Réécrire notre histoire

Mélancolie incertaine - Jeudi 9 juin 2022

Il fait chaud. Très chaud. Trop chaud. Mais la sensation sucrée qui roule sur ma langue m'apparait comme une oasis au milieu du désert. Je ne ressens pas le moindre goût et pourtant, mon cœur se sent libéré par cette seule fraicheur salvatrice.

Un rire résonne près de mon oreille. Avant même d'en voir son auteur, un sourire déforme mes lèvres. Une seconde glace apparait dans mon champ de vision. Sans la moindre hésitation, je la goûte à pleine bouche, volant une bonne part de ce rafraichissement des plus délicieux. Une nouvelle fois, sa voix se brise dans un rictus adorable, une véritable mélodie qui fait chavirer mon cœur.

Mon cerveau crie à l'aide tant la douleur le comprime. C'est terriblement désagréable. Et pourtant, je ne peux m'empêcher de sourire sous sa caresse désinvolte. Avec impatience, j'attrape son menton et plaque mes lèvres sur les siennes. Elles ont un goût sucré. Mélange de fraises et de fruits de la passion. Je crois. Etrangement, je sais que c'est le cas, même si je ne le ressens pas vraiment. Une sensation étrange me tord l'estomac.

Mes doigts glissent dans ses cheveux noirs. Des reflets presque bleus se dessinent sous la lumière du soleil. Il fait chaud, et je sens un filet de glace fondue caresser ma peau. De ma seule main libre, je le rapproche de moi pour approfondir notre baiser. Je souris contre ses lèvres. Il en fait de même. Je sens son corps bouger contre le mien. Ses bras se soulèvent, s'enroulent autour de moi et... Un léger bruit se fait entendre. Lorsque nous nous séparons, bien malgré moi, c'est avec amusement que je retrouve son dessert par terre.

Dans un éclat de rire partagé, je lèche ma glace et l'embrasse à nouveau, comme pour partager un peu plus longtemps ce plaisir aux notes sucrées. Nouveau rire, nouveau délice. Sans même avoir à réfléchir, ma main porte la sucrerie entre nos lèvres. Dans une parfaite harmonie, nos bouches se délectent de cet avant-goût de plaisir. Mon cœur accélère ses battements dans l'attente de ce qui, je le sais, va arriver. Et je savoure cet instant qui me parait si fugace et pourtant si réel. Je ne mange plus mais dévore le dessert glacé, comme s'il était l'épreuve avant la récompense.

Rapidement, il ne reste plus qu'un bâton de bois entre nos deux bouches. En un instant, je le fais disparaitre. Mon visage s'approche plus vite que je ne l'aurais voulu du sien. Je l'embrasse sans la moindre hésitation. Franchement. Passionnément. Amoureusement. Mon cœur bat à tout rompre. C'est comme s'il ne demandait qu'à sortir de ma cage thoracique pour rejoindre son autre moitié. Comme si, à l'image de Charmant et de Blanche-Neige, nous ne partagions qu'un seul et même organe, que nous n'étions rien de plus qu'une seule âme séparée par la vie en deux corps.

Mes mains s'enfoncent dans sa douce chevelure. Certaines mèches sont collées à sa nuque et je n'en mène sans doute pas beaucoup plus large. Il faut tellement chaud. Si chaud que je pourrais disparaitre à n'importe quel instant, perdu contre ses lèvres, les pensées embrumées par ce je-ne-sais-quoi qui trouble chacun de mes sens...

Mes yeux s'ouvrent lentement. Il y a trop de lumière dans la pièce, et il me faut bien quelques minutes avant de réussir à pleinement les ouvrir. Il m'en faut quelques-unes de plus pour réaliser que je suis dans la chambre d'amis de mon frère. Je suis resté si tard pour l'aider à faire la liste des invités et leur écrire des faire-part que je n'avais plus la force de rentrer à l'appartement.

Fatigué, je frotte mes yeux avant de regarder autour de moi. Mon pouls est étonnement élevé, de si bon matin. Le soleil brille déjà trop fort pour moi. Je déteste lorsqu'il fait jour si tôt. Je n'arrive jamais à dormir très longtemps. Et une sensation désagréable, au plus profond de moi, m'empêche de me rendormir comme je le voudrais. Je ne sais pas réellement de quoi était fait mon rêve. Je sais que mon imagination a encore fait des siennes mais... Je ne saurais dire si cette faiblesse qui parcourt tous mes membres provient de la fatigue ou... de ça.