Hors de contrôle

Chapitre 15 - Emma

La journée est grise, typique de Lille, avec un ciel lourd qui semble refléter mon humeur. Depuis le départ de Camille, l'appartement me semble vide. Je ne pensais pas que son départ me toucherait autant, mais voilà, elle est partie, et je suis là, seule, à essayer de comprendre comment on a pu en arriver là. Elle a refusé de me dire où elle était, mais partie de moi pense qu'elle dort chez Lola. Elle ne s'entend pas très bien avec sa mère et ne voit plus son père depuis des années, elle n'a pas d'amis proche chez qui elle pourrait aller qui vivent à Lille, alors par déduction, il ne reste que Lola. Je sais que Camille a besoin d'espace, et peut-être qu'elle a raison. Mais la savoir chez Lola, cette fille incroyablement sûre d'elle, sexy et lesbienne assumée, ça me perturbe plus que je ne voudrais l'admettre. Lola n'a jamais caché son attirance pour Camille, et même si je ne devrais pas m'en préoccuper, c'est plus fort que moi.

Je prends mon téléphone et je compose le numéro de Lola. Mon cœur bat à tout rompre, mais avant que je ne puisse me rétracter, elle répond, sa voix chaleureuse et accueillante à l'autre bout du fil.

— Salut Emma ! Ça fait longtemps. Comment tu vas ?

Je bafouille quelques mots, essayant de cacher mon malaise :

— Euh... Est-ce que Camille est avec toi ?

— Elle est là mais je pense qu'elle a besoin d'un peu de temps

— Je veux vraiment lui parler...

Après un instant de silence, probablement pour consulter Camille, Lola me répond :

— Ecoute, je pense que le mieux serait que tu viennes la voir.

Je reste un instant sans voix. L'idée de voir Camille me terrifie, mais je sais aussi que Lola a raison. Après quelques secondes d'hésitation, j'accepte son invitation.

— D'accord... je viendrai demain. Tu peux m'envoyer ton adresse ?

Je passe le reste de la journée dans un état de nervosité extrême, incapable de penser à autre chose qu'à ce rendez-vous avec Camille.

Le lendemain, au petit matin, je me prépare machinalement. J'enfile un jean et un pull, rien de spécial, mais je prends les vêtements dans lesquelles je me sens le mieux. Le trajet en métro jusqu'à chez Lola est interminable. Chaque station qui passe me rapproche un peu plus de cette confrontation inévitable. Quand j'arrive enfin devant son immeuble, mon cœur bat à tout rompre. Je prends une grande inspiration avant de frapper à la porte. Quelques secondes plus tard, Lola m'ouvre, un sourire bienveillant aux lèvres.

— Salut Emma. Rentre, fais comme chez toi.

Je la remercie en silence et entre dans son appartement. Camille est assise dans le salon, et dès que je la vois, une vague d'émotions me submerge. Elle lève les yeux vers moi, surprise de me voir là, mais elle ne dit rien. Ses yeux parlent pour elle : mélange de tristesse, de colère et, peut-être, de soulagement.

— Salut, dis-je doucement, m'avançant vers elle.

Camille se lève, hésitante, et je sens que ce n'est pas facile pour elle non plus. On s'observe un instant, comme si on cherchait à comprendre ce qui s'est passé, ce qui a changé. Lola s'éclipse discrètement dans une autre pièce, nous laissant seules.

— Pourquoi t'es venue ? demande Camille, sa voix plus froide que je ne l'aurais imaginée.

Je ne sais pas quoi répondre. Je cherche mes mots, mais rien ne semble assez juste.

— Parce que... tu me manques, finis-je par dire, presque dans un murmure.

Camille fronce les sourcils, et je sens que ma réponse ne suffit pas. Elle attend autre chose, peut-être des excuses, des explications, mais je ne sais pas par où commencer. Je sens le parfum de Camille, familier et réconfortant, et sans le vouloir, je me surprends à imaginer ce que serait ma vie sans elle. Ce n'est pas une pensée que je veux explorer, mais elle est là, insidieuse, prête à m'engloutir.