POLITIQUEMENT INJUSTE T.2 (ATTAL X BARDELLA)

3. Flashback

ilomilo - Billie Eilish

Point de vue Gabriel...

Je suis assis à mon bureau, le regard perdu dans les papiers éparpillés devant moi. Les dossiers s'accumulent, mais ma concentration me fait défaut. Mes pensées dérivent, m'entraînant loin de l'instant présent, vers un souvenir que j'essaie désespérément d'oublier.

Jordan et moi étions assis sur le toit de notre immeuble, une couverture étalée sous nous. La nuit était claire, les étoiles brillant intensément au-dessus de Paris. C'était l'un de ces rares moments de calme que nous partagions, loin des intrigues politiques et des responsabilités écrasantes.

- Gabriel, commença Jordan en me fixant, ses yeux bleus perçant l'obscurité. As-tu déjà pensé à disparaître ?

Je le regardai, surpris par sa question.

- Disparaître ? Qu'est-ce que tu veux dire ?

Il prit une profonde inspiration avant de continuer.

- Je veux dire... tout laisser derrière. Partir sans prévenir, sans laisser de trace. Commencer une nouvelle vie, quelque part où personne ne nous connaît.

Je secouai la tête, tentant de comprendre où il voulait en venir.

- Jordan, tu sais bien que ce n'est pas si simple. Nous avons des responsabilités, des engagements. On ne peut pas simplement tout abandonner.

Il sourit tristement.

- Parfois, j'ai l'impression que c'est la seule solution pour échapper à cette pression incessante. Ne ressens-tu jamais ce besoin de tout quitter ?

Je pris sa main dans la mienne, cherchant à le rassurer.

- Oui, parfois. Mais je ne pourrais jamais te quitter, Jordan. Tu es tout pour moi.

Il serra ma main plus fort, comme s'il cherchait du réconfort.

- Et si on le faisait ensemble ? Juste toi et moi, loin de tout ça. On pourrait être heureux, sans avoir à se soucier des attentes des autres, et on s'aimerait sans les caméras et les articles.

Je soupirai, réalisant à quel point il souffrait de cette présence médiatique.

- Jordan, je te comprends. Vraiment. Mais ce n'est pas réaliste. Nous avons des responsabilités ici. Et puis, partir ne résoudra pas nos problèmes. Ils nous suivront, peu importe où nous allons.

Il resta silencieux un moment, les yeux fixés sur l'horizon.

- Peut-être. Mais parfois, je me demande si ce poids ne finira pas par nous écraser.

Je le regardai, sentant la douleur dans ses paroles.

- Nous devons être forts, Jordan. Ensemble, nous pouvons surmonter n'importe quoi. Je te promets que je serai toujours là pour toi.

Il tourna son regard vers moi, une lueur d'espoir dans ses yeux.

- Tu promets ?

Je hochai la tête.

- Je promets. Nous trouverons un moyen de traverser tout ça. Ensemble.

Le souvenir me laisse un goût amer dans la bouche.

À l'époque, je n'avais pas compris à quel point Jordan se sentait acculé, désespéré. Peut-être aurais-je dû prêter plus d'attention à ses paroles, à ses craintes. Peut-être que, si j'avais été plus attentif, les choses auraient été différentes.

Il n'y aurait pas eu cette accumulation.

La porte de mon bureau s'ouvre brusquement, me tirant de mes pensées. Valérie entre, un tas de courrier à la main. Elle sourit en me voyant, son visage chaleureux apportant un peu de lumière dans ma journée sombre.

- Gabriel, tu as reçu du courrier, dit-elle en déposant les enveloppes sur mon bureau. Tu semblais perdu dans tes pensées. Tout va bien ?

Je hoche la tête, essayant de chasser les souvenirs douloureux.

- Oui, ça va. Juste un peu submergé par tout ce travail.

Elle s'assoit sur le bord de mon bureau, son regard scrutateur.

- Tu penses encore à lui, n'est-ce pas ?

Je soupire, incapable de mentir.

- Oui, c'est difficile de ne pas y penser. Chaque jour, quelque chose me rappelle Jordan.

Valérie pose une main réconfortante sur mon bras.

- C'est normal, Gabriel. La perte d'un être cher laisse une marque indélébile. Mais tu ne devrais pas te laisser submerger par la culpabilité.

- Je sais, dis-je doucement. Mais c'est plus facile à dire qu'à faire.

Elle ouvre une des enveloppes, jetant un coup d'œil au contenu avant de me la tendre.

- Tu devrais lire ça. Ça pourrait t'aider à te concentrer sur autre chose.

Je prends l'enveloppe et en sort le document. C'est une invitation à une conférence sur les nouvelles politiques de sécurité. Je grimace, peu enthousiaste à l'idée de devoir assister à un autre événement formel.

- Merci, Valérie, dis-je en posant l'invitation sur la pile de courrier. Je vais y réfléchir.

Elle me regarde avec insistance.

- Tu ne peux pas continuer à te laisser consumer par le passé. Tu as besoin de te concentrer sur le présent, de trouver un moyen de continuer à avancer.

Je sais qu'elle a raison, mais c'est une bataille constante.

Valérie se lève et se dirige vers la porte.

- N'hésite pas à m'appeler si tu as besoin de parler. Je suis toujours là pour toi.

Je la regarde partir, un mélange de gratitude et de tristesse dans le cœur.

Je feuillette distraitement le reste du courrier, la plupart étant des publicités et des documents de routine. Puis, une enveloppe attire mon attention.

Elle est différente des autres, d'un papier épais et sans aucun nom ni adresse de retour. Juste mon prénom, "Gabriel", écrit d'une écriture soignée.

Un frisson me parcourt l'échine alors que j'ouvre délicatement l'enveloppe.