Laisse moi vivre

Chapitre 14

POV Sarah :

— Attends, attends, attends... Répète-moi ça encore une fois ?

Je levai les yeux au ciel devant l'expression indescriptible de ma meilleure amie. Ce matin, je lui avais envoyé un message pour lui retracer, dans les grandes lignes , ce qui s'était passé la veille. Sa réponse fut sans détour : « On doit parler, ma star. Prépare du café. » Maintenant, elle me fixait avec une lueur de malice dans le regard, ses boucles blondes effleurant la table.

— Sarah Reyes, tu te rends compte de ce que tu viens de me dire ? murmura-t-elle. Aylan Scott, le chanteur le plus sexy du XXIe siècle, celui qui fait la une de tous les polaroïdes, a pris ta défense hier soir au Night'Shot ?!

Ses cils papillonnèrent comme ceux d'un enfant découvrant un cadeau géant sous le sapin de Noël. Je ne pus m'empêcher d'esquisser un sourire amusé. Mais derrière ce sourire, les plaies de la veille se rouvrirent. Paige ne connaissait pas toute l'histoire, l'envers du décor restait caché. Si elle découvrait la vérité ça la détruirait. Et moi avec.

Certaines choses devaient rester dans l'ombre pour préserver un peu de lumière.

— Il m'a aussi demandé si j'étais libre cet après-midi, murmurai-je innocemment avant d'avaler une gorgée de mocha brûlant. Je faillis le recracher lorsqu'elle se redressa brusquement, les yeux écarquillés.

Elle resta ainsi, immobile, figée. Pendant un instant, j'eus l'impression que le bruit ambiant de la cafétéria de l'hôpital s'était arrêté.

— Tu te fous de moi ! s'exclama-t-elle finalement.

Je sentis quelques regards curieux se tourner vers nous, et je fis les gros yeux à ma meilleure amie, le visage empourpré de honte.

— Biiitch, t'aurais dû commencer par me dire que tu comptais te taper le plus canon des millionnaires, ajouta-t-elle à voix basse.

Cette fois-ci c’est l'entièreté de mon épiderme qui rougit.

Elle ne pouvait pas être plus loin de la vérité. Mon âme avait été souillée, mon corps bafoué, et l'idée d'une relation charnelle m'était insupportable. Les paroles de Paige résonnaient dans ma tête, légères en apparence mais lourdes de conséquences. Elle ne pouvait pas savoir. Comment aurait-elle pu ? J'esquissai un sourire, un masque fragile qui peinait à dissimuler la tempête intérieure.

— Paige, soufflai-je en tentant de garder une voix légère, mais le ton de mes propres mots me sembla faux.

— Quoi ? répliqua-t-elle avec une moue de petite fille.

Je secouai la tête, résignée. Je connaissais assez Paige pour savoir qu'essayer de discuter sérieusement avec elle dans cet état d'excitation revenait à tenter de contenir un ouragan dans une bouteille. Ma grand-mère et elle partageaient ce grain de folie, cette capacité à transformer chaque instant en un moment de pure spontanéité. Je les admirais pour ça, pour la couleur qu'elles apportaient à la vie.

De toute façon, Aylan m'avait fait promettre de ne rien divulguer sur ses intentions avant que tout soit terminé.

Je me levai rapidement, avalai le reste de mon mocha désormais tiède et embrassai ma meilleure amie.

— Tu m'envoies des photos, hein ? me cria-t-elle avant que je ne disparaisse dans les couloirs immaculés de l'hôpital.

Quelques minutes plus tard, dans les vestiaires, mon téléphone vibra plusieurs fois dans ma poche. Je soupirai, anticipant déjà l'expéditeur. D'une main habile, je sortis mon portable tout en retirant ma blouse de service. Une série d'émojis d'aubergines inondait mon écran. Alors que je pensais que Paige s'était enfin calmée, un nouveau message apparut.