Hors de contrôle

Chapitre 16 - Camille

Le bruit léger des gouttes de pluie contre la fenêtre rythme les battements de mon cœur. La chaleur de la couverture contre ma peau ne suffit pas à calmer la vague d'anxiété qui me submerge. Emma va me rejoindre pour dormir avec moi. Cette pensée aurait dû me réconforter, mais au lieu de ça, elle me met sur les nerfs. Je ne suis pas sûr de comprendre Emma. Elle n'a pas eu de difficulté de faire un faux coming out devant une centaine d'inconnus lors du cocktail de Rainbow One, mais est paralysée à l'idée de le dire à nos deux colocs. Je ne sais pas combien de temps je pourrais supporter de vivre dans le secret. Je tends la main vers la table de nuit, attrapant mon téléphone. Je l'allume, espérant que faire défiler le fil Instagram m'occuperait l'esprit. Je tombe immédiatement sur une photo postée par Lola quelques heures avant. Elle a été prise lors de notre semaine chez elle. Dans la description de la photo, quelques mots sont écrits :

« Si un jour, par chance, nos cœurs se frôlent,

Je verrai enfin le temps qui s'envole

Alors, petite étoile, permets-moi de rêver,

Que mes émotions puissent se dévoiler. »

En lisant plusieurs fois ces vers, je comprends que le message caché m'est adressé. Mon cœur se serre. Je fais défiler les commentaires sous sa photo. Des compliments, des cœurs, des blagues de ses amis. Je repose mon téléphone sur ma poitrine en laissant échapper un soupir. Puis, je m'endors doucement, mes pensées se balançant entre Emma et Lola.

Soudain, la porte de ma chambre s'ouvre doucement. Je me réveille en sursaut, mon cœur battant encore plus vite qu'avant. C'est Emma. Elle referme la porte derrière elle sans un bruit, puis se glisse silencieusement sous les couvertures. Je la sens se rapprocher, et avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, elle m'enlace par derrière, posant délicatement ses mains sur mon ventre. Mon corps se tend immédiatement. Je ferme les yeux, essayant de me concentrer sur ma respiration, mais une vague d'inconfort monte en moi. Ce contact, aussi doux soit-il, me met mal à l'aise, et je sens la tension s'accumuler dans mon corps.

— Emma... Je n'aime pas qu'on touche mon ventre.

Elle s'arrête un instant mais ses mains restent immobiles. Puis, doucement, elle murmure près de mon oreille :

— C'est normal, Camille... C'est nouveau pour nous deux. Mais tu verras, tu vas t'habituer.

Ses mots me surprennent, comme si elle pensait que ce malaise passerait avec le temps. Mais pour moi, ce n'est pas juste une question d'habitude. Je me sens étouffée. Pourtant, je ne dis rien, incapable de lui expliquer ce que je ressens vraiment. Je prétexte que je dois changer de côté pour qu'elle soit forcé de me lâcher.

Le lendemain matin, lorsque je me réveille, le lit est froid à côté de moi. Je tends la main dans le vide, cherchant inconsciemment la présence d'Emma, mais elle est partie. La pluie a cessé, laissant place à une lumière grise filtrant à travers les rideaux. Je saisis mon téléphone posé sur la table de nuit. L'écran s'allume et je remarque deux nouveaux messages. Le premier vient d'Emma :

« Je suis retournée dans ma chambre tôt ce matin pour ne pas me faire choper par nos colocs. »

Je fronce les sourcils. Ce jeu de cache-cache avec nos colocs commence à me peser, mais je ne réponds pas tout de suite. Je me dis que j'aurai le temps d'y réfléchir plus tard. Je passe au second message. Il vient de Lola. Une petite bouffée d'excitation monte en moi alors que j'ouvre son message :

« Coucou, j'espère que tu as bien dormi. Comment ça va avec Emma ? Tu me manques un peu, on pourrait s'organiser une petite sortie un soir après le travail ? 😘 Passe une belle journée 💫 »