Chapitre 4

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Gabriel sursauta et baissa le son de sa télé. Qui vient me casser les couilles à une heure pareille ? se demanda-t-il en se levant. Il s'approcha de la porte et tourna la clé dans la serrure.

« Gabriel ! »

Cett voix qu'il connaissait si bien retentit en lui pour le transpercer comme une lame en plein cœur. Attal se figea, la main posée sur la poignée de métal froid.

« Je sais que tu es là, Gabriel, insista Jordan. Laisse-moi te voir !

- Va-t-en ! grogna Gabriel. Je t'ai dit que je ne voulais plus te voir.

- Je sais que tu ne le penses pas. Je le sens. Je sais que tu penses à moi comme je pense à toi. Je sais que ton corps réclame le mien et que ton cœur pleure mon absence. Je sais que je suis le seul pour toi, Gabriel.

- J'ai couché avec Emmanuel ! s'écria le premier ministre. J'ai couché avec Emmanuel et j'ai aimé ça. Tu te surestimes. Je n'ai pas tant besoin de toi. »

Il regrettait presque d'avoir dit ça. Il n'en pensait pas un mot.
Un silence pesant s'installa, si bien que Gabriel ne savait même pas si Jordan était toujours de l'autre côté de la cloison qui les séparait. Il soupira. Il se trouvait vraiment idiot d'avoir encore empiré la situation.

« Je ne t'ai pas trompé, déclara Jordan qui était resté là. Je n'ai rien fait avec Marine. Son message ne m'était même pas destiné. Par contre, toi, tu t'es tapé le président...

- Parce que c'était fini entre nous ! Et c'est toujours fini entre nous, Jordan. Je suis désolé, mais notre amour est impossible. Toi et moi, on est trop différents politiquement.

- D'accord, nous ne sommes pas dans le même parti, répondit Bardella. Et alors ? Qu'est-ce qui change ? Nous sommes tous les deux racistes et islamophobes. Nous aimons tous les deux la bourgeoisie. Nous aimons tous les deux saucer les riches, laisser les pauvres vivre dans la rue et détruire la planète. Qu'est-ce qui est si différent ? »

Gabriel ne sut quoi répondre à son ancien amant. Après tout, il avait raison.

« Peu importe, Jordan. C'est terminé. Maintenant pars, s'il te plaît. »

Jordan se tut une nouvelle fois pendant de longues secondes.

« Je m'en vais alors. Je t'aime, Gabriel. »

Attal écouta les pas de Jordan s'éloigner. Il pouvait sentir son visage brûler. Il n'avait jamais entendu Jordan prononcer ces mots. Pourquoi fallait-il qu'il les dise maintenant ? Ils lui faisaient tellement de mal, parce que Gabriel aurait aussi aimé les dire lui aussi.
Alors qu'il était resté adossé contre le mur, de nouveaux coups retentirent contre la porte quelques minutes plus tard. Gabriel fronça les sourcils.

« Je t'ai dit de partir ! hurla-t-il. Laisse-moi !

- Mais enfin, Gaby... De quoi tu parles ? répondit la voix.

- M-Monsieur le président ?

- Je peux entrer ? »

Le premier ministre ouvrit avec une certaine hésitation. Emmanuel pénétra dans le salon.

« Qui était là ? demanda-t-il

- Personne n'est entré.

- Qui était à la porte ?

- Ça ne vous regarde pas. Qu'est-ce que vous faites là ? À une heure pareille, en plus... »

Le président se retourna pour faire face à Gabriel et attrapa son menton.

« Brigitte dormait. J'avais envie de te voir, alors je suis venu. »

Gabriel savait pourquoi Emmanuel était là.

« Monsieur le président...

- Tu fais exprès de dire ça pour me séduire ? » grogna Emmanuel en levant un sourcil.

Gabriel secoua la tete. Emmanuel arracha sa chemise, qui lui avait probablement coûté un SMIC, pour dévoiler son torse parsemé de poils bruns. Les boutons de plastique tombèrent un à un sur le sol, rebondissant, roulant et s'éparpillant aux quatres coins de la pièce.

« Ne me prends pas pour un con, Gabriel. Je vais te donner ce que tu veux. Au fait... »

Le président approcha ses lèvres de l'oreille du premier ministre.

« Tu crois que je n'ai pas remarqué que Matignon puait le shit ? murmura-t-il. Si tu ne veux pas que ça se sache comme pour ce petit dealer de pacotille de Boyard, tu as intérêt à être un bon garçon. »

Gabriel s'en fichait. Il venait de tout gâcher une nouvelle fois avec Jordan, alors tout ça n'avait plus d'importance. Emmanuel pouvait bien faire ce qu'il voulait.

« Je serai sage, Monsieur le président. Prenez-moi. »

L'urne ou l'amour [Bardella x Attal]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant