Chapitre 1

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La perte d'un être cher, ma plus grande peur.

J'en ai eu tout au long de ma vie.

Je pourrais même vous dire que la mort n'est pas la plus douloureuse des pertes.

Le décès est quelque chose de destructeur et de terrible dans une vie. Mais c’est la suite logique de toute existence. Nous faisant souffrir et ressentant une solitude face à cette perte. Malheureusement, personne n’est éternel et nous le savons. Alors quand l’un de nos proches disparaît dans l’immensité de notre galaxie et redevient une étoile, nous apprenons à vivre avec nos souvenirs heureux.

En revanche pour la perte, l’abandon, on se posera toujours des centaines de questions.  Pourquoi cela n’a pas fonctionné ? Qu’ai-je fait de mal ? Ai-je perdu du temps ? 

Tant de questionnements qui n’auront jamais vraiment de réponses. Car si, vous ne parlez plus à cet ami ou si vous n’êtes plus en couple avec cette personne, c’est que le destin en avait décidé autrement. 

La plus récente dans ma vie, Vincenzo. Nous étions ensemble depuis nos vingt-deux ans. Lui à qui, pour la première fois de ma vie j'avais tout donné, entièrement tout. Le premier homme avec qui j'avais vécu. Ce beau blond, à la barbe bien taillée et aux yeux bleus malicieux que j'avais tant aimé. Je me suis laissé prendre par les bons moments et j’ai baissé ma garde. 

Quatre ans ont passé, des hauts, des bas. Pour la fin surtout des bas, le fond du trou même. Puis l’année dernière, en revenant du travail, il était là devant moi à charger sa voiture de cartons. Il me regardait avec ses yeux bleus qui ne contenaient plus cette malice familière. Il ne souriait par ailleurs plus et cela depuis quelque temps. On s'était épuisé, perdu à garder ce qui autrefois était magnifique et chaleureux. Avec le temps, tout cela était devenu un souvenir nostalgique, froid et vide. 

J'avais vu les signes bien sûr. On en avait discuté plusieurs fois ces 6 derniers mois. Peut-être trop de fois finalement. C'était là, la fin de notre histoire qui aurait sûrement dû s’achever avant toutes ces crises, ses cris, ces pleurs, nous déchirant jusqu'à tard dans la nuit. Il ne restait de nous que de la tristesse. 

Tout ce qu'il trouva à me dire c'est qu'on avait trop changé, en peu de temps avec aussi, des manières de vivre plus différentes que lors de notre rencontre. Qu'il n'était plus heureux et qu'il voyait que moi non plus, même si je disais le contraire. Gardant mon sourire en toutes circonstances, face à tout le monde, même dans mon cercle le plus proche.

C'était ma force principale. Afficher un sourire même si la vie t'écrase, t'étouffe, toujours sourire et dire que ça va la tête bien droite. Pour lui, c'était un de mes plus grands défauts. Je sais que je devrais plus m'ouvrir mais je ne veux pas déranger. J'essaie de relativiser même si la plupart du temps ça ne fonctionne pas. Je reste seule face à mes problèmes. 

Au fond il avait sûrement raison mais qui voudrait m'écouter ? Je suis de celles qui sont toujours là pour les autres mais lorsqu'elles ont un souci, personne ne remarque que ça ne va pas. Mais qui pourrait le deviner si je ne me confie pas. C’était le chat qui se mord la queue. Toujours entourée et pourtant seule. Même avec Vincenzo. Peut-être n’était-il pas fait pour moi finalement. 

Je me suis donc retrouvée seule. Solitaire sous cette pluie torrentielle du mois de mars, à confondre les perles salées dégoulinant de mon âme et les gouttes d'eau sur mes joues. Je ne sais combien de temps, je suis restée dehors comme ça à attendre. Mais à attendre quoi ? Il avait raison, on avait essayé trop longtemps de sauver ce qui ne pouvait l'être. Essayant trop de fois de recoller les morceaux déjà en miettes de notre relation et de nos cœurs brisés.

Agapé Où les histoires vivent. Découvrez maintenant