Après des mois d'absences, des échanges connectés qui ne changent rien et des espoirs mûrs d'abandon, je l'ai vu.
Là, à l'instant, il y a cinq heures, je l'ai vu
Avec la mater (toujours caler du latin pour montrer nos efforts estudiantins) on était dans le métro. Et toudincou -je n'ai pas d'autres termes pour désigner son apparition- Jules.
Il a quelque chose d'étrange, une impression de mouvement perpétuel. Pas qu'il ne tienne pas sur place, mais il se fond dans l'espace, il intégre le lieu, arrive à être là, présent en se glissant dans les pensées. J'arrive pas à dire à quel point il a l'air d'être ici, là, lui, mais disparait complétement quand il part. Il n'a jamais été là, ici, il est lui. On se demande si il était avec nous.
Il est arrivé en souriant, un "oh" de surprise de sa part et un "tiens" de ma mère.
Moi j'ai fondu. Je me suis pas glissée comme lui dans le monde, dans la conversation, je voulais juste atterrir dans son regard.
J'ai presque rien dit, il a parlé avec ma mère, il a la conversation facile et ma mère m'oublie quand elle est avec quelqu'un d'autre. J'étais là mais je pensais à quand j'étais derrière les messages, à quand j'étais à écrire pour lui à quand j'étais à penser à lui quand j'étais à me rappeler comme une comptine nos jeux, son rire sourire ses mains sa bouche ses lèvres frôlantes je m'en fous que ce mot n'existe pas, elles sont comme ça ses lèvres, glissantes caressantes incompréhensibles.
il essayait de me faire participer, me posait des questions
j'avais juste l'impression d'être l'enfant timide que les adultes essayent de comprendre
je me demandais pourquoi je souriais je regardais ma mère lui ma mère lui les autres
quand je ne sais pas quoi dire faire penser être je fais autre chose diversion
d'habitude dans ces situations je bois de l'eau, la dernière fois avec lui je me suis étranglée et je préfère ne pas y repenser (vous vous rendez pas compte à quel point c'est traumatisant)
je touchais mes vêtements, je regrettais cette tenue, de pas mettre maquillée je sais ça veut rien dire mais quand même oui je sais
un débardeur rose clairement trop petit et trop fluo même pour le style, une jupe de vieille bourgeoise (mais quand même cool) les fameuses chaussettes flamands roses avec une qui était retournée parce que flemme et donc y en avait une juste avec des fils, le gilets toujours le même celui avec les rayures que je dois jeter parce que trop de trous j'ai commencé à broder ça rends bien mais y a toujours des trous, les badges des groupes punk préférés mais personne connaît donc on dirait que je suis fan des simpsons mais non j'ai jamais vu sauf une bédé quand j'avais neuf ans
les cheveux bizarres j'ai vu après que j'avais un bout de ma coque de téléphone dedans, noeuds ou boucles on sait pas, les seins où on prie que personne les dessine jamais les voit, les bleus les cicatrices les complexes le rouge à lèvre qui nous rattrape dans notre spirale qui rassure, mais oublié, crotte d'oeil, mec t'es la prunelle de mes vieux de mes oeufs, je sais plus
t'as dit "tu viens demain ?"
"ok"
rien d'autre, apprends à parler ma vieille un jour tu sauras articuler, ptet on te comprendra
au moins t'as pas bégayé t'as pas parlé
Ses mimiques, son rire, son honnêteté, son sourire qu'il cache pas t'as envie de les avaler pour les sentir parce que t'as pas des papillons, t'as un blob un bob qui glisse roule joue dans ton corps
Quand il est parti ta mère te regarde se moque de toi elle te dit "façon il va rien faire, deux ans de moins, tu crois que ça l'intéresse, il va rejoindre ses copains, surement sa copine, au moi il essayé de te parler, c'est gentil de sa part, c'est vrai qu'il est mignon, dommage, il a un beau sourire t'as vu, hahaha bien sûr que t'as vu tu regardais que ça, pourquoi tu rougies, t'en fais pas il va rien se passer"
tu te regardes dans le reflet de la vitre, pourquoi on se voit moche dedans pourquoi c'est aussi mal foutu t'es aussi mal foutue, t'as envie de te frotter la peau de l'arracher de l'enlever de plus avoir de corps pour glisser libérer des trucs tu sais pas quoi tu veux danser de honte et de joie parce qu'il a dit à demain
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Honnêtement, pas d'idées.
Non-FictionUne sorte de journal intime, j'imagine. Un retour aux blogs. Bref, à voir ce que ça va donner. PS : Quand je trouverai un titre adapté, je changerai cette couverture.