Mardi 5 Mars 2002.
L'introduction avait été aussi rapide que brutale. Une première série de mots soigneusement choisie pour se présenter et les raisons obscures de leur venue, qu'il n'entendit que partiellement.
L'homme prétexta avoir été réveillé et ne pas avoir envie de faire rentrer qui que ce soit chez lui à une heure qui dépassait l'entendement. En se cachant derrière sa connaissance de la Loi et le fait qu'il disposait bel et bien de ce droit.
Face au refus, il ne se laissa pas atteindre et renouvela la demande en se montrant un peu plus précis et plus insistant. La carte professionnelle fit son petit effet et leva une grande partie des verrous de la conversation.
L'homme les laissa finalement entrer, les mena jusqu'à la salle principale de son trois-pièces meublé dans un style plutôt ancien et leur proposa même une tasse de café froid.
Certain qu'il ne retrouverait pas son lit avant un très long moment, il accepta volontiers. La femme qui l'accompagnait hocha la tête et confirma également qu'il s'agissait d'une bonne idée.
L'homme fit l'aller-retour, sortit un thermos de son frigo et, soudainement, sans rien annoncer de ses intentions, se précipita vers la fenêtre la plus proche qui donnait sur le parking de la résidence. Les bruits de moteur et les cris en provenance de l'extérieur incitèrent le propriétaire de l'appartement à voir ce qui se passait. La bande de jeunes auquel il avait décidé de se confronter venait de réunir et comptait bien reprendre son programme des derniers jours. Faire la bringue et le plus de bruit possible jusqu'au bout de la nuit.
En réponse à leurs regards méfiants, l'homme se tourna dans leur direction et expliqua sans retenue que ce groupe de cas sociaux se retrouvaient tous les soirs sous leurs volets pour boire des bières, faire les cons et organiser leur nuit de débauche en veillant scrupuleusement à développer le plus de boucan possible. L'homme prétendit les connaître suffisamment pour pouvoir les identifier mais ne pas avoir alerté les autorités par crainte d'éventuelles représailles.
Après deux dizaines de secondes d'observation et autant de commentaires déplacés sur la jeunesse, son incapacité à affronter les responsabilités de la vie et le fait que tout était plus simple avant, l'homme retourna à ses « invités » et s'assit à la table qu'ils occupaient.
Ils revinrent aux raisons de leur visite nocturne et à la pénible nouvelle qu'ils s'étaient permis de lui communiquer cinq minutes auparavant.
La nouvelle, Marco Oliveri semblait l'avoir reléguée au deuxième plan et ne pas avoir pris conscience que les lieutenants de police Mike Moore et Alicia Abre s'étaient déplacés jusqu'à son domicile pour parler d'un homicide et que la victime n'était pas n'importe qui puisqu'il s'agissait de sa concubine Maria Trivoli.
Mike répéta le nom à deux reprises et analysa les réactions qu'il suscitait.
Dès le premier SMS en provenance de Luciano Galbani, il avait automatiquement associé l'acte au « tueur » et écarté toutes les autres possibilités. Voir Marco Oliveri ne pas faire preuve d'une grande émotion, ou juste d'une réaction, l'intrigua et l'indisposa. Il n'avait pas jaugé nécessaire d'accorder un rôle précis à l'homme visité et se demanda, le temps d'un instant, s'il n'avait pas été un peu trop vite en besogne.
Dans le dossier laissé à leur disposition pour préparer l'interrogatoire, l'agent Douglas Sirkit, rédacteur du soir, avait décrit le profil d'Oliveri de manière plutôt succincte.
Mike avait relevé l'essentiel et comblé les trous au fur et à mesure.
D'après Sirkit, Oliveri n'était pas connu des forces de police et ne possédait aucune occurrence dans les fichiers. Pas de rappel à la Loi, de main courante ou même de contravention de stationnement. A l'exception du conflit générationnel qu'il livrait avec les ados de son quartier, il entretenait de bonnes relations avec le voisinage, le fréquentait aussi régulièrement que possible et s'accordait même le luxe de payer ses impôts avant la date butoir. Pas de soucis à ce niveau-là.
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LA REVANCHE DE L'EMPEREUR
Misterio / SuspensoRome, Mars 2002. Sept meurtres et toujours pas le moindre indice sur l'identité du responsable. Lassé d'avoir systématiquement un temps de retard sur cet assassin cruel et rusé, le commissaire-divisionnaire Luciano Galbani, grand patron de la Brigad...