Chapitre 9 : Le Grimoire Moche

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De retour au bureau après notre petite balade dans les égouts magiques de Chicago - une expérience que je ne recommanderais pas, même à mon pire ennemi, à moins qu'il n'ait un fétiche pour l'odeur de décomposition mêlée à des relents de magie douteuse - nous nous penchons sur notre trouvaille : un vieux grimoire couvert de symboles étranges. L'excitation de Zara n'a d'égale que mon scepticisme. Ça promet.

Le bureau est un chaos organisé, reflet parfait de l'état actuel de Chicago post-révélation magique. Des dossiers s'empilent sur chaque surface disponible, certains lévitant légèrement quand personne ne regarde, comme s'ils essayaient discrètement de s'échapper. Un elfe stagiaire passe en courant, poursuivi par ce qui ressemble suspicieusement à un rapport vivant, ses pages battant l'air comme des ailes de papier. Les téléphones sonnent sans arrêt, leurs sonneries parfois remplacées par des miaulements de chat ou des coassements de grenouille, selon l'humeur du sort de communication du jour.

L'odeur de café brûlé se mêle à celle d'encens exotique et de ce que je soupçonne être une potion ratée concoctée par le département de criminalistique magique. Les murs, autrefois d'un beige terne, sont maintenant ornés de runes de protection qui brillent doucement, changeant de couleur en fonction de l'activité magique ambiante. Actuellement, elles sont d'un orange vif inquiétant.

Zara a installé le grimoire sur mon bureau, poussant sans ménagement mes affaires personnelles. Ma tasse se retrouve précairement perchée sur une pile de dossiers non classés, menaçant de tomber à chaque fois que quelqu'un passe trop près.

— Tu sais, je dis en observant Zara s'affairer autour du livre, il y a une raison pour laquelle on a des salles d'interrogatoire. Pour isoler les trucs potentiellement dangereux. Comme, je ne sais pas, un livre maudit trouvé dans les égouts ?

Zara lève à peine les yeux de son travail. Ses cheveux, habituellement d'un noir profond, semblent avoir pris des reflets violets depuis notre aventure souterraine. Je me demande vaguement si c'est un effet secondaire de la magie des égouts ou si c'est juste la façon dont la lumière joue sur eux.

— Ce n'est pas un livre maudit, Mike. C'est un artefact magique d'une valeur inestimable. Un recueil de connaissances anciennes qui pourrait révolutionner notre compréhension de la magie.

— Ouais, et moi je suis la reine d'Angleterre, je rétorque, scrutant le grimoire avec méfiance. Sérieusement, ce truc a l'air aussi inoffensif qu'un nid de serpents venimeux sous acide.

Le grimoire, comme pour me donner raison, émet un grondement sourd. Une brume violacée s'échappe de ses pages, formant des volutes inquiétantes dans l'air avant de se dissiper. Super. Parce que ce dont j'avais vraiment besoin aujourd'hui, c'était d'un livre avec des problèmes digestifs.

Zara commence son travail de déchiffrage, murmurant des incantations et traçant des symboles dans l'air. Des étincelles multicolores dansent au bout de ses doigts, s'enroulant autour des pages du grimoire comme des serpentins lumineux. Les heures passent, interminables.

Je remplis des rapports, essayant d'expliquer de manière cohérente comment une simple enquête sur un vol de miroir nous a menés à patauger dans des égouts magiques et à nous battre contre des rats mutants. Je joue au solitaire sur mon ordinateur, qui a mystérieusement commencé à léviter à quelques centimètres du bureau, rendant la tâche de cliquer sur les cartes étrangement complexe. Je compte les taches au plafond, dont certaines semblent changer de forme quand je les fixe trop longtemps. Deux fois.

Finalement, l'ennui l'emporte sur ma prudence. L'horloge murale, dont les aiguilles tournent parfois dans le sens inverse selon son humeur, indique que cela fait presque quatre heures que nous sommes penchés sur ce bouquin maudit.

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