Chapitre 11

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C'est étrange, tous ces fourmillement qui parcourent l'intégralité de mon corps, cette sensation que je connais que trop bien où tout se brise malgré les ambitions qui me maintiennent en vie, qui m'empêche de me noyer sous cet abîme qu'est l'injustice.

Mais qu'est-ce qui me retient maintenant ?

C'est la question qui me hante depuis mes jours derrière les barreaux, peu de temps après le discours du roi, l'assemblée s'est dissoute et deux gardes m'ont conduit dans une petite prison, composée de quatre cages seulement et étrangement modernes, avec un lit et une petite table. Ce n'est pas du luxe mais c'est bien plus agréable que de passer son temps sur la pierre froide. J'ai plus de chance cette fois-ci.

Trois jours se sont écoulés entre ses murs et mon cauchemar recommence, je suis assis paresseusement sur le sol, mon dos appuyé contre le bois du lit et pense. C'est ma seule occupation.

Je ne me suis pas encore résigné, je n'arrive pas à accepter le fait que tout est fini. Mes doigts caressent le pendentif qui repose entre mes clavicules, comme pour me rassurer quand un bruit se fait entendre. Je m'empresse de le passer sous le tissu fin de ma chemise noire et mon regard s'ancre un peu plus dans le mur d'en face.

On pousse une lourde porte en bois, celle que j'ai emprunté trois jours plus tôt et on la referme. Des bruits de pas dans ma direction, ils sont plusieurs. Depuis que je suis ici je me distrait en essayant de deviner le nombre de garde qui traverse le couloir, mais le jeu s'est vite arrêté quand j'ai compris qu'une seule et unique personne approchait pour m'apporter de quoi manger.

Aujourd'hui c'est différent et ce n'est pas l'heure du dîner.

Même si ma position ne montre aucune résistance, je reste sur mes gardes. Mes poings et ma mâchoire se serrent quand cette envie de vomir me reprend. J'ai aussi développé une certaine angoisse depuis mes captivités, comme quoi je ne me suis pas autant endurci que je le pensais.

Tandis qu'ils approchent, je me relève, ne voulant pas me montrer plus faible que je ne le suis déjà. Je dois être près si une quelconque attaque est prévue, ils ont peut-être enfin compris que je ne parlerais pas.

Collé contre le mur et caché grâce à l'obscurité, les torches apparaissent en premier dans mon champ de vision. Mais pas que. Il est là lui aussi. Ma haine se décuple dès qu'il pose son regard dédaigneux sur moi et je sens que ça s'aggrave. Un de ses soldats ouvre la cellule avec de vieilles clés et se pousse sur le côté pour laisser passer leur général. Il ferme derrière lui et leur demande de l'attendre près de l'entrée des cachots.

Sa voix grave résonne entre les pierres et son dos s'échoue contre la grille, les bras croisés et son aura froide habituelle qui emplit l'espace. Il semble me détailler, il commence par le bas de mes jambes avant de remonter sur mes hanches puis mon torse.

Le long de mes cuisses, mes doigts sont crispés sur le tissu de mon pantalon noir, l'empoignant comme si son regard voyait à travers. Je ne détourne pas le regard, ce serait une preuve de faiblesse et je ne lui accorderais pas ce privilège.

Alors qu'on se défiait du regard depuis de longues minutes déjà, sa voix rauque retentit et me fait frissonner.

- Je t'ai sauvé la vie, une seconde fois.


Je déglutis, il n'a pas tord. J'en cherche d'ailleurs toujours la raison. Voyant que je ne réponds pas il continue son monologue.

- J'aurais dû vérifier les fenêtres ce soir-là, c'était une négligence de ma part.

Je pensais d'abord qu'il utilisait l'ironie pour se moquer un peu plus de mon sort, mais ses sourcils froncés et ses yeux fuyant les miens pour fixer le mur sur lequel je suis appuyé m'assure du contraire. Il à fait une erreur et cela lui semble inconcevable.

