Chapitre 17

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J'ai passé une nuit agitée et peu reposante. Au réveil ce matin, une douleur lancinante m'assaillait dans le bas de mon dos. Il m'a fallu un moment pour retrouver un semblant de confort dans mon corps. Je rêve de pouvoir passer ne serait-ce qu'une seule nuit dans un vrai lit. Mais à ma connaissance, il n'y a aucun village ou auberge aux environs. Je me rends compte que je ne connais pas grand-chose de mon royaume. Je me proclame aventurière et pourtant je ne suis jamais allée très loin. Je me suis rendue une fois dans le village d'Elwyn qui se trouve un peu plus au sud, et je connais la forêt qui entoure mon village, mais avant d'avoir besoin de l'Éclat de Lysaria, je ne m'étais jamais aventurée aussi profondément dans les bois.


Nous avons avancé à bon rythme toute la journée. Thoran nous a informés que si nous maintenions notre cadence d'hier, nous mettrions encore une semaine pour atteindre les côtes est. En accélérant un peu, nous pourrions y parvenir en seulement 2 à 3 nuits.


Aeri a choisi de continuer à marcher avec nous, ce qui n'est pas toujours facile compte tenu de sa taille imposante. Sa présence nous assure que les Ombragiens ne se montreront pas. Durant notre trajet, Thoran s'est lancé dans un monologue qui semblait interminable, nous contant diverses péripéties vécues lors de ses voyages. Écouter ses récits passionnés a allégé l'ambiance de cette journée de marche, bien que par moments Aeri semblait exaspéré par les paroles du guerrier.


Mon estomac a crié famine quasiment toute la journée. Je me suis surprise à rêver d'un bon plat chaud et d'un lit douillet. Sans aucune auberge à l'horizon dans cette partie reculée de la forêt, mes compagnons et moi avons trouvé refuge sous un immense arbre millénaire.


Comme à son habitude, Aeri a allumé un feu pour nous réchauffer. Pendant ce temps, Thoran est parti à la chasse au lapin tandis que je me suis mise à la recherche d'herbes et de champignons comestibles. J'ai réussi à dénicher plusieurs champignons ainsi que quelques feuilles d'ail sauvage.


De retour au campement, Thoran est revenu avec trois lapins. Il en a donné deux à Aeri , ce dernier les ayant engloutit aussitôt, et a préparé le troisième pour nous. Il l'a disposé sur une branche qu'il a plantée dans le sol, laissant ainsi la viande cuire au-dessus du feu. Pendant ce temps, j'ai préparé les champignons et l'ail sauvage que j'ai disposés sur une pierre plate pour les faire cuire sur les braises. Ce repas promet d'être des plus réconfortants.


Alors que nous dégustons ce délicieux repas, une idée me vient en tête ! Je réalise que je ne connais pas grand-chose sur eux, et cela me dérange.


Me rappelant d'un jeu que je faisais avec Elyia quand nous étions enfants, je lance l'idée :


« Chacun notre tour, nous pourrions poser une question aux autres afin de nous connaître un peu plus, qu'en dites-vous ? »


Thoran approuve avec une motivation bien visible. Aeri, comme à son habitude, expire de l'air par les narines, ce que je prends pour un oui.


Thoran commence et lance la première question.


« Quel est votre plus beau souvenir dans cette vie ? »


Je réfléchis un instant, trouvant sa question compliquée.


« Eh bien, je crois que c'est la première fois où j'ai aidé ma mère à mettre au monde un nouveau-né. Voir les visages des parents si reconnaissants de ce cadeau que la vie leur fait. Voir un être prendre son premier souffle et découvrir le monde... C'était incroyable. »


Thoran me sourit à pleines dents, ce qui va à ravir avec son beau visage, lui donnant un air doux.


« Et toi, Aeri, quel est ton plus beau souvenir ? » lui demandé-je.


L'animal reste silencieux, je pense qu'il ne souhaite pas répondre, mais je me trompe, car à travers notre lien mental, il me répond :


« Une nuit d'été il y a plusieurs décennies. Je volais à travers les Montagnes Sacrées et les aurores d'Aeloria se sont mêlées à mon vol. Dans les étendues infinies des Montagnes Sacrées, alors que les aurores peignaient le ciel de leurs couleurs chatoyantes, j'ai ressenti une joie indescriptible. La sensation de voler, de planer au-dessus des sommets majestueux, baigné dans la lumière ondoyante des aurores, a rempli mon cœur de félicité. Chaque battement d'aile était une harmonie avec la nature, chaque mouvement une danse avec les étoiles. C'était un moment de pure magie, une communion avec l'univers tout entier. »


Voyant que je semble écouter le Driffon, Thoran s'étouffe dans sa barbe.


« Mais !!! Il te parle à travers la pensée ? » me demande-t-il. J'allais lui répondre quand soudainement les yeux du guerrier prennent une teinte d'étonnement et son regard se tourne vers celui d'Aeri.


« Il vient de me dire que puisqu'il m'a offert sa protection et moi des lapins, nous pouvons maintenant communiquer par la pensée, » explique-t-il.


Puis Thoran se tait et regarde à nouveau Aeri. Dans mes pensées, j'entends Aeri rire, ce qui m'étonne de sa part.


« Eh bien, ce guerrier est beaucoup plus doué que toi pour la télépathie, Yuna. » Offensée, je boude en jouant avec un bout de bois.


« Ce n'est pas grave, canaille, » me dit Thoran, « tu apprendras aussi. Puis Aeri vient de me traiter de guerrière émotive, donc je préfère ne pas pouvoir communiquer avec ce gros poulet. »


À ces mots, Aeri grogne en direction de Thoran, ce qui me fait éclater de rire, suivi par Thoran. Il me semble même entendre un léger rire à travers notre lien.


« Et toi, Thoran, quel est ton plus beau souvenir ? » je lui demande.


« Je dirais que c'est la dernière fois que j'ai vu ma mère, il y a des années, » répond-il. « Elle m'avait dit qu'elle était fière de moi et nous avions ri toute la soirée. C'est la dernière fois que je l'ai vue et le fait de savoir que nos derniers moments partagés étaient si chaleureux me soulage un peu de sa perte. »


Pensant moi-même à ma mère et trouvant son discours touchant, j'essuie rapidement une larme du revers de la main. Décidément, je suis beaucoup trop émotive.


« Et toi, Aeri, as-tu une question ? » je lui demande. « Nous continuerons ce petit interrogatoire demain, » nous dit-il à travers la pensée. « Il se fait tard et nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir. » Écoutant notre ami, nous trouvons chacun un coin qui semble confortable, ce qui semble compliqué sur ce sol terreux empli de rochers.


Thoran trouve rapidement le sommeil, ce mâle ronfle comme si une armée de Drinaroks se préparait au combat. Pour ma part, trouver le sommeil est plus compliqué. Je ne trouve pas de position confortable et je ne fais que me retourner.


« Viens t'installer près de moi, » me dit Aeri en ouvrant son aile pour que je puisse me blottir contre lui.


« Mais je ne vais pas t'utiliser comme coussin, voyons, ça ne se fait pas ! » protesté-je.


« Ça ne me dérange pas, » me répond-il. « Je préfère que tu sois contre moi plutôt que de t'entendre te tourner dans tous les sens. » Lâchant un petit grognement, je me lève et vais me poser timidement près du Driffon.


Je m'installe contre l'une de ses pattes, il me recouvre de l'une de ses ailes, qui est l'une des choses les plus douces que j'ai jamais senties. Blottie contre le Driffon, je ressens un mélange de chaleur et de sécurité. Son corps imposant émane une sensation de protection qui m'apaise profondément. L'odeur naturelle de ses plumes m'enveloppe, créant une atmosphère réconfortante. Sa présence apaisante me permet de relâcher toutes les tensions accumulées au cours de la semaine. Dans cet instant de quiétude, je me sens en harmonie avec le monde qui m'entoure, bercée par le doux souffle régulier d'Aeri. Sans m'en rendre compte, je sombre rapidement dans un sommeil paisible, bercée par la douceur de cette étreinte.


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