CHAPITRE 11 : Judith

18 2 17
                                    





Le lendemain comme prévu j'ai pu récupérer les clés du logement de Monsieur Hernandez. Je lui ai payé trois mois de salaire avec ce que j'ai gagné de la montre et je suis tranquille même si ma bonne conscience m'insulte encore d'avoir osé faire ça.

Mais aux grands maux les grands remèdes, non ?

Ce logement est parfait, suffisant même. Je ne m'attendais pas à grand-chose et finalement il allie charme et modernité. L'espace lumineux et bien agencé comporte des grandes fenêtres qui laissent entrer la lumière naturelle. La décoration est simple mais soignée, mêlant des touches de bois chaleureux et des couleurs douces créant une atmosphère très accueillante. Le canapé comporte deux places et ne s'allonge pas mais il suffit. Le couloir de mon appartement mène à une chambre avec lit et armoire tandis que de l'autre côté en face de la chambre se trouve la salle de bains.

Mais ce que je préfère, c'est la terrasse côté séjour. Un petit endroit avec un salon de jardin et une table y prônent.

Un endroit parfait pour visualiser le bas de mon immeuble, au cas où...

Au cas où.

Je peux y fumer et passer mes soirées détentes à regarder les étoiles également et ça, ça n'a pas de prix.

J'ai déjà déposé ma valise dans la chambre mais je ne compte pas vraiment la défaire puisque je ne reste que très peu de temps. Si je dois partir en coup de vent, ma valise sera prête.

C'est une habitude que j'ai prise et qui ne me lâchera pas de sitôt.

Je me pose dans le canapé et mes yeux parcourent encore l'ensemble du logement qui sera le mien un petit temps. C'est de loin le meilleur logement que j'ai pu dégoter pour une somme similaire à celles que je déboursais à New York et dans les autres plus grandes villes. Généralement, j'avais le droit à des logements de douze mètres carrés à peine habitables pour le même prix.

Là, j'ai un vrai logement.

Le visage de la voisine que j'ai croisé en arrivant me revient en mémoire et me prouve que ça aussi, c'est très différent de Denver ou New York. Lorsqu'elle m'a vu, elle a de suite compris que j'allais dans un appartement du bâtiment et m'a salué de la meilleure des façons. Elle m'a souhaité la bienvenue en ne sachant même pas si je restais plus de deux jours ou non et ça, c'est flatteur.

Parce qu'avec ces petits détails, je me sens utile dans ce monde. Je me sens presque à ma place.

Je n'ai pas cherché à faire la conversation avec cette dame dont j'ai déjà oublié le prénom parce que j'étais gênée.

Pas parce que j'avais peur de ma fuite.

Et cette prise de conscience fait bouger mon corps pour me redresser droit dans le canapé, les mains sur la tête qui est baissée.

— Rien de bon ne ressortira de ma présence à Portland...

Mon chuchotement est vain car il n'en changera pas les faits. Mais le dire à voix haute me permet plus rapidement d'en faire inventaire des changements opérés depuis que je suis descendue de ce bus.

En bref : le changement me fait peur.

Pour autant, je ne sais pas comment le gérer. Surtout lorsqu'aujourd'hui, c'est l'anniversaire de la mort d'Harper.

***

Les deux jours sont passés relativement vite, je n'ai pas fait grand chose sauf me balader en ville pour changer mon téléphone jetable.

Run AwayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant