Dimanche 23 juin 2024

17 6 3
                                    

Je pensais que j'avais accepté ma situation. J'ai écopé de dix-huit mois de prison et il m'en restait seize à purgé, sans compter les éventuelles réductions de peine. Je laissais les jours passer les uns après les autres en attendant patiemment ma libération. Pourtant, tout a changé.

« Bon, ça c'est une décharge de responsabilité. En gros, ils ne seront pas responsables si jamais tu es blessé pendant le tournage.

Je signe en soupirant. Depuis ce qui me paraît être des heures, maître Heidi Caliber me fait signer des dizaines de papiers dans ce parloir sombre. Je n'en ai pas lu un seul mais je lui fais confiance. Après tout, c'est son métier. Une fois la décharge signée, Heidi la place sur la pile de droite - les papiers déjà signé - avant d'en prendre un sur la pile de gauche - les papiers que je dois signer. Malheureusement pour moi, elle ne semble pas baisser de niveau.

- Ça, c'est le droit à l'image. Ça stipule qu'ils ont le droit d'utiliser toutes captations effectuées sur le tournage sans exception mais sans atteinte à la dignité.

- Pendant combien de temps ?

- Quinze ans, reconductibles.

- Quinze ans ?! Et ça veut dire quoi « atteinte à la dignité » ? Quel est le barème ?

- Il n'y en a pas, c'est volontairement très flou. Ça veut dire que tu devras faire attention à tout ce que tu fais...

- Est-ce que tu peux demander des précisions là-dessus, Heidi ? Demandais-je en soupirant. J'aimerais éviter qu'on me voit... Enfin, tu vois quoi.

- Je l'ai déjà fait. Nous avons eu une concertation avec les autres avocats mais nous n'avons pas obtenu de réponses. En gros, soit tu acceptes, soit tu refuses mais il n'y a pas de négociation possible. Ce que je comprends, c'est que c'est sujet à interprétation mais ne t'en fait pas, je serais derrière toi et j'attaquerais au premier manquement.

- Je vois...

Je signe tout de même en soupirant.

- Tu as rencontré les autres avocats, alors ? Et les autres détenus ?

- Je ne peux rien te dire, Sofia...

Ça m'aurait étonné. Heidi me passe alors un autre papier en commentant :

- Ça, c'est ta clause de confidentialité. En gros, lorsque tu sortiras, tu auras interdiction de parler de ce qu'il s'est passé sur l'émission et surtout pas en négatif.

- Sinon quoi ? Tentais-je d'un air rebelle.

- Sinon, Doricom te fera un procès - que tu perdras - et tu leur devras quelques millions.

- Rien que ça...

- Ça, ce sont les règles du jeu. Vous serez quatorze et la moitié d'entre vous seront des civils. Leur but sera de démasquer les criminels. À chaque criminel interpellé, les civils remportent de l'argent. Si un civil se trompe, il est éliminé. À la fin du jeu, il n'en restera qu'un et, si c'est un prisonnier, il sera gracié.

- Gracié ? Aussi simplement que ça ?

- Ça ne sera pas simple, Sofia. Ce sera même dangereux, il ne faut pas que tu le prennes à la légère...

- Ce n'est pas le cas, crois-moi. J'ai juste du mal à comprendre comment c'est possible de pouvoir sortir de prison grâce à une émission de télé-réalité.

- J'allais y venir, dit Heidi en se munissant d'un autre formulaire. Ça, c'est la circulaire du ministère de la Justice.

- Ah, carrément...

RéinsertionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant