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Gabriel n'a pas dormi de la nuit. Les résultats du premier tour passaient en boucle sous ses paupières fermées. Alors il a tenté de garder les yeux ouverts. Parce que si le Rassemblement National venait à être élu, c'est non seulement sa réussite professionnelle mais également sa vie qui s'effondreraient. Ne pas dormir pour fuir les cauchemars de peur qu'ils ne deviennent la réalité, c'est ce que le premier ministre s'est répété pendant que les âmes apaisées étaient parties rejoindre Morphée ; la sienne trop tourmentée pour trouver le sommeil.

Ce matin, Gabriel est parti aux aurores de chez lui. Il ne trouvait pas l'utilité à rester dans son appartement quand le sommeil semblait lui échapper. Alors dès lors que le soleil a pointé le bout de son nez, il s'en est allé. Parce qu'il sera plus utile au bureau que dans son salon à ressasser les événements.

Il est maintenant assis à son bureau et des tonnes de papiers sont éparpillés sur la surface, à perte de vue. Ces élections vont le rendre fou jusqu'au bout. Des journaux affichant la défaite du parti présidentiel, d'autres annonçant la victoire de l'extrême droite. Tout ça envoie un frisson dans le corps du premier ministre et il balaye les magazines d'un coup de bras.

Gabriel doit préparer sa campagne électorale. Parce que cette dernière semaine est cruciale et qu'il doit tout mettre en œuvre pour l'emporter. Ou du moins : faire barrage au RN.

Dans quelques jours, il ira faire le tour des villes pour présenter son programme, communiquer et réunir des partisans pour le second tour.

Et parce que c'est une partie extrêmement importante pour tenter de gagner des suffrages et remporter les élections, le stress est de mise. Il a envahit le quotidien du premier ministre depuis qu'il est entré dans la politique, mais est intense depuis sa campagne électorale.

Parce que le Rassemblement National ne peut pas gagner les législatives, qu'il est contre les valeurs de son parti, et contre les valeurs humaines.

Gabriel attrape la tasse de café sur le coin du bureau et porte ses lèvres à la porcelaine. Son visage se crispe de dégoût : le breuvage est froid. Il soupire et passe une main dans ses cheveux. Il est fatigué, épuisé même.

La journée s'est déroulée de cette manière : lire le courrier, remplir les papiers, organiser et préparer les réunions, répondre au téléphone qui ne faisait que sonner.

Le premier ministre était tellement plongé dans son travail qu'il n'en a pas remarqué le soleil décliner dans le ciel. Les rayons de l'étoile de feu passent à travers la fenêtre et s'écrasent aux pieds de Gabriel qui n'y prête pas attention.

Ce qui lui fait relever la tête, c'est la porte de son bureau qui s'ouvre discrètement.

"Monsieur le premier ministre," annonce une voix féminine. "Je suis désolée de vous déranger mais vous ne m'entendiez pas toquer."

Gabriel lui sourit, un petit sourire mais qui semble rassurer la femme qui continue.

"Monsieur le président vous demande dans son bureau, c'est très important."

Gabriel hoche la tête et ferme son ordinateur. Il a mal à la tête, son crâne est sous pression et il voit flou d'avoir passé la journée sur l'écran.

Il remercie l'assistante qui lui offre un sourire crispé et Gabriel sent que ce n'est pas bon signe. Il traverse les couloirs de Matignon et passe les portes qui mènent à l'extérieur. Les graviers bruitent sous ses chaussures tant il marche rapidement. Il arrive à la voiture qui l'attendait et ouvre la portière avant de se glisser sur les sièges arrières.

Le trajet est silencieux dans les rues de Paris. Gabriel est sur son téléphone et c'est le chauffeur qui le sort de ses pensées pour lui affirmer qu'ils sont arrivés. Le premier ministre le remercie et ouvre précipitamment la porte avant de se hâter dans la cour de l'Élysée.

Amour Éphémère (Attal x Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant