sans trahir son essoufflement.

Lorsqu'ils se furent suffisamment éloignés de la créature, l'enfant accepta la proposition du jeune garçon, et tous deux s'enfoncèrent au milieu des bois. Ils n'eurent pas longtemps à cheminer car le palais leur apparut alors même qu'ils sortaient des bois. Après l'avoir amplement remercié, et après lui avoir remis son dû, le garçon se sépara de son guide. Il commença son ascension au château, celui-ci était perché dans les hauteurs d'une colline.

Il arriva devant la porte gardée par deux soldats. Pendant que le premier partait l'annoncer au roi, le second patientait avec lui au seuil de la demeure. Lorsqu'il fut reçu, il pénétra dans l'impressionnante bâtisse.

Au cœur de cette somptueuse salle, Sa Majesté le roi siégeait assise sur son trône, perchée au milieu de l'alignement des colonnes, et élevée sous les auras de lumière. À son arrivée, elle s'éclaircit la voix avant de prononcer ces quelques mots :

« Approche étranger, toi qui ose troubler mon repas ! »

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