- Mais tu as été assez stupide pour revenir.

Lui répondre me démange et j'avance d'un pas, captant de nouveau son regard. Je me tiens droit, la tête haute comme si nous étions égaux. A vrai dire non, nous ne le sommes pas.

Moi je ne suis pas un monstre.

Est-ce que sa phrase est ironique ? Est-ce qu'ils pensent tous que nous agissons de manière insensée, sans raison ?

Je retiens un rire amer et formule mes mots.

- Stupide..? N'avez vous toujours pas compris ?

Ses sourcils s'arquent un peu plus, de manière très légère et presque imperceptiblement mais je le remarque quand même. Il laisse entrevoir une pointe de confusion puis replace son masque froid sur le visage, celui qu'il utilise pour se désintéresser de tout.

Je fais un pas de plus et ma haine parle avant moi.

- Si vous vous attaquez à nous, nous riposterons. Si nous brûlons, vous brûlerez avec nous.

Il souffle du nez et se redresse avant de faire un pas lui aussi. Seul un dernier nous sépare, et même si mon âme me hurle de reculer tant cette proximité me consume de l'intérieur, je tiens bon.

Ma tête se redresse pour ne pas couper l'échange et ses pupilles contrastent avec les miennes, me paralysant sur place.

Aucune faiblesse Aryan, aucune faiblesse.

Son souffle s'échoue contre mon front quand il me répond dans un murmure.

- Vous allez tous brûler, vous embraser jusqu'à ce qu'il ne reste plus aucun d'entre vous. Votre sort est scellé Aryan. Tant que la couronne subsistera, vous ne survivrez pas.

Mes yeux s'arrondissent et ma respiration se bloque, je recule maladroitement pour m'éloigner de ce qu'il vient de dire mais sa main s'enroule durement autour de mon poignet, m'empêchant de fuir. Il se penche davantage sur moi et ses doigts marquent ma peau.

- Tu es ici et tu dois maintenant choisir, c'est la vie ou la mort.

Je me perds, mes pensées fusent à toute vitesse et un brouillard s'installe autour de moi, plus rien n'est clair. Plus rien n'a de sens.

- Ta place est ici maintenant. Murmure t-il.

Lentement, ses doigts libèrent mon poignet et il recule. Son regard ne me quitte pas.

Qu'est-ce qui se passe, pourquoi tout s'enchaîne aussi vite ? Pourquoi ai-je la vie sauve, pourquoi moi et pas les autres ?

Je relève la tête vers lui et remarque à peine le soldat lui donnant un objet à travers les barreaux avant de retourner à sa place initiale.

Me faisant de nouveau face, il tend les mains vers moi avec des menottes composées de trois anneaux en or, un plus grand que les deux autres et d'une fine chaîne qui les relie entre eux. J'assimile enfin ce qui est entrain de se passer.

Ma réaction ne le surprends pas quand je tente de le contourner pour courir vers la sortie, la respiration haletante. Sans effort, il m'attrape la taille au passage et me plaque contre la grille, un gémissement de surprise et de douleur m'échappe et ses hommes sont déjà près à me trancher d'un coup de lame dans le couloir. Je me débats mais en vain.

Il serre mes deux bras dans une main quand il entoure un poignet de chaque avec les anneaux, ils sont maintenant presque collés, ne me laissant aucun mouvement libre. Il attrape ma mâchoire sans douceur et la redresse pour accrocher le dernier anneau doré autour de mon cou, relié aux deux autres par cette chaîne.

Ses yeux passent de mon œil à l'autre avant de me lâcher et de passer devant ses soldats, traversant rapidement le couloir. Il s'arrête quelques secondes et pivote légèrement la tête.

- Amenez le dans le quartier des esclaves.

L'un ouvre la grille et m'attrape violemment par le col pour me pousser en avant. Lorsqu'il tourne dans un autre couloir, nous continuons tout droit dans un coin plus reculé et délabré du château.

Tout est fini.

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L'étreinte des contraires {bxb}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant