Chapitre 2 : L'Enfant Perdue

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Quand elle est partie, ma mère a emporté avec elle le peu de lumière qui restait dans notre maison. Mon père, déjà détruit par sa propre trahison, s'est enfoncé dans un abîme dont il n'est jamais sorti. Il n'était plus cet homme aimant et fort que j'avais autrefois admiré. La culpabilité et le chagrin l'ont submergé, le noyant dans l'alcool et l'irresponsabilité. Il était là, physiquement présent, mais son esprit s'était échappé, nous laissant seuls, ma sœur et moi, livrés à nous-mêmes dans un monde où plus rien ne faisait sens.

Dans sa détresse, ma tante, la grande sœur de mon père, a pris une décision. Elle pensait alléger le fardeau en récupérant ma petite sœur, cet être si fragile que je protégeais de toutes mes forces. Elle l'a emmenée, pensant bien faire, croyant peut-être que cela soulagerait mon père. Mais personne n'a compris ce que cela signifiait pour moi. Ma petite sœur, celle que j'aimais plus que tout, celle que je veillais comme un trésor, m'avait été arrachée.

J'étais l'aînée, celle sur qui tout reposait, celle qui devait rester, supporter et survivre à la place de ceux qui s'étaient éloignés. Mon cœur s'est déchiré le jour où j'ai vu ma petite sœur partir. Ce n'était pas seulement une séparation physique, c'était une rupture brutale avec l'unique lien qui m'apportait encore un peu de douceur dans cette tempête. Elle était ma lumière, mon refuge, et soudain elle n'était plus là.

Mon père, plongé dans l'alcool, ne s'en est jamais rendu compte. Il ne voyait pas la douleur qui me rongeait, il ne comprenait pas que son irresponsabilité nous avait tous séparés. En tant que fille aînée, j'étais condamnée à rester avec lui, à porter le poids de ses erreurs et de sa tristesse. Chaque jour était une bataille pour garder un semblant de normalité, pour masquer cette solitude profonde qui grandissait en moi.

Je me suis retrouvée, seule avec mon père, mais j'étais devenue l'adulte. Je ne pouvais plus être cette petite fille qui pleurait pour sa sœur, qui réclamait sa mère. Mon rôle était désormais de veiller sur lui, de m'occuper d'un homme qui n'était plus capable de s'occuper de lui-même, tout en portant en moi l'absence douloureuse de ma petite sœur.

Et même si la distance nous séparait, mon amour pour elle restait intact. Il battait dans chaque battement de mon cœur, dans chaque souffle que je prenais. J'avais perdu l'être que je protégeais, mais cet amour inconditionnel ne s'éteindrait jamais.

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