Partie I - Sans Eli - C3

5 2 0
                                    


Chapitre III

La salle était haute d'environ trois mètres, couverte de bois du sol au plafond. Le plancher était doux et agréable si bien que les nouveaux arrivants quittèrent immédiatement leurs sandales pour être au contact de leur lieu d'entrainement. La salle était divisée en plusieurs compartiments étroits. Les murs étaient recouverts de bibliothèques fournies, pleine à craquer de lourds volumes et d'objets antiques, ou de tapis en plumes de cygne pour amortir quelconque projection. À l'entrée, des armes avaient été disposées sur des portoirs de chêne.

- On va commencer ! s'exclama Lishka.

Iris, Charly et Aria étaient face à elle, assis en tailleur. Elle sortit d'un petit coffre quatre clés grisâtres et rouillées. À l'instant où les trois jeunes les prirent entre leurs doigts, elles s'illuminèrent diffusant dans la pièce un arc-en-ciel vert, jaune et orange. Ils étaient tous émerveillés par cette étrange onde colorée. Lishka en profita pour ranger discrètement la clé restante dans l'écrin.

- Il n'y a qu'un sort que vous pouvez jeter sans clé : les tempêtes, dit Lishka, Il vous suffira de dire la formule que vous apprendrez par cœur et une tempête d'élément qui vous obéira au doigt et à l'oeil. Aujourd'hui, je vais vous apprendre à maitriser vos éléments et vos tempêtes car elles peuvent vous être d'une grande aide en n'importe qu'elles occasions. Accrochez la clé que je viens de vous donner à votre ceinture, on ne s'en servira pas aujourd'hui.

Les trois jeunes obéirent et se levèrent.

- Vous maitrisez chacun un élément différent, un des éléments que les Terres Mères possèdent. Iris, la terre, Charly, l'air et Aria, le feu. Respectivement, cela revient au printemps, à l'automne et à l'été, si on parle dans le langage des Saisons. Je vais vous donner les formules qui correspondent pour invoquer vos tempêtes.

Elle s'exécuta et les trois jeunes répétèrent. Rien ne se passa.

- Ah, pardon ! s'excusa Lishka. Il faut que vous ressentiez ce que vous dites, le dire avec conviction, y croire lorsque vous invoquez vos tempêtes.

Radix tempestas !

- Ventus procella !

- Ignis tempestas !

Leurs bras tendus en avant, les paumes tournées vers le sol. Ils firent surgir du plancher leur élément dans toute leur splendeur. 

Les yeux d'Iris, habituellement vert pâle, redoublèrent de vivacité, laissant des pigments jaunes s'introduire dans ses pupilles. Des racines sortirent du parquet et tournoyèrent autour d'elle, des fleurs tourbillonnèrent. Une tempête de parfums printaniers.

Les yeux d'Aria abandonnèrent le jaune délavé qui entourait ses pupilles pour accroître de la fougue et de l'ardeur. Ses pupilles s'enflammèrent telles des braises en furie sur une bûche sèche. Des flammes jaillirent du sol pour l'envelopper entièrement, se reflétant dans ses yeux, crépitant autour d'elle. Une boule de feu dans chaque main, elle arborait un sourire à la fois impressionné et satisfait.

Les cheveux de Charly se dressèrent avec grâce et fluidité sur sa tête. Avec légèreté, ses pieds quittèrent le sol, l'air tourbillonnant autour de lui. Comme pour Iris, des tâches oranges et jaunes pigmentèrent ses yeux, comme les couleurs de l'automne. Sa tempête était invisible, on voyait simplement ses vêtements se soulever, un souffle chaud arborant la pièce.

Lishka sourit. Ses élèves avaient un véritable don. Ils étaient doués et efficaces, voilà bien longtemps que la femme n'avait pas vu une telle magie, si belle, si pure. Dans leurs yeux espiègles et pétillants se reflétait la gloire future qui les attendait.

Cependant, il leur manquait quelque chose : les deux derniers éléments. En effet, chacune des tempêtes tournoyaient autour de leur maitres, sans se mélanger, sans créer le dernier élément, l'arme suprême. Lishka se perdit dans ses pensées embrumées. Iris s'en rendit compte et les racines qui l'entourait retombèrent et fondirent dans le parquet, ses yeux retrouvèrent leur pâleur. Elle s'approcha d'elle.

- Il est vivant... N'est-ce-pas ?

Elle sursauta. Ses yeux se plongèrent dans les siens. Après avoir donné la voix à Iris, elles avaient beaucoup parlé, d'Eli, de la bataille, de leur vie. Lishka lui avait également apprit à bien prononcer chaque mot compliqué et Iris avait fait beaucoup de progrès en très peu de temps. Le groupe était rentré au palais dans le silence. Les trois amis étaient anéantis de rentrer sans Eli. Les orphelins furent chacun prit en charge par un soldat, comme prévu. Il était temps de commencer les entrainements. Lishka se chargeait des Saisons mais il en manquait une. Et la femme en était affectée. L'ambiance n'était pas à son meilleur. Elle entendit la voix d'Iris lui parler mais elle ne comprit pas. Elle entendait seulement le doux son de sa voix. Une voix calme et posée, mélodieuse.

- Quoi ?

- Eli, il est vivant non ?

- Je ne sais pas... en touchant sa clé, je perçois les battements de son cœur mais son âme est inaccessible.

Iris baissa les yeux en soupirant. Elle ne pouvait pas accepté que celui qui avait été comme son grand frère pendant sept ans soit mort. Il était forcément là, quelque part.

Aria et Charly ravalèrent leur tempête et s'approchèrent. Ils savaient que la jeune fille n'était pas prête à faire son deuil. Et ils savaient que quoi qu'ils disent, elle ne les écouterait pas. Elle gardait espoir, même si cela la détruisait intérieurement, elle continuerait de croire, d'espérer. Elle accomplirait la mission qui lui était destinée en se nourrissant de cet espoir.

Les Quatre Saisons T.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant